Introduction

À travers mes recherches, je souhaite vous transporter dans un endroit loin des bruits et des actes graphiques excessifs. Il suffit de se balader dans le centre-ville de Pau, d’être attentif pour se rendre contre que notre œil est en permanence sollicité. Dans les terres du Béarn, perchés en hauteur, se trouvent des villages. Des lieux, si calmes que moi ayant vécu sur Bordeaux et Pau me demande : «  Y a-t-il vraiment des gens qui vivent ici ?  ». Tout part de cette hypothèse : s’il y a des populations en montagne alors, sont-ils eux aussi «  bombardés de signes visuels  » ? Pour vérifier cette hypothèse, j’ai pris pour objet d’étude le village de Lescun dans la vallée d’Aspe. J’y ai mené une enquête photographique et plans afin de me rendre compte du nombre des signes et de leurs fonctions.

Ce premier travail sera présenté ici de façon descriptive. Il s’agit de mettre de l’ordre dans la profusion des signes, de les organiser en catégories et de présenter leur dimension de lisibilité et de visibilité.

Ce document est donc un premier jet d’une analyse future plus dense.

Définitions

Définition de montagne

La montagne 1 n’a pas toujours été aussi fréquenté qu’aujourd’hui, c’était un milieu uniquement fréquenté par les militaires, les alpinistes, les explorateurs, les guides locaux, les populations montagnardes, les villégiateurs aisés. C’était un univers relativement fermé au grand public. Selon moi, il y a cinq points qui ont marqué la démocratisation de ces territoires :

  1. Juridiquement le droit aux congés payés pour les classes ouvrières, les semaines de congés ajoutés durant les trente glorieuses ont permis aux familles populaires de partir loin de chez eux. Les vacances à la mer deviennent les destinations privilégiées, et la montagne n’y échappe pas.
  2. Le développement des sports «  outdoor  » et l’arrivée de marques emblématiques (comme The North Face, Patagonia et Columbia) ont encouragé le grand public à expérimenter ce nouveau terrain de jeu.
  3. La venue d’Internet et des réseaux sociaux font exploser les contenus en lien à la montagne que ce soit des guides/des conseils et des forums amateurs/spécialisés.
  4. Les restrictions du confinement de 2020 n’a fait qu’amplifier l’envie de la population de s’émanciper de chez-soi et quoi de mieux que des paysages magnifiques à perte de vue.
  5. Et le sujet n’a jamais été aussi concret qu’à l’époque actuelle. En effet, on constate un questionnement de l’impact de l’homme. Cette prise de conscience a rapproché certains individus des milieux naturels.

Définition d’un acte graphique

Cette évolution de la présence des humains dans les montagnes pose des questions sur un système de retranscription de l’information commune afin de faciliter la compréhension par tous. Ce système se manifeste par des actes graphiques dans son sens le plus général, c’est-à-dire des éléments visuels/signes implantés par l’homme pour l’homme. Selon moi, les actes graphiques entretiennent un lien étroit avec la signalétique comme on l’entend aujourd’hui. Ces actes même très présents dans l’espace public restent malgré tout, des signes qui relèvent du micro système d’une société. Cependant, ce sont des indicateurs intéressants et importants qui permettent d’en dire beaucoup sur le fonctionnement de celle-ci (comprendre nos interactions, nos déplacements, notre consommation). Plus un espace se fait public plus les actes graphiques se font présents. Les signes sont partout, autour de nous. Ils sont polymorphes, on peut les toucher, les sentir, leur marcher dessus, les prendre en photo, etc. La signalétique nous paraît tellement naturelle qu’on la néglige. L’attention qu’on lui porte n’est pas égale à son utilité. Sans elle, nous sommes désorientés, perdus, désemparés. On erre sans savoir où aller. Mais peut-être que c’est son objectif nous donner une vague direction, pour nous permettre d’arpenter un espace sans a priori, afin de se laisser charmer par ce qu’il a à nous offrir. Quand on dit que tout est question de point vue, cela n’a jamais été aussi concret que dans un espace en trois dimensions. La signalétique prend tout son sens quand nous décidons en tant qu’être de lui donner de l’importance. Elle peut être présente partout et nulle part à la fois, elle se laisse dévoiler au fur et à mesure qu’on la cherche. Elle n’attend que ça finalement. C’est une notion que les gens peuvent s’approprier en générant de nouveaux signes par-dessus. La signalétique est comme une amie ou une mère qui nous éduque et nous guide sur la voie à prendre, les dangers que l’on encourt, ou les bons comportements sociaux à adopter.

