Introduction
En tant qu’étudiante en graphisme et multimédia, ma passion pour l’animation a été le moteur de mon choix de parcours. Depuis toujours, je me suis posée des questions sur les coulisses de la création animée : quelles techniques sont utilisées, comment l’histoire de l’animation a-t-elle évolué au fil du temps ? Cependant, au fur et à mesure de mon apprentissage, mes perspectives ont évolué, et mes interrogations ont pris une tournure plus profonde.
Je suis passée de la simple curiosité sur la création de l’animation à une réflexion approfondie sur le 'pourquoi’ de l’animation. Quel est réellement son rôle et son importance dans notre société moderne ? Cette réflexion s’intensifie, surtout lorsqu’on aborde des sujets sensibles ou tabous. Pourquoi choisir l’animation comme médium pour traiter des sujets délicats, tels que la santé mentale ? Quelle est la puissance narrative de l’animation dans la transmission d’histoires complexes et parfois difficiles ? Pourquoi ce médium artistique est-il choisi pour donner vie à des narrations délicates, et comment parvient-il à toucher un public de manière unique ?
Mon parcours d’études vise à explorer en profondeur ces questions, à comprendre les liens entre l’animation, la société et la santé mentale, ainsi que le rôle de l’animation dans le traitement de sujets sensibles tels que la santé mentale. Je suis motivée par le désir de contribuer à cette forme d’expression artistique et de communication visuelle, en saisissant pleinement son potentiel et en explorant son rôle crucial, surtout lorsqu’il s’agit de donner une voix aux sujets qui restent souvent dans l’ombre. Cette exploration va au-delà des simples techniques pour plonger dans le cœur même de l’animation, cherchant à comprendre comment elle peut être utilisée de manière significative dans notre société. Chaque projet animé devient ainsi une opportunité d’explorer non seulement la créativité technique, mais également la profondeur de l’expression artistique et son impact sur la compréhension collective de sujets complexes. J’ai été attirée par la puissance narrative de l’animation et son potentiel à donner vie à des narrations délicates.
Cette recherche se structure autour de trois axes principaux, chacun apportant une contribution significative à la compréhension des enjeux liés à la santé mentale et à la lutte contre sa stigmatisation sociale. La première section se penche sur la nature et les origines de la stigmatisation, analysant comment et pourquoi la société en vient à stigmatiser la maladie mentale, avec un regard particulier sur les conséquences de cette stigmatisation sur les individus affectés. Ensuite, la deuxième partie explore le rôle de l’animation comme outil puissant dans la représentation des troubles mentaux, mettant en lumière la comparaison entre l’animation et l’image statique, une étude approfondie du film Self in Progress, et l’analyse de l’utilisation de la bande dessinée et de l’animation dans Persepolis. Enfin, la troisième section examine l’importance de l’empathie dans le contexte de l’animation, en se concentrant sur la manière dont elle peut susciter l’empathie chez le public et contribuer à la réduction de la stigmatisation liée aux troubles mentaux, avec une exploration approfondie du film d’animation Inside Out de Disney Pixar. Cette structure permet une approche complète et nuancée, mettant en évidence les différents aspects du sujet traité dans ce mémoire.
II. Quand l’animation devient utile
II.1. L’animation et l’image statique
Les progrès des technologies informatiques ont considérablement renforcé les échanges culturels et la diffusion de l’information. Actuellement, les films d’animation sont de plus en plus accessibles sur des plateformes gratuites et internationales comme YouTube. Cela favorise la communication, permettant aux gens de commenter et d’échanger à l’échelle mondiale.
La communication visuelle prend également de l’importance dans le domaine de la santé en général. Si elle a déjà facilité la communication entre médecins et patients, pourquoi ne pas utiliser la même approche pour aider à exprimer des sentiments complexes à travers l’animation ? Cela pourrait contribuer à éduquer la société et à établir des liens entre les personnes souffrant de troubles mentaux, qui peuvent se sentir incomprises et isolées.
Les images peuvent transmettre des informations ou des messages de manière plus efficace qu’un texte long ou une description détaillée. Les graphiques permettent une représentation concise de schémas complexes d’objets détaillés, difficile à décrire verbalement. En utilisant des graphiques, on peut également transmettre un message sérieux de manière humoristique, captant ainsi l’attention des spectateurs en plus de leur qualité esthétique. En somme, c’est un moyen de communiquer une émotion ou une pensée qui peut parfois être complexe à exprimer verbalement. La puissance d’une vidéo réside dans sa capacité à intensifier l’impact visuel. En tant que séquence dynamique d’images, elle va au-delà de la simple efficacité d’une image statique. La vidéo permet d’explorer et de développer des idées ainsi que des sentiments en offrant des détails supplémentaires, une richesse narrative qui échappe souvent à une seule image.
Toutefois, les recherches comparatives indiquent que les graphiques animés offrent des détails entre les étapes clés, intégrant les actions spatio-temporelles fondamentales des composants, détails qu’on ne trouve souvent pas dans les graphiques statiques. Ces derniers se concentrent principalement sur les éléments généraux, tels que les objets ou leurs parties. Par conséquent, les animations fournissent une quantité d’informations plus importante que les graphiques statiques, en détaillant non seulement les objets généraux, mais également les actions spécifiques qui s’y déroulent.
De plus, l’animation offre la possibilité de raconter des histoires liées au temps, permettant d’observer comment les sentiments se développent et évoluent au fil des événements. Cependant, la complexité de l’animation dépend de l’information à transmettre. Pour qu’une animation soit véritablement utile, il est essentiel de la rendre compréhensible et imaginable. Si elle devient trop complexe, cela peut rendre sa compréhension difficile, comme le soulignent Mireille Betrancourt, Julie Bauer-Morrison et Barbara Tversky5. Un exemple concret est illustré dans le film de l’étudiante Kayla Lehman, Self in progress. Quand on ne connaît pas la maladie, cela complique la compréhension des informations.
Cependant, lorsque l’animation est découpée en étapes discrètes correspondant à celles montrées dans le graphique statique, les résultats sont similaires. Ainsi, on comprend que l’animation devient utile lorsqu’elle présente des détails plus fins, et non seulement parce qu’elle met l’information en mouvement. Ce qui peut être plus réalisable en animation que dans le graphisme statique. Cependant, dans plusieurs cas, l’animation était moins efficace pour une seule raison, c’est que les étapes sont présentées de manière discrète.
En conclusion, l’évolution rapide des technologies informatiques a considérablement enrichi les échanges culturels et la diffusion de l’information, mettant en lumière l’importance croissante de la communication visuelle. Cette tendance trouve des applications significatives dans des domaines variés, notamment la santé, où l’animation peut jouer un rôle essentiel dans l’expression de sentiments complexes et la sensibilisation aux troubles mentaux. Les images en mouvement, en particulier, ont le pouvoir de transmettre des informations de manière plus efficace et détaillée que les médias statiques, offrant une perspective plus complète sur des sujets parfois délicats.
Afin d’illustrer ce potentiel, nous allons explorer le film Self in progress réalisé par l’étudiante Kayla Lehman. Ce film, en abordant la complexité des troubles mentaux, offre un exemple concret de la manière dont l’animation peut être utilisée pour sensibiliser et éduquer. Cependant, comme nous le verrons, la réussite de l’animation dépend de sa capacité à rendre les informations compréhensibles et imaginables, tout en évitant une complexité excessive qui pourrait entraver la compréhension du public. En analysant ce cas spécifique, nous pourrons mieux appréhender les nuances de l’utilisation de l’animation comme outil de communication efficace, en soulignant à la fois ses avantages et ses limites.
II.2. Étude d’analyse du film Self in progress
Self in Progress est un court métrage d’animation explorant l’influence du surréalisme dans la représentation visuelle. Le film illustre l’expérience du protagoniste face à l’anxiété et son cheminement vers un état mental plus sain à travers l’acceptation et la compassion envers elle-même. J’ai mené une enquête informelle avec une dame de 35 ans travaillant dans les ressources humaines, qui n’a jamais connu quelqu’un ayant des troubles mentaux. Je lui ai suggéré de regarder ce film que je considère excellent en termes graphiques et artistiques, bien que complexe pour transmettre son message caché aux spectateurs. Cette personne l’a visionné à trois reprises.
La première fois, elle a regardé le film seule, tandis qu’une dame observait par curiosité. Leur réaction a été que le film était trop artistique et complexe à comprendre. La dame a également exprimé que c’était trop compliqué pour elle, même pour tenter de l’interpréter.
La deuxième fois, je lui ai fait lire un court paragraphe avant de revoir le film, expliquant que ce dernier abordait le thème de l’anxiété. Leur réponse a été qu’elles n’avaient pas initialement compris que le personnage principal souffrait d’un trouble de santé mentale. Bien qu’elles aient remarqué que le personnage principal traversait une phase émotionnelle, elles n’ont pas identifié une maladie mentale.
Continuant avec la personne seule cette fois, la dame qui regardait par curiosité n’était plus présente. Nous avons visionné le film ensemble, discutant de la première scène où le personnage principal sculpte une statue à son image, et en sculptant, un liquide visqueux noir s’écoule de la sculpture. La spectatrice m’a expliqué qu’elle avait compris qu’au début, le personnage principal était une sculptrice, stressée, et qu’elle réalisait quelque chose qui lui causait du stress. Cependant, elle ne comprenait pas la signification de la sculpture. Le liquide noir visqueux n’était pas clair pour elle, que ce soit en termes de sa nature ou de sa réalité, et elle se demandait s’il était réel ou imaginaire.

