Introduction
Nous allons dans cet écrit parler de la manière dont les affiches de films sont représentatives de grandes périodes artistiques, et de quelle manière celles-ci annoncent le film. En effet, l’affiche constitue un grand rôle dans la communication et publicité, retranscrivant au spectateur une première image de ce que sera celui-ci, et l’incitant selon ses gouts à aller le voir au en salle. Présente depuis l’apparition du cinéma, l’affiche évolue au fil du temps, et traverse ainsi de nombreux styles et techniques que nous allons ici analyser.
Le choix des films se base sur leur réputation et participation aux mouvements artistiques associés, ainsi que sur leur réalisation par des cinéastes clés de l’histoire cinématographique. Les affiches que nous allons étudier sont les plus citées dans les ouvrages qui parlent du film et les moteurs de recherche sur Internet.
Dans un premier temps, nous étudierons les affiches dans le cinéma d’avant-garde, puis dans un second temps l’affiche du rétro-futur et cyberpunk. Dans la dernière partie, nous étudierons la question de la disparition de l’affiche contemporaine, laissant place à des moyens techniques plus accessibles, avec comme exemple les affiches et bandes annonces de films de super-héros Marvel.
Les affiches du cinéma d’avant-garde
Nous allons dans un premier temps étudier les affiches du cinéma
d’avant-garde, des années 1920 avec le mouvement de l’expressionnisme
allemand aux années 1960 avec la nouvelle vague Française.Le Cabinet du Docteur Caligari, réalisé en 1920 par Robert Weine.
Premièrement, un mouvement avant-gardiste est considéré comme rejetant la tradition artistique moderne, remettant en question l’art actuel, et proposant ainsi des idées créatives révolutionnaires.
Pour ce premier exemple, nous allons analyser l’affiche du film Le cabinet du docteur Caligari, film d’horreur muet allemand réalisé par Robert Weine et sorti en 1920.
Apparu au XXe siècle, l’expressionisme est un courant touchant de
nombreux médias artistiques, allant de la peinture, sculpture, architecture, littérature, au cinéma, comme nous allons le voir ici.
L’objectif du mouvement est de déformer la réalité, afin d’atteindre
le spectateur émotionnellement, et plus précisément en évoquant des
sentiments de peur ou de folie. Ces sentiments représentent ainsi par
ce biais le contexte historique allemand de l’époque, plongé dans la
pauvreté et l’industrialisation naissante. Les traces laissées par la
première guerre mondiale apparaissent également dans la violence du
geste peint et le choix des couleurs vives et contrastées.
En étudiant des œuvres de l’époque telles que The Last Supper de
Emil Nolde ou encore les gravures de Erich Heckel, nous pouvons tout de suite observer les aspects centraux du courant expressionniste: la déformation physique, dislocation des corps, traits saillants et coupants, contrastes clairs-obscurs The Last Supper, Emil Nolde, 1902.
marqués, idée de destruction et atmosphère lourde, effrayante. Dans The Last Supper, toile réalisée en 1909 par Emil Nolde, qui utilise de façon expressive la couleur et des formes saillantes. Le tableau baigne dans une atmosphère et sentiments religieux intenses. Nous observons le Christ accompagné de douze disciples, rassemblés autour d’une source de lumière accentuant leurs expressions graves et sérieuses. Il n’y a aucune présence de perspective dans la scène, ou encore aucun détail sur l’endroit de celle-ci, donnant une idée de suffocation. L’usage des couleurs sert le même but, avec des tons autour du vert, et le visage jaune, pâle, presque malade du Christ vient retranscrire une idée de cadavre et de mort, accentuant encore plus ce malaise de la scène.
De manière similaire, le travail de gravure de Erich Heckel

Appartenant au mouvement de l’expressionisme allemand, ce film possède de nombreuses caractéristiques du mouvement dans l’affiche, notamment avec la présence de lignes saillantes, de perspective distordue, et de contrastes forts.