Extrait du numéro trente de Graphisme en France 30e anniversaire, 2024 Consulter en ligne« La moindre de nos actions quotidiennes implique de coopérer avec des textes et des images. Chacune de nos pratiques, gestes et interactions implique une incroyable variété d’objets graphiques. Or à vrai dire, ces objets semblent si bien prolonger notre regard (vers l’objet vanté par la publicité, vers l’institution représentée par le logotype, vers la ville figurée par ce plan…), ils semblent si bien remplir leur rôle, que nous les remarquons à peine dans le flux continu de notre expérience du monde. Pour faire ce premier constat, il suffit d’adopter un instant le point de vue de Diane. Qu’a-t-elle vu ? Certainement pas du design graphique. Si nous l’interrogions à présent, Diane nous dirait probablement qu’elle a cherché son chemin, qu’elle a consulté des cartes, qu’elle s’est déplacées en métro, qu’elle a observé la ville, recueillie des informations pour comprendre où elle se trouvait… Il y a, entre ce récit et le mien, toute la différence entre l’expérience immédiate que nous faisons spontanément de notre environnement visuel, et la complexité des médiations dont cette expérience est cependant le produit. Si bien que ce texte doit commencer par un paradoxal exercice de mise au point, un exercice qui consiste à regarder ce que nous avons toujours tendance à ne pas voir, à observer ces objets » graphiques « qui, se soustrayant à notre regard au moment où nous les pratiquons, semblent bien disparaître en se socialisant. »


Hypothèse

Après avoir posé ces définitions, je me suis renseigné sur les types d’actes, que je pourrais retrouver en montagne. Ils sont nombreux, pour en faciliter la compréhension, j’ai décidé de les organiser dans de grandes catégories.2

1.Prévention

En montagne, les massifs, les végétaux et les animaux qui s’y trouvent sont impactés par les aléas météorologiques (prise au vent, température, neige, etc.). Mais il y a aussi un facteur qui a un réel impact sur ce territoire, c’est l’activité humaine. Afin de préserver ce territoire et d’assurer notre sécurité, l’être humain a instauré différents panneaux. Ces dispositifs avertissent les individus des dangers potentiels tout en contribuant à la protection de ces zones escarpées.

a. Le gibier étant très présent, des battues sont organisées régulièrement. Afin d’annoncer ses zones de chasses, les collectifs vont apposer des panneaux en bord de route.

b. La montagne regorge de ressources dont l’humain ne peut plus se passer (bois, charbon, électricité). Aux alentours de ses structures privées et publiques, nous pouvons retrouver une signalétique liée aux risques encourue autour de type de zones (éboulement, montée des eaux, etc.).

c. C’est aussi un espace très prisé par le corps militaire qui recherche un terrain avec du relief, éloigné de la civilisation. La montagne devient un espace d’entraînement.

d. Afin de protéger la flore et la faune, l’humain a défini des Parcs Nationaux, ce territoire est balisé Symbole des Parc Nationaux des Pyrénées..

e. Des actes graphiques à plus grandes échelles, visent à redonner de la vitalité aux paysages. Guillaume Bonnel en a relevé dans son ouvrage « les orthèses ». (je le cite car il fait échos à son intervention à l’école)

2.Indications

Les actes fait par la population ont un impact immédiat sur l’environnement tout comme la montagne sur la population.

a. Cet amas rocheux a toujours fasciné les artistes depuis le Romantisme, mouvement qui au XVIIIe siècle a transformé le paysage montagneux en symbole d’évasion et d’émotionLe Voyageur contemplant une mer de nuages Caspar David Friedrich 1818.. Par la suite, cette fascination s’est articulé autour des œuvres monumentales avec le Land art. Mouvement qui est né dans les années 1960, qui utilisent la nature comme médium en soit, le Land art cherche à harmoniser l’art et l’environnement naturel. Dans nos sociétés plus contemporaines, on peut retrouver le collectif ROVO exposition Contrairement au gibier Collectif ROVO 2017 Consulter en ligne. qui explore les liens entre les paysages montagnards et leurs signes graphiques spontanés ou vernaculaire. Grégoire Romanet va être une référence pour les expérimentations qui vont suivre au second semestre. Son édition «  Hobby  » Hobby Grégoire Romanet 2022 Consulter en ligne.. fait liens avec le fait de faire signe grâce aux matériaux qu’on a sous la main.