Passant à la deuxième scène, le personnage principal entre dans un tunnel et se transforme en une marionnette en bois manipulée par des mains contrôlant des fils, observée par des créatures noirs avec un grand œil. La spectatrice avait du mal à comprendre la scène : elle a dit qu’elle avait compris qu’il y avait quelque chose qui manipulait le personnage principal. À un moment donné, le personnage principal décide de ne plus être manipulé, mais elle n’a pas saisi le rôle des yeux qui observent. Elle répétait fréquemment les mots« je ne sais pas ». Elle a regardé plusieurs fois la fin de cette scène en se demandant pourquoi le personnage principal se divise en deux, car on observe ses hanches et ses pieds dans un seul groupe qui part séparément de l’autre partie du corps. Elle se demande également pourquoi les yeux qui observent se transforment en monstres capables de se déplacer. Après plusieurs reprises, elle est arrivée à comprendre que les yeux pourraient être une représentation de personnes qui observent le personnage principale.

Dans la troisième scène, où l’on voit le personnage principal sous la forme d’une sculpture exposée dans un musée, sans jambes ni bras, la spectatrice soupçonne que ses yeux ont dévoré le personnage principal. Elle ressent que le personnage a perdu une partie d’elle-même. Après une courte pause de réflexion, elle exprime que ces yeux ont eu des répercussions significatives sur le personnage principal.

Dans la scène où le personnage principal apparaît sur une montre, comme s’il était une aiguille, la spectatrice a suggéré que cela représentait le temps qui s’écoule. Elle se demandait pourquoi le personnage principal avait choisi la lettre 8, notant également que les détails n’étaient pas clairs pour elle.

Pour la scène suivante, on observe le personnage principal avec un double d’elle-même, noir comme le liquide visqueux observé auparavant. Après de nombreux doutes et questionnements, la spectatrice a affirmé que le personnage principal vivait un conflit intérieur et avait réussi à le résoudre. Cependant, elle restait sceptique car elle continuait à voir les deux personnages distincts au lieu d’une unité. Elle n’était pas certaine que le personnage principal ait réellement trouvé la paix avec elle-même, surtout en voyant le personnage devenir transparent à la fin.

Elle ajoute en disant : « Les spectateurs qui regardent peuvent avoir différents troubles mentaux autres que l’anxiété, ils ne vont pas forcément comprendre que le film aborde l’anxiété. C’est difficile à comprendre. Peut-être que si je le regarde plusieurs fois, je vais mieux comprendre, mais il restera toujours des détails non compréhensibles pour moi. »
On regarde le film pour la troisième fois. La spectatrice dit : maintenant, elle comprend que le liquide visqueux représente la maladie mentale. Elle précise que si elle n’avait pas lu le texte résumant le film, elle n’aurait pas compris. J’évite de donner des commentaires ou mon avis pour ne pas l’influencer, mais dans la deuxième scène où le personnage principal rentre dans un tunnel, je dis que ça me rappelle le film de Disney Alice au pays des merveilles. En arrivant à la scène du musée, elle pense que l’anxiété est devenue si forte qu’elle dévore le personnage principal et laisse des marques. En arrivant à la scène de la montre, la spectatrice comprend que le personnage principal voulait abandonner, puis elle s’est raccrochée au numéro huit. La spectatrice dit qu’elle n’a rien à rajouter à ce qu’elle avait déjà dit.

