Liquider l’utilisateur

Silvio Lorusso
Article publié dans la revue Tèque no 1 en Janvier 2022

Agentivité et automatisme

Parmi les trois types d’activités identifiées par Hannah Arendt, l’action est la notion la plus large, et la plus vague : peut-on dire que prendre un raccourci pour aller au supermarché est une pause dans « l’automatisme fatidique de ce qui ne fait qu’advenir » ? Est-ce que la sortie d’un tout nouveau système d’exploitation correspond à un nouveau départ ? Difficile à dire. Et pourtant, je trouve que « l’action », avec sa connotation anti-comportementale négative, est un concept plus utile que celui qui est généralement utilisé pour décrire de façon positive le degré d’autonomie de quelqu’un : l’agentivité (agency). Celle-ci sert à mesurer la « capacité, la condition, ou l’action ou l’exercice d’un pouvoir’ » de quelqu’un ou de quelque chose. Très bien, mais comment pouvons-nous la mesurer si ce n’est en jaugeant le pouvoir même de changer de direction ou de créer une bifurcation dans un chemin ? Une planète qui sortirait soudainement de son orbite nous paraîtrait « douée d’action », voire même douée d’intention. Une action est en réalité un choix, et l’agentivité permet de mesurer la capacité à faire des choix. L’absence de choix, en revanche, constitue le comportement. Un toxicomane a peu de possibilité d’agentivité car il peut choisir d’interrompre son comportement toxique, mais ce choix est extrémement difficile. En résumé, je propose de définir l’agentivité comme la capacité d’agir, qui est elle-même la capacité d’interrompre un comportement.

Voici un exemple relatif à une plateforme. Nous pouvons présumer un manque d’action de la part de l’utilisateur des réseaux sociaux les plus utilisés. Ce qui limite l’action d’un utilisateur, c’est-à-dire sa capacité à arrêter d’utiliser de telles plateformes, est un mélange de techniques addictives et de pressions sociales. Il est difficile de bloquer l’automatisme générateur de dopamine consistant à faire défiler du contenu, et il est même encore plus ardu de supprimer votre compte alors que tous vos amis et collègues partent du principe que vous en avez un.

Dans ce cas, une action peu importante prend la forme d’une dépendance commerciale. Si l’action est synonyme de choix, le choix que nous qualifions d’authentique est de ne pas être sur Facebook (ou WeChat, par exemple).

Cette définition de l’action est pragmatique et il ne faut pas oublier qu’elle est aussi très réductrice : elle ne prend pas en compte l’opposition entre différentes actions à l’œuvre dans n’importe quel système, qu’il soit humain ou non-humain. Cet article se concentrera donc sur un unique ingrédient (l’utilisateur) de la soupe actionnelle qui mijote dans les ordinateurs, pour reprendre une expression de James Bridle.