b. Les touristes ont aussi le désir de marquer/inscrire de manière permanente ou éphémère leur passage sûr tel sommet/sentier. Cela peut se traduire par une gravure, un sticker, un cairn. Voici un cairn.

c. Parfois, les actes graphiques viennent entraver la lisibilité des signes plus importants inscrits par les boutiques, les gîtes, les restaurants, etc. Ces signes graphiques, déployés par ces commerces, sont indispensables pour guider et attirer les touristes.

d. La vie sur ses territoires pose des questions aux montagnard•es qui doivent faire face à l’isolement, l’absence de service public, le sur-tourisme. Ils expriment leurs mécontentements face aux décisions politiques éloignées de leurs réalités. Par exemple la réintroduction des prédateurs, le manque de soutien économique et des règlements environnementaux jugées (à juste titre) excessifs, qui s’est traduit par un retournement des panneaux à l’entrée des villages.

3.Influences

Pour les gens qui s’aventurent dans ces zones vastes, il est primordial d’avoir une signalétique limpide. Elle permet aux individus qui ne sont pas forcément familiarisés avec la montagne de pouvoir se repérer et circuler facilement.

a. En 1970 la signalétique de randonnée a subi une uniformisation des signes Charte technique et graphiquedes GR (Grandes randonnées) Consulter en ligne qui était, à ce jour, propres à chaque région, on peut imaginer la présence d’un même signe qui viendrait définir les chemins/sentiers.

b. Outre la randonnée, les villages rencontrent les mêmes prérogatives que les villes en termes de balisage des rues, des routes, etc.

4.Historique

Les actes historiques viennent eux aussi baliser le territoire, mais sous une autre forme plus spirituelle :

a. À une certaine époque le balisage d’un territoire se faisait généralement par la présence d’acte religieux. Ces territoires en hauteur ont servi de refuge et de lieu de culte aux ermites. De par sa position en hauteur et son éloignement de la civilisation, cela devient un environnement propice à la spiritualité. De plus, la croix au sommet des pics permettait d’identifier une terre sainte, le point culminant de la montagne et elle servait de paratonnerre pour protéger les villages en contrebas.

b. Les actes commémoratifs que l’on peut classer en deux catégories ; ceux des morts accidentelles et historiques. La montagne, tout en étant un lieu de loisirs et d’aventures, présente des dangers significatifs qui peuvent parfois mener à des accidents tragiques. Ces incidents soulèvent des préoccupations concernant la sécurité des pratiquants, souvent mal informés sur les risques spécifiques de la montagne et affectés par la fatigue qui réduit leur vigilance. Malgré les avancées technologiques et l’amélioration des infrastructures, le risque demeure, et l’histoire témoigne d’un nombre élevé d’accidents mortels 3. Pour honorer la mémoire des victimes, leurs proches mettent en place des plaques commémoratives, dont l’évolution reflète des changements dans les pratiques et les mentalités.

Organisation

Choix du lieu

Pour répondre à cette hypothèse, je veux analyser les actes graphiques présents dans les Pyrénées. Ce territoire est intéressant, car il abrite un grand nombre de villages et de départs de randonnée. Cependant, je ne disposais pas d’assez de temps…

J’ai donc choisi de prendre comme marqueur de référence la vallée d’Aspe et plus précisément le village de Lescun. Étant proche du plateau de Sanchèse, réputé pour ses nombreux départs de randonnées et sa position centrale dans la vallée d’Aspes.Position géographique. Consulter en ligne Je suppose que les signes graphiques y sont très présents. De plus, le village de Lescun donne une impression d’être au cœur des montagnes donc on peut y retrouver tous les types de population (des vacanciers détentes, des amateurs comme des férus de randonnée) et des bâtiments divers. (Gîtes, refuges, bar, épicerie, restaurant, etc.) Cette diversité tant dans les bâtiments que dans la population amène des besoins différents et donc des réponses graphiques singulières. La population vient dessiner et modifier le paysage, se sont selon Bernard Lassus de réel « habitant paysagiste » Terme évoqué dans l’ouvrage Le Jardin Monde de Bernard Lassus aux éditions du Centre Pompidou, publié en 2017. Je vais donc m’appuyer sur mon enquête à Lescun pour faire une lecture des signes qui marquent son territoire.