Ces aspects sont les mêmes dans le film, allant de la création des décors en peinture, étant volontairement déformés, avec de l’asymétrie, et des perspectives trompeuses ou fausses. Quant à la déformation physique, le maquillage est fortement utilisé sur les acteurs, donnant à leur visage un aspect monstrueux (comme pour le personnage du somnambule par exemple) ou donnant un caractère extrême à chacune de leurs expressions.
Nous allons maintenant analyser l’affiche de ce film et remarquer que celle-ci énonce effectivement tous les aspects précédemment évoqués.
L’affiche est en effet extrêmement efficace dans sa manière de
représenter l’atmosphère du film. Premièrement, la perspective
utilisée pour le pont est disloquée et éloignée de la réalité, donnant
au spectateur une première sensation de malaise. Au premier plan, nous observons l’un des personnages principaux, mis en avant par le contraste apporté par le noir de ses habits. Arborant une expression sombre et effrayante, le spectateur comprend que le film appartient au genre de l’horreur. Cette idée est d’autant plus mise en avant par la présence de la femme inanimée à sa droite, étant elle-même dans le prolongement de la perspective du pont, menant notre œil au centre de l’affiche. Notre regard est par la suite guidé vers le titre, Le Cabinet du Docteur Caligari. Le choix de la police de caractère accentue encore une fois cette idée de terreur, avec ses formes saillantes et ses angles, détruisant toute idée de fluidité. Chaque lettrage possède aussi un caractère asymétrique, rappelant le visuel inconfortable de la perspective. Nous pouvons de plus observer des similitudes avec les premiers caractères d’imprimerie allemands, puisant dans le gothique, appelés Fraktur, et dont les arrondis sont brisés.
Nous pouvons ainsi citer Bela Balazs, écrivain et théoricien du cinéma
des années 1920 : « Le style allemand de la prise de vue cherche aujourd’hui à obtenir des effets picturaux. Mais surtout en drapant et en façonnant le sujet, le motif. Comme observé, la réalité est transformée pour produire une image impactante émotionnellement pour le spectateur. »
Le second exemple que nous allons pouvoir aborder dans cette
thématique du cinéma d’avant-garde, est l’affiche du film La
Chinoise, réalisé par Jean-Luc Godard en 1967. La Chinoise, réalisé en 1967 par Jean Luc Godard.
Le film appartient au mouvement de la Nouvelle Vague qui s’est
développé de 1950 jusqu’à fin 1960. Le mouvement est composé de
techniques, plans, compositions, et sujets révolutionnaires et
novateurs pour l’époque.
Le mouvement se compose de nouveaux réalisateurs, tous issus de
critique de la revue Les Cahiers du Cinéma (Jean-Luc Godard, François Truffaut…). Leur souhait est de filmer autrement: ils
choisissent de sortir des studios pour aller au contact de la ville
réelle, retranscrivant un effet de spontanéité, marque de fabrique de
la nouvelle vague. De la même manière, les dialogues se transforment aussi : les
personnages parlent comme dans la vraie vie, et non plus de manière littéraire et classique, apportant plus de
réalisme. Enfin, l’idée de liberté est introduite, avec une rupture
avec les règles de mise en scène classiques: le montage, accentuant plus les raccords au lieu de les dissimuler, des compositions faisant référence à des toiles, gros plans, effets
visuels (recadrages sur fonds noirs, zooms rapides, mentions écrites
sur l’image…).
Godard s’inspire pour le scénario des ouvrages « La Conspiration » de
Paul Nizan et « Les Démons » de Fiodor Dostoïevski. Le film prend un
parti pris politique tourné autour de la violence et de la révolution.