Utilisateurs et non-utilisateurs

Nous appelons « utilisateur » la personne qui se sert d’un ordinateur. Toutefois, est-ce que « utilisation » est vraiment la catégorie la plus indiquée pour décrire une telle activité ? C’est plutôt vague, non ? Le théoricien des nouveaux médias Lev Manovich a brièvement exposé que le terme « utilisateur » était juste un terme bien pratique pour désigner quelqu’un qui peut être considéré, selon les cas, comme un acteur, un joueur, un musicien, etc. Cette terminologie variée vient du fait, décrit pour la première fois par Alan Kay et Adele Goldberg, que l’ordinateur est un méta-médium, c’est-à-dire un média capable de simuler tous les autres. Que pouvons-nous dire d’autre de l’utilisateur ? Dans The Interface Effect, Alexander Galloway relève au passage que l’une des principales dichotomies concernant les logiciels est celle entre l’utilisateur et le programmateur, ce dernier étant celui qui agit et le premier étant l’objet de l’action. Pour Olia Lialina, la condition de l’utilisateur est un rappel de l’existence d’un système programmé par quelqu’un d’autre. Benjamin Bratton précise que « en pratique, l’Utilisateur-Usager [user] n’est pas une sorte de créature, mais une catégorie d’agents ; il s’agit d’un statut au sein d’un système sans lequel il n’aurait aucun rôle ni identité propre [...] l’Utilisateur-Usager est à la fois un initiateur et un résultat ». Aymeric Mansoux et Marloes de Valk ont réfléchi à ce statut :
alors que sur des machines fonctionnant avec UNIX, l’utilisateur a généralement un nom, un domicile et une liste d’autorisations bien définies, avec Android et iOS, l’utilisateur se trouve réduit à un processus aveugle sans nom ni domicile doté d’un identifiant numérique. Christine Satchell et Paul Dourish reconnaissent que l’utilisateur est une formation discursive visant à exprimer la relation entre les humains et les machines. Ils considèrent cependant que ce terme est trop restrictif car, selon eux, l’interaction ne contient pas seulement des formes d’utilisation mais aussi des formes de non-utilisation, comme le retrait, le désintérêt, le boycott, la résistance, etcs. En gardant à l’esprit notre définition de l’action (la capacité à interrompre un comportement et à briser des automatismes), il se pourrait bien que nous parvenions à une conclusion surprenante : au sein d’un système donné, le non-utilisateur est celui qui a le plus de possibilité d’action, davantage que l’utilisateur normal et même que le hacker. Dans une certaine mesure, cela ne devrait pas trop nous étonner, car souvent, la capacité à refuser (opposer un veto) coïncide avec le pouvoir. Très souvent, la possibilité même de briser un comportement ou de ne pas l’adopter au départ traduit un certain privilège. Nous pensons par exemple aux PDG des grandes entreprises technologiques qui remplissent l’emploi du temps de leurs enfants avec des activités pour les tenir éloignés des réseaux sociaux.

Fourmis

Dans son essai, Olia Lialina relève que l’utilisateur existait avant les ordinateurs tels que nous les concevons aujourd’hui. Il occupait l’esprit de ceux qui imaginaient à quoi des machines informatiques pourraient ressembler et quel serait leur lien avec les humains. Ces personnes se préoccupaient déja des problèmes liés à l’agentivité, à l’action et au comportement. Une distinction qui peut être reliée à des notions d’action et de comportement relève de la pensée créative et répétitive, cette dernière étant exposée à la mécanisation. On retrouve cette distinction chez Vannevar Bush.

En 1960, le psychologue et informaticien J.C.R.Licklider, anticipant ainsi l’un des éléments au cœur de la critique de Ivan Illich, a remarqué que l’automatisation voulait très souvent dire que des gens devraient être présents pour aider la machine au lieu de se faire aider par elle. En fait, l’automatisation était et est toujours souvent une demi-automatisation, ce qui fait qu’elle n’atteint pas le but recherché. Ce scénario de semi-automatisation produit tout juste des « hommes prolongés mécaniquement ».
Le modèle opposé à celui-ci est celui que Licklider nomme « Symbiose Homme-Ordinateur », une véritable « interaction coopérative entre les hommes et les ordinateurs électroniques ». L’Homme Prolongé Mécaniquement est un modèle comportemental car les décisions, qui précèdent les actions, sont prises par la machine. La Symbiose Homme-Ordinateur est un peu plus complexe : l’action semble résider dans la boucle de feedback évolutive entre l’utilisateur et l’ordinateur. La Symbiose Homme-Ordinateur est censée « permettre aux hommes et aux ordinateurs de prendre ensemble des décisions et de contrôler des situations complexes sans dépendance inflexible ni programmes prédéterminés ». Le comportement, entendu comme un travail administratif et routinier, serait laissé aux ordinateurs et l’activité créative impliquant plusieurs niveaux de prises de décision serait partagée entre l’homme et la machine.

Le travail novateur d’Alan Kay sur les interfaces est guidé par l’idée selon laquelle l’ordinateur devrait être un outil plutôt qu’un véhicule et sa fonction non prédéfinie (comme celle de la voiture ou de la télévision) mais reformulable par l’utilisateur (comme dans le cas du papier ou de l’argile). Kay considère que l’ordinateur doit être un outil à tout faire. Il a aussi élaboré la notion de littératie informatique [computer literacy], c’est-à-dire la capacité à lire le contenu d’un outil (les outils et les contenus générés par d’autres) mais aussi celle d’écrire dans un médium. Écrire dans le médium informatique, selon lui, ne se résume pas à la production de contenus mais inclut aussi celle d’outils. Pour Kay, il s’agit de la véritable littératie de l’outil informatique : « Dans le cas de l’écriture sur un support classique [print writing], les outils que vous générez sont rhétoriques ; ils prouvent et ils convainquent. Dans le cas de l’écriture informatique, les outils que vous générez sont des processus : ils simulent et ils décident ».

