La région autonome (SUMI) constitue la plus grande unité pour la vie quotidienne des BOLOs et des IBUs. Une telle région comprend un nombre variable de BOLOs, d'arrondissements et de comtés, par exemple 20 à 30 comtés, soit plusieurs millions de personnes.
En ces temps de nationalisme exacerbé, il paraît presque suicidaire de parler de disparition des nations. Alors que les théoriciens marxistes de la libération nous expliquent que le nationalisme est une étape nécessaire de la lutte pour l'indépendance contre l'impérialisme, l'abolition des nations semble même faire partie d'une nouvelle stratégie impérialiste. Ceci pourrait être vrai si les petites nations seulement renonçaient à leur existence tandis que les super-puissances impérialistes continuaient à exercer leur pouvoir. L'abolition des nations signifie tout d'abord la subversion et le démantèlement des États- Unis et de l'Union Soviétique, l'abolition des deux blocs ; sans cette mesure tout le reste ne serait que de l' « art pour l'art ». Il y a des tendances centrifuges dans ces deux superpuissances et cette décomposition devrait être soutenue par tous les moyens. L'élément principal de l'anti-nationalisme n'est pas une forme de pâle internationalisme, mais le renforcement de l'autonomie régionale et de l'identité culturelle. Ceci est aussi valable pour des pays plus petits : plus ils répriment leurs minorités culturelles pour sauvegarder l' « unité nationale », plus ils s'affaiblissent par rapport à la force compacte des superpuissances. (Car ils ne représentent aucun espoir concret pour les minorités opprimées des super-puissances.) Beaucoup de fautes ont été commises en ce qui concerne les « nationalismes ». Les socialistes croient au dépassement des nationalismes par le développement d'une civilisation industrielle moderne et internationaliste ; ils considèrent donc l'autonomie culturelle comme un prétexte à la régression. La plupart des classes ouvrières confrontées à ces « utopies » socialistes ont préféré un nationalisme réactionnaire. Les fascistes, les partis bourgeois et les régimes nationalistes ont été capables d'exploiter la crainte des classes ouvrières face à cet État mondial socialiste qui allait leur enlever le peu qui leur restait de traditions populaires. Ces classes se sont rendues compte que ce modernisme socialiste n'était qu'un autre nom pour une Machine-Travail Planétaire encore plus parfaite. Le problème n'est pas le nationalisme, mais l'étatisme. Il n'y a pas de mal à parler sa propre langue, à insister sur les traditions, l'histoire, la cuisine, etc. Mais aussitôt que ces besoins sont reliés à un organisme central, hiérarchique et armé, ils deviennent de dangereuses justifications pour le chauvinisme, le mépris de la diversité, les préjugés ; ce sont des éléments de guerre psychologique. Réclamer un État pour protéger sa propre identité culturelle n'a jamais été un bon deal : les coûts de cet État sont élevés et les tradition culturelles sont perverties par son influence. À cet égard, le Moyen-Orient est un triste exemple. Les différentes cultures populaires ont presque toujours été capables d'y vivre ensemble en paix aussi longtemps qu'elles ont pu maintenir leurs distances par rapport aux États. Les communautés juives et arabes ont pu cohabiter sans graves problèmes en Palestine, dans le Marais et à Brooklyn aussi longtemps qu'elles n'ont pas cherché à réaliser leur propre État. Ce n'est évidemment pas la faute des Juifs s'ils ont eu l'idée d'avoir leur propre État ; leurs communautés en Allemagne, en Pologne, en Russie, etc. ont été attaquées par les différents États de sorte qu'elles n'avaient « pas d'autre choix » que de s'organiser de la même manière. L'étatisme est comme une maladie contagieuse. Après la création de l'État d'Israël, les Palestiniens ont eu, à leur tour, les mêmes problèmes que les Juifs en Allemagne et ils se battent maintenant pour un État palestinien. Ce n'est la faute de personne, mais le problème est là. On ne résoudra rien en se demandant : qui a commencé ? Ni un État hébreu, ni un État palestinien ne peuvent résoudre cela et, de plus, aucune solution de réalisme politique ne semble en vue. Quelques régions autonomes (SUMIs) avec des comtés ou des BOLOs de Juifs, d'Arabes, de Druzes et autres pourraient résoudre le problème, mais seulement à condition que le problème soit résolu de la même manière partout dans le monde. Ce qui se passe maintenant au Moyen-Orient peut arriver partout et à tout moment. Beyrouth n'est qu'un exemple prémonitoire pour New York, Rio, Paris ou Moscou.