Introduction

« C’est fou de se dire qu’il faille qu’on se mette à quinze pour qu’on nous écoute enfin. » avait lâché il y a plus d’un an ma collègue Enora, face à nos employeurs de la communauté d’agglomération. Nous étions au beau milieu de la réunion faisant suite au courrier que les quatorze autres sauveteuses du centre aquatique et moi leur avions envoyé pour dénoncer le sexisme omniprésent sur notre lieu de travail. Ce jour là, plus que par les violentes réactions des fautifs et de leurs amis, j’ai été particulièrement marquée par le fait d’expérimenter par moi-même la force de la sororité et de l’esprit #MeToo, qui me faisaient prendre la mesure de l’influence de la 4e vague féministe sur nous. La quinzaine de sauveteuses à peine majeures que nous étions avions réussi à nous opposer à l’ensemble du staff masculin titulaire et en majorité doublement (voire triplement) plus âgé, à nous approprier la parole et à détourner les violences que nous subissions contre nos harceleurs. Nous sommes parvenues à nous unir pour rassembler les paroles violentes qui ont ponctué notre été afin de dénoncer ces agissements. Mais celà, nous ne l’aurions jamais fait, je n’en aurais jamais eu l’idée, sans avoir au préalable été sensibilisée au sujet du féminisme, à travers mes lectures certes, mais surtout grâce à l’ensemble des représentations visuelles que j’ai pu rencontrer. Jamais je n’aurai découvert, par exemple, le manque de diversité de mes créations sans avoir suivi le travail des illustratrices féministes sur Instagram comme Marie Boiseau, Ines Des ou Pénélope Bagieu, tout comme je ne me serais jamais intéressée à la notion de charge mentale expliquée dans les bandes dessinées d’Emma, qui a complètement bouleversé la façon dont je percevais mes parents.

J’ai eu maintes fois l’occasion de voir des féministes s’approprier des discours, des images ou des espaces et les exploiter visuellement pour dénoncer les violences qu’elles subissent. Au fil du temps, je suis donc devenue de plus en plus sensible à cette notion au sein des productions graphiques féministes de mon époque.

L’appropriation se définit en général par « le fait d’adapter quelque chose à une utilisation définie, c’est à dire de rendre propre à un usage ou à une destination1 » mais elle désigne également, et c’est la définition que je retiendrai, « l’utilisation d’objets ou d’images préexistants avec peu ou pas de transformation2 ». C’est d’ailleurs cette même seconde définition qui fut énormément exploitée dans le monde de l’art contemporain notamment par le courant appropriationniste des années 60 à 70. Des œuvres comme les Truisms de Jenny Holzer (1977), Flowers d’Elaine Sturtevant (bien qu’elle récuse cette étiquette) reproduisant en 1968 le célèbre tableau d’Andy Warhol, ou encore la série photographique Untitled Film Stills de Cindy Sherman (1977–1980) offrent un bel aperçu des problématiques qu’elles soulèvent. On parlerait aujourd’hui surtout d’art d’appropriation pour désigner toutes ces créations issues du détournement ou de l’emprunt d’œuvres antérieures. Avec le web, la pratique de l’appropriation dans la création s’est répandue pour exploiter de plus en plus d’éléments de notre quotidien, désignant « les œuvres qui dupliquent ou transforment les images diffusées par les médias de masse3. » Ces médias de masse de notre époque que sont internet et les réseaux sociaux ont pris un immense essor à partir de 2005 et ont permis aux internautes de diffuser les contenus qu’ils souhaitaient de façon quasi continue. Les réseaux se sont alors remplis de créations se reprenant, se détournant et s’appropriant les unes les autres dans le but de prétendre à la plus grande viralité possible. C’est quelque chose que les militant.e.s féministes ont parfaitement compris et su exploiter. Ainsi, de la même façon que chaque vague féministe précédente fut accompagnée de l’apparition d’un nouveau média, la 4e vague n’échappe pas à la règle en marquant dans la culture des médias sociaux ce qui la caractérise.

Mais l’appropriation est-elle réellement un outil de développement pour le design graphique millitant de la 4e vague féministe en France ? En quoi le langage graphique est-il un vecteur d’affirmation du pouvoir des fxmmes ? De quoi se compose ce langage militant ? Existe-t-il un langage graphique propre à l’appropriation ? Comment se mèle-t-il aux potentiels codes et références du design millitant féministe ?