Plus récemment, Shan Carter et Michael Nielsen ont créé le concept « d’augmentation de l’intelligence artificielle », à savoir l’utilisation de systèmes d’IA pour augmenter l’intelligence. Au lieu de limiter l’utilisation de l’IA à l’externalisation cognitive, elle servirait aussi à la transformation cognitive. Dans le premier cas, l’IA agit « comme un oracle, capable de résoudre un large éventail de problèmes bien mieux qu’un humain » ; dans le deuxième, elle change « les opérations et les représentations dont nous avions l’habitude ».

Pendant des décennies, l’action de l’utilisateur était synonyme de liberté par rapport à un comportement prédéterminé, de capacité à programmer la machine au lieu d’être programmée par elle, de prise de décision, de coopération, d’abandon de la répétition et d’autonomie fonctionnelle. Ces valeurs et les problèmes qui découlent de leurs limites existaient déjà depuis les débuts de la science qui a lancé le développement des ordinateurs. L’une des plus grandes peurs de Norbert Wiener, le père fondateur de la cybernétique, était le fascisme. Par ce mot, il ne faisait pas référence au type de pouvoir charismatique en place pendant les régimes dictatoriaux historiques, mais à quelque chose de plus subtil et large. Pour Wiener, le fascisme était « l’usage inhumain d’êtres humains », un monde prédéterminé, un monde sans choix, un monde sans action. Voici la description qu’il en fait en 1950 : « Chez les fourmis, chaque ouvrière remplit des fonctions propres. Il peut y avoir une caste séparée de soldates. Certains individus hyper spécialisés ont les fonctions de roi et de reine. Si les humains devaient adopter ces règles de vie en communauté, ils vivraient dans une société fasciste, dans laquelle, idéalement, chaque individu est conditionné à la naissance à effectuer certaines tâches, et dans laquelle les dirigeants seront toujours des dirigeants, les soldats des soldats, les paysans jamais plus que des paysans et les ouvriers seront condamnés à être des ouvriers. ».

En fait, le fascisme que craignait tant Wiener était le féodalisme. Sa description était celle d’un monde dépourvu de choix, où l’utilisation - l’exécution par quelqu’un d’une fonction prédéterminée - devient du pur labeur, et la non-utilisation devient impossible. Le fascisme se présente comme la prévention de la non-utilisation.

Cliquer, faire défiler, mettre en pause

L’impraticité est un savoir-faire automatisé, des connaissances transformées en procédure silencieuse, une batterie de décisions prises à l’avance pour le compte de l’utilisateur. Souvent, ce type de facilité va de pair avec la suppression de la friction, c’est-à-dire des décisions pénibles qui interrompent un comportement. Prenons par exemple un ensemble d’éléments présentés sur plusieurs pages numérotées, comme les résultats d’une recherche Google ou DuckDuckGo. Dans ce contexte, les utilisateurs doivent consciemment cliquer sur un bouton pour afficher la page de résultats suivants. C’est une forme d’action minimale et donc de friction. Faire défiler des résultats de façon infinie, une technique interactive utilisée notamment par Google Images ou Reddit, supprime cette friction.

L’action consciente de tourner des pages est transformée en comportement fluide et homogène. Pourtant, ce type d’interaction semble quelque peu démodé. Faire défiler manuellement une page web infinie semble imparfait, accidentel, temporaire si ce n’est déjà vieillot, étrange même pour certains : c’est un geste mécanique qui correspond aux besoins et à la structure de la liste. C’est comme tourner une molette pour écouter la radio. C’est un automatisme qui n’a pas encore été automatisé. Cet automatisme ne produit aucun événement (comme cliquer sur un lien) mais module un rythme : c’est de l’analogique et non du numérique. Prenez par exemple le playlists de YouTube qui sont reproduites de façon automatique, ou les stories Instagram (un modèle qui vient de Snapchat et qui a été repris par Facebook et Twitter), où le comportement s’inverse : l’utilisateur n’alimente pas la machine, mais la stoppe de temps en temps. En mode playlist, « l’interaction active » (un pléonasme en théorie seulement) est une exception.