Il y développe également les thèmes de la violence et de la révolution
culturelle en s’appuyant sur de jeunes révolutionnaires maoïstes
parisiens, plongeant peu à peu dans des idées de révolution violente
et de terrorisme. On peut remarquer des similitudes avec l’histoire
des cinq citoyens russes du roman de Dostoïevski, cherchant eux aussi
à renverser le gouvernement russe par la violence. Marquant cette idée de
révolution dans le scénario, cette idée est aussi présente dans le contexte réel et historique de l’époque, que ce soit par la création de la nouvelle vague créant une rupture avec le passé, mais aussi par le mouvement de mai 1968, qui arrivera seulement un ans après la sortie du film, justifiant d’un souhait universel de changement.
Ce film aborde avec réalisme les thèmes de politique et de violence.
Le spectateur est interpellé directement, avec parfois des regard
directs, ou encore la caméra pointée vers lui. Une rupture avec le
côté traditionnel se marque aussi par la présence de texte, de répliques, écrits directement sur des murs ou dans divers endroits du décor, souvent simultanément énoncé par l’un des personnages. Plan de La Chinoise.
Ces mini-scènes textuelles se caractérisent souvent par un plan fixe, centrées sur l’écriture, avec un personnage énonçant le texte, ou l’écrivant directement. Ces scènes, par leur clarté et représentation directe du propos, viennent contraster avec le caractère compliqué et subjectif des tourments philosophiques et politiques des personnages. Certains objets sont aussi mis en avant dans le film : Le livre rouge, outil de savoir des étudiants, faisant par sa couleur à la fois référence à la violence et au drapeau chinois, souvent présent en grand nombre dans les scènes d’études philosophiques.
La radio, présente et retranscrit les évènements chinois, ou encore des hymnes et chansons révolutionnaires en faveur de Mao. De la même manière, de nombreuses affiches servant ce but sont présentes dans le décor, montrant que ces idées révolutionnaires les suivent partout et prennent de plus en plus de place dans leur quotidien.
Concernant les couleurs, beaucoup de noir, blanc, bleu et rouge sont utilisés, permettant de créer beaucoup de contrastes, et de représenter les oppositions philosophiques entre certains personnages. Le rouge est néanmoins la couleur proéminente du film, venant renforcer à la fois l’idée de propagande chinoise, mais aussi de violence révolutionnaire, constamment présente dans l’univers des personnages. Nous pouvons de plus noter que ces couleurs sont aussi énormément utilisées dans les affiches de propagande.
L’affiche représente l’idée de violence, avec une présence insistante
de la couleur rouge, pouvant être à la fois associée à l’idée de sang, et faire référence au drapeau chinois et à la propagande. D’immenses
piles de livres, observés dans le film comme outils d’étude politique et philosophique, encerclent l’un des personnages principaux. Placés au centre de l’affiche sous forme de barricade, ils
renforcent cette idée de violence et de révolution, mettant en valeur
cette image de manifestation et de conflit. Notre regard est par la
suite guidé vers le centre de l’affiche, avec l’un des personnages
principaux. Yvonne est en effet mise en valeur par le contraste de ses
cheveux noirs avec le décor rouge qui l’entoure. Celle-ci fixe directement le spectateur, faisant référence aux plans révolutionnaires et à l’idée de réalisme du film, caractéristique de la nouvelle vague.
Son expression dure et menaçante, mêlé à son visage recouvert de sang et à l’arme pointée sur le spectateur, vient encore une fois rappeler cette idée de combat. Le titrage et en particulier sa police de caractère vient renforcer cette idée de manifestation, avec une asymétrie et un aspect « script ». Celui-ci est mêlé à un effet de peinture qui s’efface par endroit, et vient donner l’idée d’une pancarte écrite en temps de manifestation dans l’espace public. La police utilisée est « L’Antique Olive », et a été créée en 1960 par Roger Excoffon. Jean-Luc Godard s’est ici réappropriée la police de manière singulière. En effet, celui-ci a transformé la forme des lettres, semblant maintenant découpées au cutter, leur donnant ainsi cet aspect plus maladroit, fait main, dans l’urgence.