En somme, l’analyse du court métrage Self in Progress par la spectatrice met en lumière la richesse symbolique du film et les défis rencontrés lors de la compréhension de son message sur l’anxiété. Les différentes scènes, telles que la sculpture, le tunnel, le musée et la montre, ont suscité des questionnements et des interprétations variées. Bien que la spectatrice ait finalement identifié le liquide visqueux comme représentant la maladie mentale et le numéro huit sur la montre comme un moment de résilience, elle admet que certains détails demeurent énigmatiques. Cette démarche révèle la nécessité d’un accompagnement, comme la lecture d’un résumé, pour décrypter les nuances du film. En soulignant que chaque visionnage apporte une compréhension plus approfondie.

Les explications fournies par la réalisatrice sur les détails du film indiquent les informations suivantes : le désert dans cette animation symbolise l’esprit du personnage, offrant une représentation visuelle de son monde intérieur. Les statues en pierre inachevées représentent les divers aspects du personnage, soulignant que le processus de compréhension de soi est toujours en cours. Cela suggère que le personnage doit explorer et améliorer différentes parties de sa personnalité.
La sculpture devient une métaphore puissante, indiquant que le personnage travaille sur lui-même, façonnant sa vie et son identité. Le travail sur la sculpture représente le changement personnel, facilité par la thérapie mentale, mais souligne également les défis liés à ce processus.

La scène du liquide visqueux noir dévoile l’anxiété provoquée par une erreur commise, marquant le début d’une exploration surréaliste des angoisses du personnage. La performance sur scène, où le personnage danse pour masquer son anxiété, illustre la pression sociale et le besoin perpétuel de paraître bien, même en cas de détresse intérieure.
La marionnette et les fils représentent les expériences du personnage avec l’anxiété et le TOC, symbolisant la sensation d’être manipulé par ces troubles. L’audience, représentée par le liquide visqueux avec une tête et un œil, symbolise le jugement des autres, soulignant les préoccupations des personnes vivant avec des troubles mentaux.

Le moment où le personnage retire les fils de la marionnette illustre la reprise de contrôle face à l’anxiété. La transformation de la marionnette en statue de marbre reflète les stéréotypes de genre dans l’histoire du surréalisme, où les femmes étaient souvent perçues comme des objets.

Les vers oculaires dotés de dents symbolisent le regard masculin et le potentiel de violence. Les bras sortant de la statue représentent la reprise du contrôle par le personnage, bien que des traces de l’impact persistent.

La référence à l’œuvre de Magritte 6, The RapeRape, 1945 by Rene Magritte, souligne la manière dont la société perçoit les femmes comme des objets. L’horloge fondante, inspirée de Dali, évoque la perception du temps qui s’écoule et les attentes extérieures.
Le numéro 8 devient un symbole de l’infini, soulignant la reprise du contrôle du personnage sur sa perception du temps. La fermeture des yeux, symbolisée par la fusion des yeux, représente le blocage des opinions extérieures pour se recentrer sur soi-même.
La scène où le personnage est couvert de liquide visqueux noir symbolise la vérité de l’anxiété comme composante essentielle de sa réalité. La main du personnage tenue par la version visqueuse représente l’acceptation de soi avec les troubles d’anxiété.

Enfin, le personnage brillant au centre du statut, formant la partie manquante, souligne l’importance de l’acceptation et de la bienveillance envers soi-même pour la croissance et la guérison en santé mentale.
À mon avis, le film Self in Progress s’adresse principalement à un public âgé de 16 ans et plus, déjà confronté à des troubles mentaux et vivant avec l’anxiété. Il est évident, à travers l’enquête que j’ai menée avec une dame, qu’il n’était pas facile pour elle de comprendre certains éléments, étant donné qu’elle n’a pas de connaissance approfondie de la maladie, en plus de la complexité du film. C’est pourquoi je pense que le film s’adresse particulièrement à ceux qui vivent avec l’anxiété, pouvant leur fournir la force nécessaire pour avancer et faire face à leur maladie. Bien que la réalisatrice, Kayla Lehman, semblait vouloir illustrer les effets positifs de la thérapie, je ne pense pas que l’idée de la thérapie soit clairement exprimée dans le film : il semble plutôt s’agir d’un effort personnel.
II.3. Bande Dessinée et Animation dans Persepolis
La bande dessinée, en tant que forme d’expression graphique statique, repose sur l’utilisation d’images fixes pour dévoiler progressivement une situation ou une émotion à travers plusieurs cadres, le médium d’animation présente des caractéristiques distinctes. Dans la bande dessinée, l’évolution des détails se manifeste généralement à travers des étapes clés visibles dans chaque cadre successif, permettant au lecteur de suivre le déroulement de l’intrigue.
D’un autre côté, l’animation va au-delà de cette approche en offrant la possibilité d’illustrer des nuances plus fines. Grâce à la nature dynamique de l’animation, le graphique animé peut introduire des sous-étapes, capturant ainsi des moments plus spécifiques et détaillés de l’action. Cette capacité à décomposer davantage le récit visuel permet non seulement de rendre compte des relations spatiales entre les personnages, mais aussi de mettre en lumière les subtiles transitions émotionnelles et les éléments narratifs qui pourraient être perdus dans une représentation statique.
Le film Persepolis ne vise pas à aborder directement la santé mentale, mais elle se dévoile à travers le parcours tumultueux de Marjane Satrapi7 au sein d’un contexte politique et social instable. L’impact des événements historiques tels que la révolution islamique et la guerre Iran-Irak sur la vie de Marjane met en lumière les conséquences psychologiques du traumatisme collectif. Les moments de déplacement culturel et d’exil de Marjane en Europe soulèvent des questions cruciales sur l’identité, la pertinence culturelle et les défis d’adaptation, tous des facteurs influençant la santé mentale. L’utilisation de l’art comme moyen d’expression et la quête de sens dans sa vie reflètent des stratégies de coping importantes. Les relations interpersonnelles, qu’elles soient familiales ou amicales, sont également au cœur du récit et apportent une dimension sociale à la compréhension des enjeux de santé mentale. Un exemple notable est la relation entre Marjane et sa grand-mère. La grand-mère de Marjane est un soutien important pour elle tout au long du récit, offrant conseils, réconfort et une perspective historique sur les événements tumultueux de l’Iran. Cette relation intergénérationnelle influence profondément la manière dont Marjane fait face aux défis politiques et sociaux, fournissant un ancrage émotionnel crucial dans son parcours. En fin de compte, Persepolis offre une exploration émotionnelle riche, illustrant la résilience de Marjane face à l’adversité et soulignant les liens entre les expériences individuelles, les événements historiques et la santé mentale d’une manière indirecte.