Méthodologie

Jour de la sortie 10/11/2024 L’ambition était de faire une déambulation dans le village, puis d’enchaîner avec une randonnée qui m’amènerait sur le plateau de Sanchèse. Et comme rien ne se passe comme prévu, je n’ai pas eu le temps de faire la randonnée…

Départ → de Pau → à 8h30 Arrivée → à Lescun → à 10h
Départ → de Lescun → à 17h Arrivée → à Pau → à 18h30

En effet, contre toute attente, le village comprenait un très grand nombre de signes et son relevé (partiel) a pris tout le temps de cette journée. Afin de faire une analyse précise, j’ai défini un protocole de déambulation. J’ai décidé de procédé dans l’ordre suivant :

  1. Secteur Sud-Est
  2. Secteur Nord-EST
  3. Secteur Nord-Ouest
  4. Secteur Sud-Ouest
Hypothèse de déambulation

Cette méthode m’a permis de visiter le village dans son ensemble et dans ses moindres recoins. Sur le terrain, je me suis laissé surprendre à ne plus faire attention au plan, mais juste à déambuler plus librement. Avec du recul, la méthode que j’avais prévue avant de partir s’est avéré sur le terrain trop rigide. Ainsi, j’ai mixé ce qui avait été organisé et des prises de liberté. J’ai ainsi pu avoir une vision des signes plus proche de la réalité. Mon relevé se situe donc entre cartographie et collecte de signe. Ce relevé n’est pas exhaustif, cependant, il permet de rendre compte des signes dominants.

Sur le plan de ma déambulation, certains passages n’ont pas été arpentés, car soient ils sont bloqués au public, soit j’ai considéré trop éloigné du centre-ville.

Déambulation concrète, sur le plan de ma déambulation, certains passages n’ont pas été arpentés, car ils sont bloqués au public où j’ai considéré trop éloigné du centre-ville.
Marces Théo
Première récolte

Première récolte

Ces signes sont triés, dans l’ordre chronologique des prises. Cela vous permet de mesurer l’ampleur et la diversité des signes que j’ai pu relever durant la journée. Cette première exposition des signes vous permet d’avoir un regard libre, sur la manière dont la population et notre société communique. Ces échanges visuels ont une influence sur la proxémie 4 que ce soit à l’échelle d’individu, d’un village, ou d’une civilisation. Des anthropologues se sont penchés sur ces questions de distance sociale et de marquage du territoire. Ces actes graphiques nous montrent le fonctionnement d’un microcosme social dans l’espace.

Voir la récolte (ouvrir dans un nouvel onglet)

Classification

Voilà pourquoi je n’ai pas eu le temps de faire la randonnée. Je ne m’y attendais pas et je pense que vous non plus. :) Après une vue d’ensemble, je vais procéder à une nouvelle classification. Elle porte cette fois-ci sur le contenu des actes graphiques. Je suis conscient que cette classification n’est pas complète, car certains des signes analysés peuvent être dans plusieurs catégories à la fois. Cependant, elle me permet de faire un pré-tri, j’ai établi une classification qui se base sur celle vue en amont avec une segmentation un peu plus fine.

Indications (120)
	Entrées de maison (52)
		Moulures (14)
		Panneaux (14)
		Autres (12)
		Peinture (12)
	Espaces (41)
		Informatifs (23)
		Routes (11)
		Quartiers (7)
	Randonnées (26)
		Symboles (22)
		Panneaux (4)

Vie et avis (89)
	Établissements (78)
		Commerces (31)
		Gîtes (28)
		Artisans (19)
	Revendication (11)

Historiques (8)
	Religieux (5)
	Commémoratifs (3)

Préventions (4)
	Dangers (3)
	Préservations (1)


Indication/

Cette catégorie est la plus présente, pas étonnant, elle permet aux individus extérieur de se répérer dans l’espace.