Les affiches, par leur visuel, typographie et couleurs sont en concordance avec leur mouvement, et retranscrivent de manière extrêmement efficace ces idées de renouvèlement créatif et de rupture avec le passé.
L’affiche rétro-futur et cyberpunk
Nous allons maintenant pouvoir étudier le cinéma des années 1980 jusqu’aux années 2000, avec des affiches traitant de la thématique futuriste et de science-fiction, reliée par un contexte d’émergence de nouvelles technologies.
Pour ce premier exemple, nous allons pouvoir analyser l’affiche de Blade Runner, film de science-fiction réalisé par Ridley Scott et sorti en 1982.
Film de science-fiction iconique de la thématique, Blade Runner
présente des esthétiques telles que le cyberpunk ou rétro-futur.Blade Runner, réalisé en 1982 par Ridley Scott. Le
scénario se base sur le roman « Les androïdes rêvent-ils de moutons
électriques ? » de Philip K Dick. L’histoire retrace celle d’un
policier devant pourchasser un groupe de réplicants (êtres artificiels génétiquement supérieurs aux humains) s’étant rebellés de l’asservissement imposé par l’homme. Ce film s’inscrit dans le mouvement du rétro-futur, dont le visuel est inspiré de la manière dont le futur et la science-fiction étaient imaginés dans le passé. Ceci explique ainsi les références à des films tels que Métropolis de Fritz Lang.
Cela nous permet ainsi de recontextualiser le film dans son temps, les années 80, avec à ce moment-là l’apparition des nouvelles technologies dans la vie quotidienne de la population.
Le scénario se passe dans un futur lointain et totalement opposé à la
ville actuelle. Nous pouvons notamment observer des aspects visuels empreints à
l’univers de la bande dessinée, notamment à The long Tomorrow de
Moebius (Jean Giraud), étant à l’origine de la ville cyberpunk. Ville dans The Long Tomorrow, Jean Giraud, 1989. En effet, celle-ci apparaît étouffante, plongée constamment
dans la pénombre de la nuit et la pluie, partageant avec le spectateur
une atmosphère lugubre et lourde.
Cette pénombre est contrastée par l’omniprésence de lumières artificielles, publicités, commerces et structures, représentant la modernité et innovations technologiques. Nous pouvons remarquer que la nature est entièrement absente, rendant la ville étouffante, devenant une sorte de prison pour l’homme.
L’idée d’urbaphobie est ainsi mise en valeur, où la ville devient cauchemar, n’est plus au service de l’homme et de son bien-être, mais vient plutôt l’asservir au profit de l’argent et du pouvoir.
Nous pouvons remarquer que l’affiche est efficace dans sa manière de retranscrire le genre du film : les immeubles peuvent se confondre avec des vaisseaux spatiaux, les couleurs font penser à des néons lumineux et le fond de fenêtres d’immeubles ont l’aspect de ciel étoilé. La notion de film noir est aussi évoquée, par l’utilisation des codes tels que le personnage principal, homme sombre et ténébreux, menant une enquête. Celui-ci est accompagné d’une femme fatale l’aidant dans sa quête. Ses deux personnages sont ici présentés comme tels, avec l’enquêteur ayant le regard dans le vide et tenant une arme, et la femme ayant un regard provocateur et une cigarette à la main. Concernant la police de caractère, nous pouvons remarquer un choix de police sans sérif et légèrement italique, avec des lettres aux aspects très géométriques. Cet aspect est renforcé par la ligne coupant l’entièreté du titre horizontalement, et rappelle la géométrie et modernité de la ville.
Nous pouvons de plus observer la présence des visages des acteurs, juxtaposés et bien mis en évidence : ce système servira de base pour les prochaines décennies et deviendra un code extrêmement répétitif utilisé dans la grande majorité des affiches contemporaines. Nous pouvons aussi relever dans cette période la disparition progressive des affiches peintes, avec l’émergence des nouvelles technologies et l’utilisation de plus en plus commune de la photographie et du photomontage.