Persepolis décrit le parcours tumultueux de Marjane Satrapi à travers les bouleversements politiques en Iran. Les expériences traumatisantes qu’elle endure, comme la répression politique et la perte de proches, peuvent évoquer des émotions intenses chez les spectateurs. Par exemple, la scène où Marjane perd son oncle pendant la révolution iranienne peut susciter des sentiments de tristesse et de chagrin chez le public. Ces récits personnels et les thèmes universels abordés dans le film, tels que la quête d’identité et la lutte contre l’oppression, peuvent résonner avec les expériences personnelles des spectateurs. Certains pourraient se sentir connectés aux luttes de Marjane, ce qui peut susciter des réflexions profondes sur leur propre vie et identité. Cela peut également stimuler des discussions sur des problèmes sociaux et politiques, contribuant ainsi à façonner la perspective individuelle. Bien que le film ne soit pas explicitement centré sur la santé mentale, l’exploration de ces thèmes peut avoir des implications indirectes sur le bien-être émotionnel des spectateurs, en les encourageant à réfléchir à leur propre vie et à leur place dans le monde. Dans l’ensemble, « Persepolis » fournit un matériau multidimensionnel et enrichissant pour explorer la relation entre l’animation, la narration visuelle et les thèmes complexes.

La comparaison entre la bande dessinée et le film Persepolis révèle des subtilités artistiques et narratives qui distinguent ces deux médias tout en soulignant l’essence commune de l’histoire de Marjane Satrapi. Sur le plan narratif, la bande dessinée permet une exploration plus approfondie des pensées intérieures des personnages grâce aux bulles de texte, offrant une intimité et une réflexion subtiles. Les silences et les vides entre les cases permettent également aux lecteurs de s’attarder sur chaque détail, encourageant une immersion contemplative. À l’inverse, le film utilise la puissance de l’image en mouvement pour évoquer les émotions, privilégiant l’expression faciale et le langage corporel pour transmettre le vécu intérieur des personnages.

En ce qui concerne l’aspect visuel, la bande dessinée conserve le style graphique distinctif de Satrapi, avec ses lignes simples, son utilisation minimaliste de la couleur et ses compositions visuelles soigneusement orchestrées. Un style graphique simple mais expressif est employé pour raconter son histoire. Les images en noir et blanc dépeignent avec précision les événements et les émotions, et la narration, combinée à la séquence d’images, crée un rythme qui permet au lecteur d’absorber chaque moment de manière réfléchie. Les détails visuels, bien que statiques, sont riches en symbolisme et en émotion, et l’absence de couleur renforce l’impact du récit, créant ainsi une ambiance simple, soulignant l’impact émotionnel des événements.

D’autre part, la réalisation de Vincent Paronnaud8 et Marjane Satrapi a apporté une nouvelle dimension à l’histoire. L’utilisation de la couleur, du mouvement et du son a permis de renforcer l’impact émotionnel de nombreuses scènes. Le choix de l’animation a également permis de donner vie aux personnages de manière plus fluide, tout en conservant l’esthétique distincte de la bande dessinée. Dans le cas de l’animation, la bande sonore joue un rôle essentiel. La musique, les dialogues et les bruitages contribuent à l’atmosphère globale et peuvent intensifier les émotions ressenties par le public. De plus, le mouvement des personnages et des scènes permet une immersion visuelle plus dynamique, offrant une expérience cinématographique engageante. Le film opte pour une esthétique animée qui élève visuellement l’histoire. Les mouvements fluides et les couleurs vibrantes apportent une dynamique nouvelle tout en préservant l’essence visuelle caractéristique de la bande dessinée. L’aspect temporel est également significatif. La bande dessinée, en tant que médium statique, offre une maîtrise totale du rythme de lecture. Les lecteurs peuvent revenir en arrière ou prendre leur temps pour absorber chaque détail. Le film, en revanche, impose un rythme constant et une linéarité temporelle, influençant ainsi la perception du temps et l’impact émotionnel des événements.