Indication/Entrées de maison

Cette forte présence des signes d’entrées de maison, montre la volonté de la population de vouloir se détacher de ses voisins par la présence d’actes à petite et moyenne échelle.

Indication/Entrées de maison/Moulures

Un acte graphique assez récurrent (que je n’ai pas relevé systématiquement) dans l’ensemble du village sont les moulures en haut des portes. Elles indiquent les numéros de maison et parfois, elles contiennent des illustrations (plus ou moins détaillées). Les informations sont plus ou moins visibles selon l’angle de vue. Ces sortes de sot peuvent amener une certaine singularité pour chaque maison.

Indication/Entrées de maison/Panneaux

Certaines façades sont plus singulières en voici trois exemples que je trouve intéressant. Sur les façades des maisons ou sur les portails, on peut retrouver des panneaux uniques (artisanaux). « Et soulé » un panneau en bois avec une forme très organique, il y a un gros travail de lettrage. « Coq basque » il est en bois, mais il joue avec la texture, la profondeur. Le travail est assez fin dans le coq et dans le motif autour de la croix basque. C’est aussi une manière de mettre en avant ses origines et son passé. ( « Deux croix basques sont visibles dans le village » parole de citoyenne.) J’ai aussi relevé un signe découpé dans le métal accroché en suspension sur un avant toit, c’est le seul que j’ai relevé comme ça. Dans la forme, le matériau et la méthode d’accrochage.

Indication/Entrées de maison/Autres

Le sticker anti publicité indique que Lescun n’est pas si exilé, ce sticker en dit beaucoup sur l’envoi de publicité par voie postale. (cet acte peut aussi être classé dans revendications) Les stickers reprennent dse formes issues du code de la route avec des caractères sans-empattements. Ces choix graphiques permettent une identification rapide du message. Ils jouent avec les codes de notre société.

Indication/Entrées de maison/Peintures

Ces oiseaux sont signés par un artiste local, il vient créer une unité globale entre les différentes entrées de maison.

Indication/Espaces

Cette catégorie se concentre sur le centre du village et plus particulièrement aux alentours de la mairie.

Indication/Espaces/Informatifs

Un grand panneau accroché sur une structure en bois. L’objectif de ce panneau est de donner des informations concernant la commune de Lescun. Il se détache évidemment par sa taille, concernant sa mise en forme, on peut lui reconnaître une bonne compartimentation des informations (chaque image est associée à un texte.). Sur le poteau gauche, on peut apercevoir une feuille A4 accrochée via une agrafe, malgré des précautions concernant sa détérioration via la météorologie (plastification et mise à l’abri), l’image a été altérée par le soleil. Dans les rues adjacentes à la place principale de Lescun, j’ai relevé trois blocs qui se fondent dans le paysage, ce qui ne nuit pas visuellement à l’esthétique de l’architecture. J’ai trouvé cette méthode de production intéressante, car j’avais l’impression de voir des tampons de linogravure, mais sur du bois qui par ailleurs était assez usé.

Indication/Espaces/Routes

«  chemin d’anitch  », un panneau qui a pour essence d’être indicatif, est quasiment neuf, aucune trace d’usure. Il est utilisé une police que je caractérise de Mannuaire, le blason présent perturbe la lecture, pourtant, il permet de créer une séparation entre la traduction française et béarnaise. Le fait d’utiliser le blanc sur fond foncé favorise sa lisibilité cependant le rouge ne contraste pas assez avec le fond végétal. L’interdiction est souvent représenté par le rouge vif et des formes assez anguleuses comme le triangle et le rectangle. Les propriétaires ont opté pour une font condensée et un choix de couleur et de forme plus douce. Je lis « Marieu » vu son positionnement proche d’un portail à hauteur de hanche, j’ai cru au nom du propriétaire. Toutefois, en continuant ma route, je suis tombé sur un panneau identique, cette fois non détérioré qui renseigne le nom de la rue ainsi que le numéro. Je me suis rendu compte de l’impact que peut avoir le positionnement d’un panneau. Cela détermine sa lecture et la compréhension implicite que peut se faire le lecteur.