Pour ce second exemple, nous allons analyser l’affiche du film
Animatrix, sorti en 2003. Ce film est divisé en 9 courts-métrages
d’animation pour adultes américano-japonais, et a été réalisé par
Andrew R. Jones, Mahiro Maeda, Shin’ichiro Watanabe, Yoshiaki
Kawajiri, Takeshi Koike, Koji Morimoto, et Peter Chung. Animatrix, réalisé en 2003 par Andrew R. Jones, Mahiro Maeda, Shin’ichiro Watanabe, Yoshiaki Kawajiri, Takeshi Koike, Koji Morimoto, et Peter Chung. Ce film se place dans un contexte de modernisation technologique, avec de nombreuses innovations numériques
(croissance d’Internet, ordinateurs personnels, téléphones portables, logiciels…) et une utilisation
croissante d’effets spéciaux. Ainsi, les genres dominant de l’époque sont le genre fantastique, d’horreur et science-fiction.
Plan tiré du court-métrage Dernier vol de l’Osiris de Animatrix. Ces améliorations technologiques permettent notamment une utilisation plus efficace techniquement et visuellement des images de
synthèses, que nous allons pouvoir observer par exemple dans le court
métrage Dernier Vol de l’Osiris.
L’animation possède une place extrêmement importante dans la culture japonaise, avec la création de nombreuses animations dérivées de mangas, s’exportant de plus en plus et devenant très populaires à l’époque. Cette collaboration s’explique alors, par d’un côté un intérêt grandissant pour une technique et une culture nouvelle, et d’un autre côté par le souhait de faire progresser l’univers de Matrix, ayant suscité beaucoup d’engouement quelques décennies auparavant.
En effet, depuis les années 1980, le cinéma d’animation japonais a connu une hausse de popularité dans le pays et jusqu’en occident, avec l’apparition d’un public très actif, nommé otaku. D’abord adapté à un public d’enfants ou d’adolescents, l’animation japonaise de science-fiction attire de plus en plus de spectateurs et étend ses productions, allant d’ adaptations de mangas à la production de grandes sagas (Gundam, Akira…), qui inspireront de nombreuses autres œuvres.
Animatrix prend pour base l’univers du film Matrix, film de
science-fiction sorti en 1999, et réalisé par Lana Wachowski et Lilly
Wachowski. Le film se compose de 9 courts métrages explorant l’histoire avant Matrix, puis l’après, avec dans
certains des références aux personnages du film original. Des références visuelles y sont aussi intégrées, que ce soit
avec les lignes de codage vertes verticales, ici notées en anglais et
japonais pour faire référence aux réalisateurs, ainsi que la
colorimétrie tournant souvent autour du vert. Nous pouvons aussi
remarquer une importance donnée aux nouvelles technologies, que ce
soit par la thématique du scénario ou par l’utilisation de divers
techniques 2D et 3D. Nous pouvons lier ces pratiques au contexte historique du
début des années 2000, avec l’émergence et l’amélioration de nombreux
outils numériques et une modernisation technologique (avec par exemple
l’usage grandissant des images de synthèses).Plan tiré du court-métrage Histoire de l’enfant de Animatrix.
Le scénario général du film vient se lier par certains aspects à celui de Blade Runner, avec l’idée de ville cauchemar (ici entièrement détruite par les robots), ainsi que la présence d’individus artificiels s’étant rebellés contre les humains, source de pouvoir.
Dans le premier court métrage, intitulé Dernier Vol de l’Osiris , on remarque un usage d’images de synthèses. L’histoire se déroule dans le monde réel, avec des rescapés s’échappant des créatures. La fin conduit les personnages principaux un échec, comme beaucoup d’autres court-métrages, mettant en valeur la tragédie et atmosphère oppressante de cet univers. Ce sera le seul court-métrage du film étant entièrement réalisé en trois dimensions.