Pour répondre à ces interrogations, nous nous intéresserons tout d’abord à comment l’appropriation, au sein du design graphique contemporain, permet aux fxmmes de faire entendre leurs voix. Nous verrons comment, à l’aide de la réappropriation ou du détournement, elles parviennent à faire exister leurs récits au sein des formes de langages et de figuration, ainsi qu’aux diverses manières dont elles sont parvenues à s’approprier les mots, qu’ils soient typographiques ou porteurs de sens. Ainsi, à travers cette reconquête de la langue et de l’alphabet, je souhaite dans un premier temps traiter de l’appropriation des mots par le design graphique féministe comme vecteur de sens et de vécus, puis, dans un second temps, les utilisations qui en sont faites pour détourner les stéréotypes. Ensuite, nous verrons que le design graphique peut aussi constituer un vecteur d’appropriation du paysage visuel présent comme passé. D’abord, il permet la réappropriation des histoires de fxmmes et du féminisme, les donnant à voir pour sensibiliser le grand public. Enfin, beaucoup des mécanismes d’oppression des fxmmes passant par leurs mauvaises représentations, l’un des enjeux majeurs du design graphique de la 4e vague est donc de proposer de nouvelles représentations.

C’est la journaliste Martha Weinman Lear qui introduit pour la première fois la notion de « vague » dans un article du New York Times de mars 1968 pour permettre de synthétiser historiquement et théoriquement le mouvement féministe.

Se déroulant approximativement de 1850 à 1945 en Europe et aux États-Unis, la 1re vague féministe a pour objectif de militer pour l’accès au droit de vote (qui marquera sa fin) ainsi que d’autres droits fondamentaux. Les revendications des suffragistes4 se diffusent dans les gros titres et les photos de la presse populaire, alors en plein essor.

S’en suit la 2e vague qui s’étend, quand à elle, de la fin des années 60 aux années 70 et se concentre sur le tabou de la sexualité, la place de la femme dans la famille, les violences conjugales ainsi que le viol. Elle est marquée en France par le discours de Simone Veil sur l’IVG à l’Assemblée Nationale le 26 novembre 1974, le combat de l’avocate Gisèle Halimi pour l’affaire Tonglet-Castellano (le « procès du viol »)5, mais aussi par les campagnes d’affiches du MLF et du Planning Familial qui tentent d’informer le public sur l’accès à la contraception et militent pour l’accès à l’avortement. Les millitant.e.s explorent également le média vidéo ainsi que la presse magazine pour diffuser leurs idées6.

La 3e vague se déroule ensuite entre les années 80 et 90. Les féministes y réclament une plus grande diversité des représentations grâce à une meilleure visibilité des lesbiennes, des noires, des handicapées, etc. On voit la notion d’intersectionnalité prendre de plus en plus de place dans le combat féministe aux côtés d’un meilleur investissement de l’espace médiatique sous forme de sites grâce à la démocratisation d’Internet à partir de 1995. Cette période voit naître de nombreux collectifs, fanzines et blogs internet qui partagent les créations visuelles des militant.e.s. L’une des plus connues est la fameuse bannière « Les femmes doivent-elles être nues pour entrer au Met. Museum ? » (« Do women have to be naked to get into the Met. Museum »), créée par les Guerilla Girls en 1989. La 4e vague se place quelque part en continuité de ce qu’à construit le cyberféminisme de la troisième vague sur internet, nous y reviendrons.

Mentionnée dès 2005 par la journaliste Pythie Peay dans un article dans lequel elle la décrit comme axée sur la justice sociale et les droits civils, la 4e vague est souvent dite débuter en 2017 avec la déferlante #MeToo. Marquée par la massification des médias sociaux, ses sujets de prédilection sont le harcèlement au sens large ainsi que la culture du viol. Elle s’inscrit à la fois en continuité et en contradiction des vagues féministes précédentes. En son sein, les militant.e.s parviennent à s’approprier les images et les mots de l’époque pour lutter pour la cause. Plus généralement, nous observerons comment le design graphique des vagues féministes précédentes se sont poursuivies ou non au sein de l’actuelle ainsi que les nouvelles formes militantes qui ont émergé avec l’utilisation des médias sociaux et d’Internet. Affiches, web, motion design, éditions, videos, photographies, nombreux sont les moyens d’exploiter la notion d’appropriation au sein du design graphique contemporain.