Indication/Espaces/Quartiers

Ces ardoises permettent d’identifier dans quel quartier nous sommes, il représente un paysage montagnard avec la mise en avant d’une fleur. Ils sont aussi signés par le même artiste local. Cela renforce l’unité qu’on retrouve dans le village.

Indication/Espaces/Randonée

Visuellement, en vue satellite, la répartition des actes en lien avec la randonnée vient dessiner le chemin à suivre.

Indication/Espaces/Randonée/Symboles

En me baladant dans les rues de Lescun, je me doutais tomber sur ce symbole iconique connu des randonneurs. Ces deux bandes paraissent être de simples rectangles cependant, ils jouent un rôle très important pour guider les marcheurs sur le GR 10. Il est présent sur différents supports (pierre, gouttière, poteau) marqués à la peinture ou en sticker. Dans un périmètre de 10 mètres, j’en ai recensé trois. Il y en a partout ! Ces symboles restent tout de même visibles malgré le positionnement discret.

Indication/Espaces/Randonée/Panneaux

Les symboles sont accompagnés par deux types de panneaux faits par des locaux avec du bois taillé en flèches, et d’autres très normés. Ils viennent donner des informations complémentaires concernant la durée et la distance. On retrouve toujours l’utilisation des couleurs de la charte graphique des GR.

Vie et avis

Les actes d’influences se situent à l’Ouest du village. Dans ce secteur on y retrouve le plus de commerces.

Vie et avis/Établissement

Sans surprise, les signes commerciaux se trouvent au centre du village.

Vie et avis/Établissement/Commerces

Un grand panneau ne passe pas inaperçu. Ce panneau publicitaire promeut trois enseignes différentes. Le deuxième se détache par un choix de couleurs différents du paysage, mais elle n’est pas assez intense pour être directement vue. Il fait aussi le choix d’une linéale. Attention la branche peut cacher certaines informations. Sur ce robinet, je distingue deux blasons qui sont moulés dans la structure en métal. Cette méthode de production peut amener une certaine durabilité, de plus le blason garde des détails tout en restant lisible grâce à un choix de police sobre.

Vie et avis/Établissement/Gîtes

Les gîtes sont éparpillés dans le village, ils se reconnaissent par l’utilisation de deux panneaux type le «  gîte rural  » et le «  gîte du Béarn  ». Le graphisme de ces panneaux est très normé, cela se reconnaît par l’utilisation d’illustration presque logo graphique et d’une linéale. Ces choix graphiques leur donnent une très bonne visibilité et lisibilité. Le simple fait qu’il ne soit pas artisanal les détache rapidement de ce qu’ils les entourent, cela peut potentiellement gâcher le paysage. D’autres gîtes optent pour une identité plus forte par la présence de support de communication artisanal. Celle du gîte d’Annie utilise le coté tranchant des ardoises pour représenter les chaînes de montagne l’utilisation du bleu amène un côté apaisant que j’ai pu constater dans le village. La fonte utilisée est sûrement réalisée à la main, elle est à la fois douce par ces courbes et dynamique par l’inclinaison de certains traits. Une location de vacances utilise un panneau fait à la main avec du vert pour rappeler ce côté montagne. Un gîte fait le choix de plusieurs petits supports fait à la main et qui utilise des couleurs primaires. Tous ces choix amènent un côté plus chaleureux et donc plus attirant pour les visiteurs.