En résumé, chacun de ces médias offre des avantages distincts, mais les deux partagent une base narrative puissante centrée sur l’expérience personnelle de Marjane Satrapi pendant et après la révolution islamique en Iran. La bande dessinée et l’animation de « Persepolis » se complètent harmonieusement plutôt qu’elles ne rivalisent. La bande dessinée offre une immersion contemplative, permettant aux lecteurs de s’attarder sur chaque détail visuel, de méditer sur les nuances de l’histoire de Marjane Satrapi et d’établir une connexion personnelle profonde. D’un autre côté, l’animation enrichit l’expérience en introduisant la fluidité du mouvement, la palette émotionnelle de la couleur et une bande sonore évocatrice qui renforce l’impact émotionnel des scènes clés. Ces deux médias, bien que distincts dans leur approche, se complètent en offrant des perspectives uniques et en permettant au public d’explorer les facettes complexes et émotionnelles du récit de Marjane Satrapi de manière individualisée et immersive.
III. L’importance de l’empathie dans l’animation
III.1. Comment l’animation peut susciter l’empathie chez le public et contribuer à la réduction de la stigmatisation associée aux troubles mentaux.
L’animation a le pouvoir magique de nous transporter dans des mondes imaginaires, éveillant en nous une palette d’émotions. Elle possède ce don exceptionnel d’attirer l’attention et de captiver des publics de tous âges. L’animation devient une force capable de transformer les perceptions et d’ouvrir des dialogues cruciaux sur des sujets délicats tels que la santé mentale. Ainsi, elle peut non seulement nous émerveiller, mais aussi nous aider à comprendre et à influencer le monde qui nous entoure.
Cependant, qu’est-ce qui crée ce lien si profond avec les personnages animés, indépendamment de notre âge : Pourquoi ressentir de l’empathie dans ces histoires est-il si important ? Et surtout, l’animation a-t-elle réellement le pouvoir de changer les mentalités et de combattre la stigmatisation ?
L’article intitulé Evaluation of the Impact of an Awareness-Based Animation expose les conclusions d’une étude visant à évaluer l’effet de l’animation sur la réduction de la stigmatisation liée à la dépression, ainsi que sur la sensibilisation des étudiants à la manière appropriée de communiquer avec une personne souffrant de ce trouble. Les chercheurs ont soumis 22 phrases aux étudiants, recueilli leurs évaluations avant et après la visualisation d’une vidéo d’animation, et constaté une évolution significative des connaissances sur la dépression parmi les participants âgés de 19 à 30 ans. Une modification de perspective de 81,8 % a été observée, indiquant une meilleure compréhension des interactions appropriées. Notamment, parmi les 251 participants, 81 ont déclaré ne pas avoir d’expérience en matière de troubles mentaux. Les résultats soulignent l’efficacité de l’animation en tant qu’outil éducatif, mettant en lumière son rôle crucial dans la transmission de messages compréhensibles et percutants grâce à des choix visuels et narratifs judicieux. En améliorant la compréhension et en suscitant un changement de perspective, l’animation se révèle être un moyen prometteur de sensibilisation à la dépression.
Les statistiques montrent que les informations présentées sous forme de vidéos web ou d’animations ont 58 % de chances supplémentaires d’être mémorisées par rapport à un message audio seul. Ainsi, l’utilisation d’éléments visuels et animés améliore considérablement la rétention de l’information, selon l’article Evaluation of the impact of an awareness-based animation . Et la psychologue éminente Marie Louise Von Franz dans son livre Archetypal Patterns in Fairytales explique que les contes de fées sont plus faciles à mémoriser que la littérature, car les individus s’y identifient de manière subconsciente. Il est important de se rappeler que le récit animé ne devrait pas avoir pour objectif de créer une connexion basée sur une réalité partagée, mais plutôt sur une conscience commune.
À quoi sert l’empathie ? L’empathie consiste à établir une connexion émotionnelle avec le public en montrant que vous comprenez ses problèmes, préoccupations et émotions. Des études en neurobiologie ont démontré comment des récits captivants modifient la chimie cérébrale. Lorsque le public se sent lié à une narration, le cerveau libère des neurochimiques qui favorisent l’attention (cortisol) et déclenchent un sentiment d’empathie (ocytocine). Les individus s’attachent aux personnages qui les comprennent. En créant des personnages auxquels votre public peut s’identifier, vous disposez d’un outil puissant qui favorise l’empathie. De plus, l’un des facteurs les plus importants dans l’impact émotionnel de l’animation est la nostalgie. Nous avons tous regardé des films d’animation pendant notre enfance qui a marqué cette période. En les revisitant à l’âge adulte, une vague d’émotions et de souvenirs peut surgir, créant une expérience puissante et nostalgique.
L’une des forces majeures de l’animation réside dans son utilisation d’éléments visuels pour exprimer du sens et des émotions, combinée à une structure narrative qui intensifie les réponses émotionnelles, permettant ainsi une connexion plus profonde. En améliorant la compréhension des participants sur le sujet et en suscitant un changement de perspective, l’animation a pleinement démontré son potentiel en tant qu’outil éducatif et de sensibilisation dans le contexte de la dépression.
Au-delà de l’aspect émotionnel, l’animation est influencée par des principes psychologiques tels que l’apprentissage social et la dissonance cognitive. Dans le film de Pixar, Inside Out, les émotions du personnage principal sont représentées sous forme de personnages. Cette représentation complexe des émotions contribue à la compréhension des expériences émotionnelles. Le film n’enseigne pas seulement aux enfants à comprendre leurs émotions, mais il joue également un rôle éducatif pour les adultes, en particulier les parents. De plus, il contribue à la réduction de la stigmatisation associée aux problèmes de santé mentale.

L’avenir de l’animation dépend de la manière dont les créateurs abordent leur travail. Elle peut soit encourager le changement social, soit renforcer des idées préconçues. Il est crucial que les créateurs soient conscients de cela et produisent un contenu inclusif et réfléchi pour promouvoir la compréhension et l’empathie.
Les dessins animés et les films animés exercent une influence considérable sur nos perspectives en reflétant et parfois en remettant en question notre manière de voir le monde. Malgré leur capacité à illustrer la diversité, ils présentent également le risque de renforcer des idées fausses. Il est essentiel pour les spectateurs d’adopter une approche critique envers ces médias afin de promouvoir une vision du monde plus variée et compréhensive, favorisant ainsi l’empathie entre différents groupes et identités.
III.2. Une exploration approfondie du film d’animation Inside Out de Disney Pixar
Le choix du film Inside Out pour son intérêt graphique est motivé par la manière novatrice dont le réalisateur et l’écrivain Pete Docter9 a créé un univers visuel captivant. La décision de donner vie aux émotions en tant que personnages principaux apporte une dimension visuelle unique, permettant aux spectateurs de visualiser et de s’immerger dans le monde complexe des sentiments humains. De plus, l’incorporation du centre des souvenirs fondamentaux sous forme d’îles ajoute une profondeur visuelle et symbolique, représentant de manière créative la construction et l’évolution de la personnalité. La capacité de ces îles à être détruites ou à voir de nouvelles îles émerger offre une métaphore visuelle puissante pour les expériences de croissance, de résilience et de transformation personnelle. Ainsi, le choix de Inside Out pour son aspect graphique va au-delà de l’esthétique, contribuant à une représentation visuelle riche et imaginative des émotions et des souvenirs, renforçant ainsi l’impact émotionnel du film et le rendant particulièrement pertinent pour une étude approfondie.

Le film Inside Out explore le parcours de Riley, une jeune fille de 11 ans qui déménage de Minnesota à San Francisco avec ses parents. Au cours de cette transition, Riley subit des transformations tant mentales que personnelles, cherchant à s’adapter à sa nouvelle vie et aux défis de la croissance. Les téléspectateurs sont entraînés à travers le monde intérieur de Riley en compagnie de ses cinq émotions – Joie, Tristesse, Colère, Peur et Dégoût. Ces émotions jouent un rôle important en l’aidant à traverser cette période délicate de l’adolescence et à prendre des décisions cruciales.