Nous sommes ici témoins d’une progression analogue à celle de la révolution industrielle : d’abord, certaines tâches n’ont simplement aucun lien entre elles (hyperliens et pagination, préindustriel), puis elles sont organisées de manière à demander du travail manuel et mécanique (défilement infini, industriel), avant d’être entièrement automatisées et de ne demander qu’une simple supervision (stories et playlists, usine connectée). Pagination, défilement infini, playlist. Manuel, semi-automatique, entièrement automatique. Clic, défilement, pause.

Le philosophe français Bernard Stiegler s’est intéressé à la notion de prolétarisation : selon lui, un prolétaire n’est pas simplement dépossédé de la forme et des fruits de son labeur, mais aussi et surtout de son savoir-faire. Les utilisateurs sont privés de la richesse et de la particularité de leurs gestes. Ces gestes sont ensuite reconfigurés pour correspondre à la logique du système avant d’être rendus complètement inutiles. L’action non-consciente de faire défiler est semblable à l’opération répétitive d’assemblage des pièces d’un produit dans une usine. L’ouvrier ne quitte pas son poste et l’utilisateur ne quitte pas la page. Les deux comportent un mouvement sans relocalisation. De plus, dans l’usine, les machines sont organisées selon un savoir-faire industriel qui en fait le seul à véritablement comprendre les relations fonctionnelles entre les pièces. Comment nommer un système informatique organisé comme une telle usine ? Nous pouvons l’appeler plateforme et la définir comme un système qui extrait et qui standardise les décisions de l’utilisateur avant de les rendre inintelligibles et immuables. Dans la plateforme, des algorithmes obscurs représentent la logique qui organise les données en listes qui sont ensuite présentées à l’utilisateur. L’usine-plateforme est intelligente et dynamique, l’utilisateur-ouvrier est rendu stupide et statique.

Hyperlinéarité

Oui ne s’est jamais aperçu qu’il révassait tout en faisant défiler du contenu ? Stiegler, appuyant la théorie du critique d’art Jonathan Crary, soutenait que les nouveaux environnements prolétarisés ont tendance à éliminer « ces intermittences qui sont les états de sommeil et de rêverie ». Pour le moment, il semble tout de même que l’attention, bien que menacée, n’a pas encore rendu les armes, et donc que lintermittence est encore possible. Un territoire qui relèverait complètement du comportement, avec sa répétitivité anesthésiante, pourrait en fait être idéal pour se perdre dans ses pensées. Tandis que le comportement se déroule sur l’écran, le contenu brouille la vision et l’action se déroule intérieurement. Ceci pourrait s’appliquer à l’interactivité prolétarisée. Après tout, la plupart des gens font des pauses dans leur travail cognitif en faisant défiler des fils ou en regardant des stories.

L’interactivité prolétarisée est hyperlinéaire. L’une des caractéristiques les plus typiques de la chaîne de montage (assembly line) est, comme son nom l’indique, la linéarité. L’équivalent en information de la chaîne de montage est la liste. Les ordinateurs, tant autonomes qu’organisés en réseaux, ont souligné, au début, la possibilité d’interrompre la linéarité de la liste, une qualité héritée de la presse d’imprimerie.

L’e-littérature a fêté cette révolution. Des romans concus avec HyperCard sont apparus, avec leurs multiples chemins sans origine unique ni conclusion. L’Internet des débuts pouvait être vu comme un hypertexte collaboratif géant. Tout maintenir ensemble constituait l’hyperlien, la pierre angulaire de la non-linéarité. Mais la non-linéarité (ou multilinéarité) demande une charge cognitive plus élevée, car la navigation ne se fond pas dans le décor.