Vie et avis/Établissement/Artisants

Un grand panneau ne passe pas inaperçu. Ce panneau publicitaire promeut trois enseignes différentes. Celle que l’on voit en premier, c’est « trait des anesses » le bandeau vert accroche l’œil de manière quasi-immédiat. De plus l’utilisation d’une font linéale en gros corps et capital permet une lisibilité même quand on est en voiture. Celui du milieu malgré l’utilisation d’une font linéale n’est pas lisible. Le choix de la couleur ne fait qu’effacer les informations avec la présence du soleil. En ce qui concerne l’illustration, elle est graphiquement intéressante, elle vient contraster avec le choix du caractère. Mais il y trop de blanc qui rentre dans l’illustration et n’a pas de poids visuel. Le choix d’une ombre portée ramène à une mode parure dans les années 2014. Les services sont exprimés sous forme de listing (manière intéressante de mettre en avant ses compétences). Le choix du gris clair et les craquelures entravent la lecture de la seule information indispensable : le numéro de téléphone. Une enseigne d’artisan de produit laitier a fait le choix de représenter les animaux qui permettent la fabrication de leur produit, soit par la peinture sur ardoise ou via des superpositions sur du bois. Le choix est très malin et pertinent, cela renforce le côté rustique, tradition qui sont les valeurs de ses artisans. Il n’a pas forcément été pensé dans cette optique-là, mais un touriste qui adore le fromage et qui voit ça, se dit qu’il va manger du bon fromage de campagne. Cependant, l’un des panneaux utilise une police qui s’est faite étirée qui ne garantit pas sa lisibilité. Un autre vendeur propose un visuel plus « moderne » par l’utilisation d’illustrations vectorielles. De plus, la composition est intéressante, car elle vient jouer avec la profondeur de l’image. En arrière-plan, on peut voir le produit photographié dans l’environnement des animaux qui le produisent. Ce mélange de médium génère une image contrastée. La présence du marron et du bleu se fait présent, ce sont deux couleurs douces qui s’associent bien. Il y a une enseigne de poterie qui utilise plein de supports de communication différents ne permettant pas une cohérence dans son identité visuelle : présence de police pochoir, sans empattement et manuaire, la seule récurrence que l’on peut trouver est l’utilisation du bleu.

Vie et avis/Revendication

À l’entrée du territoire, il y a déjà quatre actes politiques. Sur le panneau de Lescun retourné, on peut entrevoir un sticker abîmé, il y est inscrit «  Antifaxista  », 50 mètres plus loin sur un bâtiment certainement abandonné est inscrit différents messages à la bombe, ceux qui me frappent directement à l’œil sont ceux en noir. L’inscription «  eau potable  » accompagnée de trois gouttes, n’avai pas forcément vocation à être vu. Quant on s’y penche, on comprend rapidement.

Historique

Concernant les actes historiques, je trouve qu’il y a une réelle volonté de proposer des objets avec des matériaux résistants.

Historique/Religieux

Quand j’arrive devant la porte de l’église, je retrouve deux panneaux de bois dans lesquels sont accrochés des feuilles A4. Il y a une volonté de différencier ses deux panneaux de part la taille et par l’utilisation d’une planche en plexiglass. L’ajout d’un matériau indique que le contenu qui sera dedans ne sera pas modifié pendant un moment. Alors que l’autre servira à transmettre des informations de manière ponctuelle. Au-dessus du cadre des informations ponctuelles un A4 vient accrocher mon œil, le fait qu’il ne soit pas « au bon endroit » perturbe et interroge.

Historique/Commémoratifs

On ne retrouve pas de symboles ou de choix typographique commun.

Préventions

Les actes préventifs sont très peu présents à ma grande surprise. Ils n’ont pas de secteur, on peut les retrouver aux quatre coins du village.

Préventions/Dangers

«  Battue en cours  » à hauteur de mollet se détache de l’environnement par sa couleur blanche et le choix de couleurs vives. Il est abîmé, mais malgré le coin droit cassé, nous pouvons comprendre le message grâce à l’utilisation d’une linéale grasse. Les citoyens sont plutôt engagés dans la création de signalétique pour les visiteurs, celui-ci a une forme étrange, un panneau pour prévenir que ton GPS est « con ». Le panneau part d’une bonne intention. Cependant selon d’où tu arrives, il est impossible de lire, de plus le bois et les informations sont délavées.

Préventions/Préservations

Vers l’une des sorties du village à l’entrée d’un sentier, il y a ce panneau zone pastorale tout neuf. Le choix d’un vert foncé vient bien contraster avec le jaune qui vient mettre en exergue les comportements à adopter. Le choix du vert pour de la prévention est judicieux, car cela met en confiance les randonneurs qui ne pourraient pas être à l’aise avec ce type de zone (au contact des animaux).