Dans La seconde Renaissance (partie I et II), le style d’animation ressemble davantage aux animations japonaises, avec des personnages stylisés et une production entièrement en 2D. Le scénario retrace l’histoire avant la création de la matrice, et se concentre sur les idées de violence, guerre et combat.
Ensuite, dans Histoire de l’Enfant, le style d’animation semble beaucoup plus expérimental et artistique, avec la présence de crayonnés et de visuels plus 'brouillons’, esquissés. Cet aspect vient mettre en valeur l’idée de rébellion adolescente représentée par le court métrage, avec un jeune homme s’échappant de la matrice, défiant ainsi les règles, de la même manière que ses esquisses viennent défier la rigidité de l’animation classique.
Dans le court-métrage suivant, Programme, on retrouve le pays japonais avec ce style manga / animés ainsi que des références à la culture japonaise dans la matrice, centre d’entraînement pour les deux personnages principaux.
Dans Record du monde, on remarque un style plus américain, pouvant s’apparenter à du cartoon. L’histoire se passe dans la Matrice, avec une fin assez dramatique pour le personnage principal, dont la mémoire sera effacée.
Enfin, pour les trois derniers courts-métrages, Au-Dela, Histoire d’un détective et Matriculé, le style est assez commun aux deux cultures. Les deux premiers se passent dans la matrice, avec des personnages se rendant compte de leur manipulation, et le dernier dans le monde réel, avec pour les trois des fins dramatiques signant à chaque fois la victoire des robots.
Le visuel de l’affiche montre que le film se passe dans l’univers de la matrice, avec la présence des lignes de code verticales sur les côtés droits et gauche de l’affiche. Au centre, nous pouvons observer divers plans appartenant aux différents courts métrages, mis en page dans une grille rectangulaire. Cette mise en page nous permet de visualiser les différentes techniques utilisées dans le film, avec de l’animation 3D, et de l’animation 2D (allant du style d’animation japonaise au style cartoon plus américain).
Concernant la police de caractère, celle-ci est en sérif, et est écrite sur un dégradé vert. Elle possède une esthétique numérique, avec un effet de dislocation horizontale, donnant l’impression d’un « bug » à l’écran.
Ainsi, nous pouvons dire que cette affiche retranscrit de manière efficace l’univers dans lequel se déroule le film, montrant bien son lien avec l’univers de Matrix et l’appartenance à la science-fiction, avec l’utilisation de codes spécifiques au genre tels que les couleurs sombres et froides (indiquant l’idée de ténèbres, angoisse), contrastées avec une couleur vive.
La disparition de l’affiche
Enfin, nous allons dans cette dernière partie traiter du sujet de la disparition de l’affiche contemporaine, celle- ci étant concurrencée par les méthodes de publicités numériques accessibles plus facilement et rapidement.
Nous allons prendre pour exemple un milieu impacté par cette évolution : les films de l’univers cinématographique Marvel.Dr Strange Mutivers of Madness, réalisé en 2022 par Sam Raimi.
Avengers Infinity War, réalisé en 2018 par Anthony et Joe Russo.
Avengers Endgame, réalisé en 2019 par Anthony et Joe Russo.
Etant issus de comics scénarisés par Stan Lee et dessinés par Jack Kirby, les Marvel Comics possèdent une place centrale dans la culture américaine. Marquant le début de leur production cinématographique avec Iron Man en 2008, l’entreprise n’as cessé de gagner en popularité depuis les dernières decennies.
Grâce à l’essor du genre super-héroïque des années 2000 évoqué précédemment avec Animatrix, (grâce aux progrès des effets spéciaux numériques), la franchise marque une continuité avec cette amélioration des techniques grandissantes, connaissant ainsi un grand succès. Mais nous allons aussi pouvoir remarquer que les améliorations technologiques contemporaines, ayant contribué à sa popularité, viennent maintenant dégrader le caractère créatif lié aux films.
