Hans Eduard Meier est né en 1922 à Horgen, en Suisse, au bord du lac de Zurich. Étudiant à l’École des
Arts
Appliqués de Zurich[2] de
1943 à 1946, il y bénéficie d’une formation à la pointe. L’école est alors dirigée par Johannes Itten[3],
figure du premier Bauhaus. En ce début des années 1940, l’enseignement de la lettre dans les écoles
d’art
est
encore très récent. À l’école de Zurich, pionnière sur ce terrain, les cours de calligraphie et de
dessin de
lettres ont été instaurés dès 1916. Au Bauhaus, c’est vers 1923 que typographie et graphisme découvrent
des
perspectives nouvelles, accompagnant la vivacité des avant-gardes qui bouscule ici et là les pratiques
(typo)graphiques autour des années 1920. L’idée d’une « nouvelle typographie » prend forme, adhérant à
l’esprit
du temps et aux dernières expressions artistiques. Cette approche véritablement nouvelle s’affirmera
tant
sur le
terrain professionnel que dans les écoles d’art.
Dans les années 1940, l’école de Zurich compte parmi ses étudiants Adrian Frutiger, Josef
Müller-Brockmann,
Emil
Ruder, Jean Widmer, ou encore le peintre cinétiste Yaacov Agam. Hans Eduard Meier y suit les cours
d’Ernst
Keller et d’Alfred Willimann.
[4]
Tous deux font alors partie des personnalités du graphisme en Suisse, où se développe un ensemble de
pratiques
nouvelles héritières des avant-gardes et vouées à un avenir marquant – le contexte de la formation de Hans
Eduard Meier étant inscrit dans une riche scène artistique.[5]
4. Professeurs à l’école des Arts Appliqués de Zurich, Alfred Willimann et Ernst Keller
comptent parmi les principaux graphistes exerçant en Suisse depuis l’entre-deux-guerres jusqu’aux années
1950.
Tous deux joueront un rôle déterminant dans les développements du graphisme et de la typographie, notamment
à
travers leur enseignement. Ernst Keller (1891-1968) a étudié la lithographie et la typographie au début des
années 1910. Graphiste, typographe, affichiste, héraldiste et sculpteur, il enseigne le graphisme à l’école
de
Zurich à partir de 1918. Certains le considèrent comme le pionnier du « graphisme suisse ». Alfred Willimann
(1900-1957), ayant lui-même été étudiant à l’école de Zurich, y enseigne le dessin, l’art de l’écriture et
la
typographie à partir de 1930. Ses activités professionnelles recouvrent une œuvre polymorphe : graphisme,
typographie, sculpture, photographie, écriture, calligraphie et dessin.
5. Témoins de la fertilité de ce contexte dès les années 1910, de nombreux échanges se
tissent entre la Suisse et les acteurs de l’avant-garde. En 1916, c’est à Zurich que se forme le dadaïsme,
autour de poètes et d’artistes en exil fuyant la première guerre mondiale. C’est là encore que Jean Arp et
Sophie Tauber se rencontrent, en 1915. Dans les années 1920, El Lissitizky fait régulièrement le voyage en
Suisse (Die Kunstismen, ouvrage écrit avec Arp, paraît en 1925). Depuis la Suisse, de nombreux
contacts
s’établissent avec les protagonistes de l’avant-garde européenne, dont Kurt Schwitters, Le Corbusier ou
Walter
Gropius. Vers 1930, plusieurs personnalités quittent l’Allemagne pour la Suisse. De retour du Bauhaus, Max
Bill
s’installe à Zurich en 1929. Pour échapper au nazisme, Paul Klee et Johannes Itten rentrent également en
Suisse.
Jan Tschichold, porte-parole de la Nouvelle Typographie, s’installe à Bâle en 1933, après avoir été
contraint de
quitter son poste d’enseignant à Munich. L’ensemble de ces va-et-vient transnationaux a manifestement
contribué
au développement du graphisme et de la typographie en Suisse dès la fin des années 1910, et à travers les
décennies suivantes.