Conclusion

Pour conclure, après cette balade, je suis passé à l’analyse de ces photos documentaires. Je me suis rendu compte de la cohérence graphique du village. Lescun forme une réelle unité graphique. La majorité des signes sont faits à la main, de la sculpture complexe au cadre en bois. Leur répartition géographique montre une continuité. Je n’ai pas eu l’impression de passer d’un village à un autre. C’est en grande partie dû aux panneaux des oiseaux et ceux des quartiers, ils viennent en quelque sorte baliser le passage. Ces signes sont assez discrets et se fondent parfaitement dans le paysage. En tant que village, il est important de laisser respirer les rues pour donner plus d’importance aux signes des GR. Ils jouent un rôle majeur pour les marcheurs, je n’imagine même pas suivre un symbole aussi petit dans les rues de Paris où même Bordeaux, où les individus sont perpétuellement stimulés visuellement. De plus du fait des rues étroites, on retrouve très peu d’actes plantés au sol ce qui rend la circulation bien plus agréable, on n’a pas besoin d’esquiver les panneaux en baissant la tête par exemple. Dans la grande majorité des cas, on peut constater que les signes à caractère informatif sont placés de manière stratégique pour être les plus identifiables possible malgré parfois une taille restreinte. Malgré la présence de nombreux signes graphiques, je me suis senti beaucoup moins sollicité. Les actes n’empiètent pas sur l’architecture et ne gâche pas les paysages. Ils sont discrets, fait à la main, cette méthode de production artisanale amène de la douceur, notre œil contemple ce qu’il a été produit et non.

Pour la suite du projet, je souhaite produire :

  1. Une édition papier qui vient rassembler l’ensemble des ressources présentes dans cette version normalisée
  2. Un site web interactif qui vient répertorier toutes les prises de vues et les classifications.
  3. Élargir cette classification aux matériaux utilisés.
Marces Théo
Bibliographie – sitographie

Bibliographie – Sitographie

Bibliographie

Bertrand Gibert et Philippe Fermigier. « Relever la montagne, Panoramas et cartes des Pyrénées (1850–1930)

Bernard Lassus. « Le Jardin Monde ».Aux éditions du Centre Pompidou, 2017 Consulter en ligne

Caspar David Friedrich. « Les actes graphiques en montagne ». Peinture, huile sur toile, 1818 Consulter en ligne

Collectif ROVO. « L’exposition Contrairement au gibier ». Exposition au centre d’art et de design, La cuisine, en 2017 Consulter en ligne

FFRandonnée. « La Charte Officielle du Balisage et de la Signalisation ». Publié en 2019 Consulter en ligne

Fraenkel Béatrice. « Les écritures exposées Ecritures ». Publié en 1994.

Graphisme en France. « 30e anniversaire ». Édité par le Centre national des arts plastiques (Cnap), 2024 Consulter en ligne

Grégoire Romanet. « Hobby ». Publié par Robo Books, 2022 Consulter en ligne

Irma baptiste. « Les actes graphiques en montagne ». Édité en 2022

Sitographie

Association des camps du Québec. #11 La signalisation | Sentiers : repartir du bon pied. Consulter en ligne

Cairn info. Thierry Paquot | L’espace public dans la ville : vers quelle urbanité demain ? Consulter en ligne

Cité de l’architecture et du patrimoine. Bernard Lassus, paysagiste. Consulter en ligne

Dommaine de Chaumont-sur-Loire. L’habitant paysagiste carte verte à Bernard Lassus. Consulter en ligne

SNOSM. Accidentologie des sports de montagne. Consulter en ligne

Visorando. Préparer et partager ses randos. Consulter en ligne

Marces Théo
Remerciements

Remerciements

Je tiens à remercier Corinne Melin pour son accompagnement sur ce projet tant dans la reflexion du projet que dans l’écriture. Et je remercie Maïlyss Maestre pour m’avoir accompagné en montagne afin de prendre les mesures, les prises de vues et les annotations sur le plan.


  1. Une montagne se caractérise par une importante élévation de terrain. ↩︎

  2. Je remercie Irma baptiste et son travail, qui m’a permis d’avoir une base de recherche importante via son projet de recherche «  Les actes graphiques en montagne  » édité en 2022 ↩︎

  3. En 2023, 8080 interventions de secours en montagne ont été recensées, portant assistance à 9176 personnes, dont 204 ont perdu la vie. Consulter en ligne ↩︎

  4. Notion créee par Edward T.Hall, qui renvoie notamment à l’étude de l’utilisation et l’organisation signifiante de l’espace dans les relations entre les êtres animés. ↩︎