Nous allons ainsi dans un premier temps analyser plusieurs affiches, démontrant une diminution d’intérêt pour la créativité et le renouveau. L’exemple utilisé sera ici les affiches de films de super-héro Marvel.
Premièrement, nous pouvons remarquer que ces dernières années, une sorte de répétition se créé entre les affiches de genre : même compositions, couleurs, postures des personnages… En nous concentrant ici sur les affiches Marvel, nous pouvons tout de suite remarquer des similitudes au niveau visuel : dans les affiches consacrées aux films de la série Avengers, nous relevons premièrement des compositions semblables. En effet, les visages et/ou corps des acteurs sont mis en valeur et juxtaposés dans le centre de l’affiche, avec à l’arrière-plan, l’un des personnages affiché en plus grand (celui-ci étant généralement l’antagoniste).
Nous pouvons de plus observer une répétition au niveau des couleurs, avec généralement des teintes autour du bleu, violet ou rouge, mêlant les idées de galaxie et de science-fiction à celle de combat. Cette idée est mise en valeur par la pose de chacun des personnages, regardant généralement au loin d’un air grave.
Concernant la typographie, le titrage se retrouve au centre en bas, avec une police de caractère utilisée dans les comics. Le logo se base sur l’importance de la lettre A, première lettre de Avengers, et utilise une police de caractère créée par Michael Gene Adkins, intitulée Avengeance. Le sous-titre se retrouve généralement en dessous du titrage. Ensuite, le logo marvel se retrouve systématiquement au-dessus de celui-ci, et est mis en valeur par sa couleur rouge.
Nous remarquons les mêmes répétitions dans d’autres affiches du genre, appartenant à d’autres
univers : les affiches de DC Comics, possédant généralement le
personnage principal au centre de l’affiche dans une posture droite et figée (The Dark Knight, Justice League). Le rouge et le bleu des couleurs proéminentes, associées généralement à des explosions (The Dark Knight Trylogy), ou à du bleu, associé à des éclairs (Shazam). Nous pouvons aussi remarquer dans les deux franchises une
utilisation d’effets « néons » autour de texte ou d’éléments
photographiques, mettant en valeur l’idée de fantastique et surnaturel.
Nous pouvons ainsi dire que les affiches
de ce genre possèdent des normes communes, les rendant similaires
entre elles, et ici plus particulièrement puisque les films appartiennent à la même « série ».The Dark Knight, Christopher Nolan, 2008.
Nous pouvons expliquer cette absence de créativité dans nos affiches contemporaines par l’obligation pour les designers de suivre ces mêmes normes, qui permettent au spectateur de comprendre immédiatement quel genre de film il va voir, et avec quels acteurs. Des sortes d’expériences sociales sont mises en place, avec des individus auxquels sont montrés plusieurs prototypes d’affiche pour un même film. L’affiche la plus représentative et compréhensive rapidement est donc choisie.
Ainsi, les affiches sortant de l’ordinaire, étant par exemple illustrées, sont mises à l’écart, car s’éloignant de l’esthétique que le spectateur va retrouver dans le film. Certains des codes énormément utilisés sont : les couleurs, avec systématiquement du bleu pour les reportages animaliers, du jaune et bleu pour les comédies, des couleurs sombres pour les films d’action, ou encore le rose et rouge pour les comédies romantiques. La disposition des personnages est aussi très importante, avec dans les films d’action le héros, seul de dos et portant une arme.
Bien que nous pouvons noter une évolution de ses codes, allant des années 1950 avec le nom des acteurs constamment mis en valeur sur l’affiche, jusqu’à la mise en valeur du visage (gros plan) de l’acteur à partir des années 1980 (surtout après les affiches de la saga Star Wars), ou encore l’usage de fond blanc et typographie rouge pour les comédies des années 1990, jusqu’à l’usage du bleu et jaune pour les comédies actuelles.