Nous avons l’occasion de découvrir les mécanismes internes de l’esprit, où Joie et les autres émotions se succèdent au« panneau de contrôle », influençant les sentiments de Riley et ses réactions face aux événements de sa vie.

Le film nous aide à comprendre que les enfants, et même les adultes, réagissent à des situations différentes en fonction de leurs émotions plutôt que de leur volonté propre. Tout ce que nous disons ou faisons dépend de l’émotion du moment. Il est crucial que les parents et même les enseignants comprennent la relation entre les émotions et les comportements des enfants.
À travers Inside Out, les spectateurs sont invités à explorer visuellement les rouages internes de l’esprit, offrant aux jeunes des représentations concrètes sur la formation des souvenirs, l’influence des émotions sur le comportement, ainsi que d’autres aspects du fonctionnement cérébral tels que la pensée et l’oubli. Aborder ces mécanismes internes permet aux enfants de réfléchir à leur propre cerveau et les habilite à comprendre comment ils pensent, ressentent et agissent.
Chaque émotion s’approprie une couleur : jaune pour la Joie, bleu pour la Tristesse, rouge pour la Colère, violet pour la Peur et vert pour le Dégoût. Joy est l’émotion principale dans Inside Out. Elle a la peau ambrée, des cheveux bleus, et des yeux bleu clair. Elle est la seule à porter une robe. Joy brille en bleu et jaune, avec des pieds ronds sans orteils. Toujours lumineuse, elle symbolise la joie même dans les moments difficiles. Lorsqu’elle se déplace, ses mouvements physiques sont légers, comme si elle s’envolait. Ce personnage est unique par sa conception visuelle, car c’est elle le personnage le plus important du film. Ainsi, Docter et le producteur Jonas Rivera ont voulu que le personnage de Joy soit le plus « arrondi » et le plus « dimensionnel ». Cette décision stratégique vise à refléter le rôle crucial de Joy dans le récit. L’idée de faire de Joy le personnage le plus « arrondi » signifie qu’elle est le mieux développé, avec une profondeur émotionnelle et une complexité qui la distinguent des autres émotions. Cela renforce son statut en tant que guide principal de Riley à travers ses expériences émotionnelles. La dimensionnalité de Joy, en termes de caractère, s’étend au-delà de la simple représentation de la joie, montrant qu’elle est capable d’une gamme plus large d’émotions et de réponses, ce qui la rend plus réaliste et humaine. Ils ont également décidé d’incorporer une « touche de tristesse » dans le personnage de Joy dès le départ, symbolisée par ses cheveux bleus. Cela sert de préfiguration, suggérant que même l’émotion la plus joyeuse et optimiste peut avoir des nuances plus sombres et complètes. Le réalisateur Pete Docter explique : « Donner des cheveux bleus à Joy, complètement opposés au jaune, l’a rendue plus complète et a fait d’elle un personnage visuellement plus complexe. Et nous aimions l’idée qu’elle ait déjà un élément de tristesse en elle dès le tout début, même si elle ne comprend pas la tristesse. »

Dégoût est vert parce que la couleur verte associée à la nourriture peut indiquer qu’elle est avariée.« La peur était un peu, franchement, la couleur restante. Nous avons essayé de les concevoir comme un joli ensemble de groupe pour qu’ils aient une bonne apparence ensemble », a déclaré Docter.« Notre espoir est qu’à un moment donné, le violet devienne la couleur de la peur, comme si, dans cent ans, les gens diront, ‘I am afraid, i feel purple’ », a ajouté Rivera. Comme l’expression anglaise courante ‘I feel blue’ signifiant se sentir triste, déprimé ou mélancolique. La couleur bleue est souvent associée aux sentiments de tristesse ou à une sensation de morosité.

Après la lecture de la définition des couleurs dans l’article « Feeling purple? – The psychology of colour », il ressort que les couleurs peuvent avoir des significations positives et négatives simultanément, cela dépend de la culture et de la manière dont les gens les interprètent.
Dans le film, on observe que Joie tient souvent les rênes et cherche constamment à éloigner Tristesse du « panneau de contrôle ». Cependant, cette approche n’est pas optimale, car il est essentiel d’apprendre à écouter et comprendre les émotions plutôt que de les repousser. À un moment donné, on constate que Joie réalise l’importance du rôle de Tristesse dans la vie de Riley. Elle lui laisse alors prendre le contrôle du « panneau de contrôle » pour résoudre la situation que Riley traverse. Le film souligne le fait que ressentir de la tristesse est parfois nécessaire, et il est bénéfique d’exprimer cette émotion. Lorsque Tristesse prend le contrôle, Riley partage ses sentiments avec ses parents et pleure dans leurs bras, aidant ainsi ces derniers à comprendre ce qu’elle pense et comment elle vit leur déménagement, contribuant ainsi à améliorer sa situation émotionnelle.

L’article 5 Life Lessons Inside Out Teaches About Emotions souligne la pression sociale visant à projeter un bonheur constant, en particulier sur les réseaux sociaux, incitant les individus à éviter de confronter leur tristesse. Il souligne l’importance de reconnaître et d’accepter la tristesse en tant qu’émotion humaine nécessaire, permettant l’autoréflexion et le traitement émotionnel. Le texte fait la distinction entre la tristesse temporaire, souvent liée à des déclencheurs spécifiques, et la dépression, qui peut ne pas avoir de cause spécifique et persiste sur une période prolongée. Le message global encourage à reconnaître et à accepter la tristesse tout en reconnaissant la distinction entre les réponses émotionnelles normales et les signes potentiels de dépression.
Et on voit aussi dans le film qu’il y a un centre de souvenirs fondamentaux qui forme la personne que l’on est aujourd’hui. Le centre de souvenirs fondamentaux contient les moments pivots et importants de notre vie. En vieillissant, ces souvenirs peuvent être associés à un mélange d’émotions. Ils évoquent les moments où vous vous sentiez victorieux, lorsque vous preniez des risques, ou même une expérience négative qui alimente votre volonté de vous battre pour les autres. Comme le mentionne l’article 5 life lessons inside out teaches about emotions, ces souvenirs vous renseignent sur vos véritables préférences, sur ce que vous appréciez réellement, ou sur ce dont vous devez vous éloigner pour préserver votre bien-être mental et émotionnel. À un moment du film, on voit que Tristesse, en tenant une mémoire sous la forme d’une boule de cristal, change la couleur jaune de la joie en bleu représentant la tristesse. On comprend ainsi que nos souvenirs peuvent, avec le temps, prendre une teinte triste en fonction de notre vécu actuel. Dans une autre scène, lorsque Joie comprend l’importance de la présence de Tristesse, une mémoire peut avoir deux couleurs, jaune et bleu. Cela m’a aidée à comprendre, en tant qu’étudiante vivant à l’étranger loin de ma famille, pourquoi il m’arrive parfois de pleurer ou de ressentir de la tristesse, me rappelant ainsi des moments joyeux avec ma famille et mon chien.