L’utilisateur doit prendre de nombreuses décisions qui sont mises en œuvre par des clics. Avec le Web 2.0, les pages Internet sont devenues plus dynamiques, plus interactives, mais aussi davantage liées au comportement. La multilinéarité a été vaincue par une envie de praticité alimentée en Ajax, le résultat était l’hyperlinéarité. L’hyperlinéarité est la linéarisation en réseau de contenus, de sources et d’activités disparates dans des listes : photos personnelles, articles, discussions, sondages, publicités, etc. Bien sûr, un utilisateur peut toujours cliquer pour sortir, mais cela ressemble plus à du zapping sédentaire qu’à une exploration active de l’espace organisé en réseau. De Facebook à Instagram à Reddit, et on recommence. Voilà le zapping hyper-linéaire, particulièrement visible dans la structure compartimentée des ordinateurs mobiles.

Netstalgie

De nos jours, on est nostalgique du bon vieux Web, de l’énorme ordinateur de bureau, du modem 56k et de ses bruits stridents. Nous vivons dans une époque de « netstalgie ». Cette ère de la nostalgie du Net existe peut-être même depuis une décennie. Les preuves sont nombreuses : succès de la notion déroutante de web design brutaliste, création de réseaux comme Neocities en 2013 et Tilde. Club en 2014, métaphores jardinières appliquées aux sites Internet, création d’un groupe aux principes new age vénérant « l’énergie HTML ». En 2015, l’artiste et écrivain J.R. Carpenter a employé « le terme "web fait main" (« handmade web » pour suggérer que la lenteur et une taille réduite [entre autres] étaient des formes de résistance. »

« Mais de quoi sommes-nous exactement nostalgiques ? La netstalgie a moins a avoir avec une esthétique particulière ou le symbole d’un âge de l’innocence (the internet was never innocent), qu’avec l’époque idéalisée par la mémoires à laquelle la contrepartie de la commodité n’était pas aussi stricte. Une époque à laquelle le « fardeau de la conception du système et de ses caractéristiques » ne semblait pas si lourds parce qu’il n’existait rien de plus rapide auquel le comparer, et parce que le mode speedrun n’était pas le mode par défaut de l’informatique. Tous ces aspects constituaient une expérience véritablement personnelle. »

Le risque, avec la netstalgie, est d’encourager le malentendu selon lequel, pour échapper au mode speedrun et à l’incommodité, il faut revenir au HTML à la main, sans aucune automatisation ni programmation. Conséquence d’un tel quiproquo : la « friction » est glorifiée, les choses qui ne fonctionnent pas ou qui prennent trop de temps sont bonnes parce qu’elles sont censées provoquer une épiphanie au cours de laquelle les interfaces lisses seraient démystifiées.

Ne vous méprenez pas : j’aime le HTML. Je suis capable d’apprécier un site tout simple fait main. Je comprends l’attrait de médias pauvres. Mais j’aime aussi voir un ordinateur commettre 10 000 fois la même erreur après lui avoir demandé de la faire via un programme (vérifier la console). Un certain degré d’automatisation est généralement intégré dans les outils que nous utilisons pour créer des sites faits main. Nous n’allons quand même pas refuser la saisie automatique pour sauvegarder le véritable DIY ? Je pense que nous ne devrions pas faire l’éloge de la friction simplement pour la friction, parce que la friction, en elle-même, est juste la frustration de l’utilisateur. Il faut que nous soyons capables de reconnaître l’élégance et de générer une praticité autonome pour nous-mêmes. Nous ne devrions pas nier la capacité de l’ordinateur à prendre des décisions à notre place, mais simplement savoir comment de telles décisions sont prises. La programmabilité est toujours au cœur de l’informatique, et c’est là que nous trouvons la véritable maîtrise de la lecture-écriture informatique.

D’une certaine façon, la netstalgie fait déjà allusion à cela. Étymologiquement, la nostalgie signifie la douleur causée par le fait de ne pas pouvoir rentrer chez soi. Le concept de chez-soi est crucial. En effet, nous organisons les choses chez nous de manière à créer nos routines (certains diraient programmer notre comportement). Ces routines apportent de la stabilité et de la longévité à notre vie de tous les jours. Vous vous rappelez du grille-pain? La netstalgie pourrait alors être la nostalgie d’un comportement informatique non prédéfini ou d’un ordinateur comme logement non meublé à l’avance.