Ces codes ont toujours été bien présents, (constants ou évoluant en fonction des modes), mais nous pouvons néanmoins remarquer qu’ils sont ici exacerbés et centraux suite à la présence grandissante de la bande-annonce comme nouveau moyen de communication.
Nous allons maintenant pouvoir analyser l’élément qui permet au spectateur de capter l’atmosphère et l’histoire générale du film : cet élément n’est ainsi aujourd’hui plus l’affiche, mais la bande annonce. Visionnable facilement, rapidement et partout grâce aux technologies numériques, la bande annonce constitue aujourd’hui l’outil majeur pour inciter une audience à aller voir un film.
Nous allons ici analyser la bande annonce du film Avengers – Endgame.
Nous pouvons premièrement remarquer la force de la musique, qui pose dès la première seconde l’atmosphère grave et dramatique du film. Les plans, en noir et blanc associés la couleur rouge mettent en valeur cette idée.
Ceux-ci sont de plus accompagnés à la musique et a des transition en fondu viennent mettre en valeur le drame et suspens. Les plans courts, se concentrant majoritairement sur le visage des personnage regardant au loin, montre que quelque chose se prépare et vient mettre en tension le spectateur.
Dans le second teaser que nous allons analyser, celui de Doctor Strange in the Multiverse Madness, nous pouvons remarquer la même atmosphère dramatique ; les effets sonores liés à l’apparition de chaque nouveau plan met en valeur cette idée d’action et de drame qui se prépare.
Contrairement à cette bande annonce, l’affiche ne dévoile rien de l’histoire ou de ce qu’il va se passer dans le film : On peut remarquer les personnages principaux mis en valeur au centre, accompagnés de la couleur rouge et d’effets lumières « néons ». Les personnages secondaires sont présents à droite, sur fond étoilé faisant toujours référence à la science-fiction et la galaxie. Des éclats de verre représentant cette idée de violence et d’action.
Nous pouvons remarquer que dans ses deux bandes annonces, l’histoire du film est en partie dévoilée, présentant quels acteurs sont présents, et dans quel contexte. Les phrases d’accroche mettent en valeur cet aspect de suspens et de tension. Nous pouvons observer que les rôles et la relation entre la bande-annonce et l’affiche sont fortement déséquilibrée : la bande annonce dévoile l’histoire, et l’atmosphère entière du film. L’affiche ne devient alors qu’une image, permettant simplement de rappeler au spectateur que le film est sorti, et quel acteur joue dedans ; pour pouvoir réellement savoir ce que le film sera, le spectateur va consulter la bande annonce.
Nous pouvons ainsi dire que la bande annonce, par son accessibilité plus simple pour le spectateur, possède tous les éléments les plus importants du film et devient ainsi plus efficace que l’affiche en tant qu’élément publicitaire. Nos smartphones étant utilisés dans presque toutes les actions de notre vie quotidienne, il est bien plus facile de visionner la bande annonce sur celui-ci que d’aller observer l’affiche dans l’espace public.
Conclusion
Depuis le début de l’histoire du cinéma, nous avons pu remarquer l’utilisation de l’illustration comme technique, ayant permis de représenter de manière créative l’atmosphère et les aspects visuels du film. Par la suite, l’illustration sera remplacée par la photographie, engendrant une utilisation de visuels directement issus du film et permettant une compréhension directe du spectateur des visuels et genre. Suite à cette évolution, des codes spécifiques à respecter (visages des acteurs, couleurs récurrentes, …) ont petit à petit écarté la créativité de la production.
Nous avons ainsi pu observer une évolution (liées aux évolutions technologiques de l’industrie du cinéma ) des médiums, styles et représentations à travers l’histoire cinématographique, représentant ce milieu en constante évolution, autant dans ses techniques que dans ses sujets.
Bibliographie
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films se ressemblent? C’est normal, elles sont faites pour ça, 3 décembre 2018, francetvinfo
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