À un moment donné du film, les souvenirs échappent au contenant qui les retient, provoquant le passage au gris et l’extinction des parties de son esprit alimentées par ces souvenirs. Ce manque de couleur contraste avec les séquences précédentes du film. Lorsque ces différentes composantes de la tête de Riley perdent leurs couleurs, elles se désactivent. Ce thème monochrome se manifeste également à d’autres moments du film. Parmi les éléments concernés, on retrouve les souvenirs stockés dans la mémoire à long terme. À mesure que Riley vieillit, certains souvenirs virent au gris et sont écartés car leur éclat s’est estompé. Cette absence de couleur reflète de la même manière le moment où Riley dépasse ces souvenirs. Ils perdent leur importance à ses yeux, et elle les oublie.

Les parents de Riley s’attendent à ce qu’elle soit toujours heureuse, sans tenir compte de ses véritables émotions. En comparaison avec notre vie, les gens ont souvent des attentes envers les autres en fonction de leurs propres expériences et privilèges. Cela souligne l’unicité des individus et la complexité de leurs émotions, incitant les autres à accorder aux personnes l’espace nécessaire pour ressentir et exprimer leurs émotions authentiques, même si cela diffère des attentes.
Pendant l’aventure de Joie et Tristesse dans la tête de Riley dans Inside Out, Bing Bong, l’ami imaginaire de Riley, connaît une crise en réalisant qu’il perd sa place dans la vie de Riley. Alors que Joie tente de détourner son attention, c’est Tristesse qui prend le temps d’écouter ses émotions. Elle lui offre un espace pour embrasser honnêtement ses sentiments et le soutient pendant quelques instants. Ces moments aident Bing Bong à accepter la vérité et à continuer d’avancer, contribuant ainsi à ramener Joie et Tristesse au centre de contrôle. Soulignant l’importance d’écouter activement les autres pour offrir un soutien émotionnel, une compétence cruciale dans les relations amicales ou partenariales.

Inside Out contribue de manière significative à atténuer la stigmatisation de la santé mentale en normalisant l’expression des émotions, en encourageant l’empathie et en démystifiant les préjugés liés à la tristesse. Le film offre une perspective visuelle puissante qui éduque et sensibilise, soulignant l’importance de reconnaître et d’accepter nos émotions pour favoriser une société plus compréhensive et bienveillante envers la santé mentale. En regardant ce film, le spectateur se sent connecté avec la tristesse, qui avait été initialement rejetée par les autres, surtout par la Joie. Ce qui est intéressant, car en comparaison avec la réalité, le public développe de l’empathie envers un personnage qui représente un sentiment. Ainsi, l’empathie que nous ressentons est dirigée vers un état émotionnel, ce qui nous aide à mieux comprendre la tristesse.
En conclusion, l’analyse approfondie du rôle de l’animation, à travers le film Inside Out de Disney Pixar, démontre son pouvoir unique d’éduquer, de sensibiliser et de combattre la stigmatisation associée à la santé mentale. En explorant visuellement les mécanismes internes de l’esprit et en donnant vie aux émotions, le film offre une représentation riche et imaginative des expériences humaines, favorisant ainsi une compréhension plus profonde des émotions et des comportements. L’utilisation judicieuse de la couleur, des personnages et des métaphores visuelles renforce l’impact émotionnel du film, tout en soulignant l’importance de reconnaître et d’accepter la diversité des émotions. En encourageant l’empathie envers les personnages animés, Inside Out illustre le potentiel de l’animation à transcender les préjugés et à promouvoir une vision plus compréhensive de la santé mentale. Ainsi, l’animation se positionne comme un outil puissant pour stimuler l’empathie du public et contribuer à la réduction de la stigmatisation liée aux troubles mentaux.
Conclusion
En effet, l’animation est capable d’offrir des détails plus fins que l’image statique, facilitant ainsi la compréhension d’informations complexes. Cependant, il est essentiel de noter que l’efficacité de l’animation dépend de la manière dont elle est traitée. Le simple fait de mettre une information en mouvement ne garantit pas toujours une compréhension accrue. Par exemple, une bande dessinée et une animation peuvent être complémentaires plutôt que concurrentes, chacune apportant une expérience unique au spectateur ou au lecteur. Alors l’animation n’est pas toujours plus efficace qu’une image fixe.
Par ailleurs, les médias ont contribué à développer des préjugés contre les personnes souffrant de troubles mentaux. L’animation peut également donner des informations erronées. Néanmoins, elle a le potentiel de développer de manière créative les informations concernant le cerveau grâce à la liberté d’expression visuelle qu’elle offre. Elle permet de représenter des mondes imaginaires, des émotions abstraites et des concepts complexes de manière visuellement captivante et symbolique. En raison de sa nature réalisable et graphiquement intéressante, l’animation peut viser un public plus large que d’autres médias. Elle peut s’adresser à des enfants et des adultes simultanément en simplifiant des concepts complexes, les rendant ainsi plus accessibles et intéressants pour un public de tous âges. De plus, les films d’animation ont le pouvoir de créer une connexion émotionnelle en évoquant la nostalgie que nous ressentons tous en ayant regardé des dessins animés dans notre enfance.
Dans cette exploration approfondie, deux points importants ont été traités. Premièrement, la persistance de la stigmatisation autour de la santé mentale, nourrie par des stéréotypes médiatiques et des préjugés, représente un réel obstacle pour ceux qui font face à des troubles psychologiques. Cette stigmatisation a des conséquences qui vont au-delà des individus concernés, affectant toute la société. Deuxièmement, comment l’animation peut aider à sensibiliser le public. L’analyse attentive de films tels que Self in Progress et Inside Out met en évidence la puissance de l’animation en tant qu’outil de sensibilisation et d’éducation. Ce moyen artistique aide à comprendre les aspects complexes liés à la santé mentale et suscite de l’empathie.
Dans ce contexte, l’éducation dans l’animation émerge comme une arme puissante contre la stigmatisation, favorisant une compréhension nuancée des troubles mentaux et encourageant un dialogue ouvert. Les créateurs d’animation ont la responsabilité de représenter avec précision la réalité des personnes vivant avec des problèmes de santé mentale, soulignant ainsi l’importance de créer un contenu accueillant et réfléchi.
L’animation est un moyen puissant pour sensibiliser les gens à la santé mentale en montrant le fonctionnement du mécanisme internes de l’esprit et à évoquer des émotions. Cependant, il est important de trouver un équilibre entre fournir des informations riches et les rendre compréhensibles pour tout le monde. Il faut donc adopter une approche équilibrée lors de la création de vidéos animées sur la santé mentale.
Glossaire
- Animation
- Le cinéma d’animation, nommé aussi le cinéma image par image est en fait une illusion, tout comme le cinéma. Il s’agit d’images fixes à qui on donne la vie. Pour cela, il existe toutes sortes de techniques, mais le principe reste même : on présente rapidement une suite d’images à l’œil humain afin de donner l’illusion d’un mouvement continu.
- Communication visuelle
- La communication visuelle « désigne l’ensemble des techniques d’information par l’image, l’illustration, le graphisme destinées au public ». Plus concrètement, elle permet de communiquer non pas par des mots, mais par des images, qui transmettent souvent bien plus qu’un simple renseignement.
: Média Moyen, technique et support de diffusion massive de l’information (presse, radio, télévision, cinéma…)
- Actions spatio-temporelles
- Ils relient les actions entre elles en exprimant un rapport de temps. Ce sont eux qui indiquent si une action s’est déroulée avant une autre, après une autre ou en même temps.
- Graphique statique
- Le terme « graphique » est quelquefois utilisé à la place du terme « image ». L’expression « graphique statique » fait référence à une représentation visuelle d’informations qui demeure immobile, sans animation ni mouvement.
- Stigmatisation
- La stigmatisation est l’action de stigmatiser. C’est une action ou une parole qui transforme une caractéristique, un comportement, une déficience, une incapacité ou un handicap d’une personne en une marque négative ou d’infériorité. Elle est, en général, la conséquence d’une désinformation et de l’existence de stéréotypes sur un sujet donné.
- Maladie mentale
- Une maladie mentale est un ensemble de dérèglements au niveau des pensées, des émotions et/ou du comportement qui reflètent un trouble biologique, psychologique ou développemental des fonctions mentales. Une maladie mentale entraîne nécessairement une détresse pour l’individu et/ou une difficulté au travail ou dans les relations sociales.
- Auto stigmatisation
- L’autostigmatisation, dans le contexte des problèmes de santé mentale, se produit lorsque la personne concernée commence à intérioriser et à croire aux opinions négatives et aux stéréotypes associés à sa condition. En d’autres termes, elle commence à adopter ces croyances négatives à son sujet.
- Stigmatisation institutionnell
- La stigmatisation institutionnelle peut se manifester par des politiques discriminatoires dans les domaines de l’emploi, du logement, des soins de santé, de l’éducation, et d’autres aspects de la vie sociale.
- Stigmatisation publique
- La stigmatisation publique dans le contexte de la santé mentale se réfère aux attitudes négatives, aux préjugés et à la discrimination que peuvent subir les personnes en raison de leur état de santé mentale. Cela implique le jugement social, les stéréotypes défavorables et le traitement différencié envers ceux qui ont des troubles mentaux. Les individus peuvent être stigmatisés en raison de leur diagnostic, de leurs symptômes ou de tout autre aspect lié à leur santé mentale.
- Harcèlement
- Le harcèlement se définit comme une violence répétée qui peut être verbale, physique et/ou psychologique.
Références
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Vidéographies
LEHMAN Kayla. Self in Progress. 2023.
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Remerciements
Remerciements à Corinne Melin et Julien Bidoret pour leur accompagnement tout au long de l’élaboration de ce mémoire.
Sophie Arfeuillère est la Chargée d’Innovation Pédagogique chez Psycom. ↩︎
Erving Goffman (1192 – 1982), était un sociologue, psychologue social et écrivain canado-américain. Certains le considèrent comme « le sociologue américain ayant le plus marqué le XXe siècle ». ↩︎
Joker est un film thriller psychologique réalisé par Todd Phillips et produit par Warner Bros. Pictures. Le film constitue une histoire originale indépendante du personnage emblématique de DC Comics, le Joker, joué par Joaquin Phoenix. Il offre une étude de personnage sombre et intense d’Arthur Fleck, un comédien de stand-up qui n’a pas réussi, luttant contre des problèmes de santé mentale et le rejet de la société, et qui devient le célèbre méchant de Batman, le Joker. ↩︎
Mireille Betrancourt, affiliée à TECFA à l’Université de Genève en Suisse. Julie Bauer-Morrison et Barbara Tversky, rattachées au Département de Psychologie de l’Université Stanford aux États-Unis. Les trois ont collaboré à la rédaction d’un article intitulé« Les animations sont-elles vraiment plus efficaces ? » ↩︎
René François Ghislain Magritte (Belge, 1898 – 1967) était un artiste surréaliste belge célèbre pour ses représentations d’objets familiers dans des contextes inconnus et inattendus. Son imagerie a influencé l’art pop, l’art minimaliste et l’art conceptuel. ↩︎
Marjane Satrapi est franco-iranienne. Elle est auteure de romans graphiques, dessinatrice, illustratrice, réalisatrice de films et auteure de livres pour enfants. ↩︎
Vincent Paronnaud, est un artiste de bande dessinée et cinéaste français. ↩︎
Peter Hans Docter est un réalisateur, producteur, scénariste et animateur américain. Il occupe le poste de directeur de la création chez Pixar Animation Studios depuis 2018. ↩︎