Changer le langage par le design

« Afin de permettre aux femmes de prendre la place qui leur est due dans l’espace public, il faut d’abord leur donner l’occasion de dire “je”. Je veux marteler cette idée, car c’est une grille de lecture qui permet de comprendre tout le mouvement féministe actuel. #MeToo, c’était ça. C’était dire “moi”, c’était dire “je”7. »

Le design graphique féministe utilise les mots pour faire exister des récits et des formes dans l’espace public qui sont souvent omis par les médias traditionnels. Comme a si bien su le formuler Marie Dasylva8 sur la scène de Présent.e.s au Carreau du Temple : « On prend du pouvoir quand on commence à raconter nos histoires. […] Dans tout mécanisme d’oppression, il y a cette idée d’être privé de la possibilité d’énoncer soi-même son identité »9. Ainsi, l’un des enjeux majeurs de la 4e vague, comme du féminisme en général, est de redonner le pouvoir de la parole aux femmes et aux minorités afin de diversifier les points de vue du paysage visuel français. C’est ce qui m’a incitée, ce 31 août 2020 au centre aquatique, à prendre mon portable et mon courage à deux mains pour créer un groupe réunissant l’ensemble de mes collègues sauveteuses, pour leur proposer de faire quelque chose. Et toutes, sans exception, ont répondu présentes. Nous avons rédigé ensemble un courrier de trois pages listant de manière non-exhaustive les remarques et comportements que nous avions eu à subir au cours de notre été.

Le design des messages

« Tout à coup, avec cette parole et avec mille autres, on pressentait à quel point le monde vu par les femmes est différent du monde que l’on nous vend tous les jours10 ».

Il est crucial pour le mouvement féministe de la 4e vague de s’approprier les mots afin de reprendre possession des récits. En cela, le design graphique constitue un outil précieux pour faire de nous à la fois les conteuses et les héroïnes de nos histoires. Ayant trop longtemps attendu qu’on leur laisse un peu de place, les féministes de la 4e vague n’attendent pas qu’on leur donne la parole : elles la prennent. Cette habitude a majoritairement été rendue possible et exacerbée par l’apparition du web et des médias sociaux comme outils de lutte. Grâce à ces médias horizontaux, les militant.e.s ont pu accéder à la parole publique sans avoir à dépendre de ce que Dominique Cardon nomme dans son livre11 les gatekeepers, les gardiens du filtre médiatique. Saisissant l’opportunité de s’exprimer sans passer par des professionnels, les féministes publient leurs pensées sur internet sous différents aspects.

Ainsi, en 2012, c’est sous forme de blog qu’Anaïs Bourdet a fourni aux fxmmes francophones un espace mettant en lumière la violence du harcèlement de rue. Récoltant et publiant les phrases entendues par les fxmmes victimes des harceleurs, Paye Ta ShnekPaye Ta Shnek, Anaïs Bourdet, 2013 constitue un moyen de raconter ces mots souvent écœurants, bien trop imagés, et pourtant si courants pour les exposer à la vue de tous. Tout comme le courrier que les sauveteuses et moi avions rédigé, le blog et l’édition de Paye Ta Shnek sont dépourvus de commentaires, se contentant de citations suivies d’une localisation. « Tu suces pour un Kinder ? » à Montpellier, rue de Verdun, « Yo, toi, j’te la glisse bien entre les cuisses. » à Rennes, rue des Fossés, ou encore « Monte sur ma tour, tu verras ta maison » à Strasbourg. Leur simple énumération et accumulation, presque scientifique, par catégories est très impactante et glaçante . Aucune illustration, aucune annotation, simplement le harceleur et sa perversité mis en lumière. Seuls, dans une fonte linéale imprimée en bleu ou rose sur fond blanc, ces mots nous frappent par leur violence.

On constate le même effet lorsque les colleur.euse.s féministes collent depuis 2019 les noms des fxmmes victimes de féminicides sur les murs des villesCollage dans une rue de Paris, photographie par Margaux Stive pour RadioFrance, 2020. Lire le nom de ces personnes ainsi que les circonstances dans lesquelles elles ont été assassinées par leur conjoint, informations relevant du domaine « privé », viennent se confronter à l’espace public qu’est la rue. Les lettres sont écrites en majuscule à la main, une par feuille A4 et on ne peut s’empêcher de penser en les voyant que c’est peut être des membres de la famille de la victime qui les ont faites pour lui rendre un dernier hommage. Ainsi, l’esthétique bricolée et manuelle des slogans des Collages Féministes permet une transmission plus efficace des messages. Ces vécus de fxmme incrits illégalement sur les murs des villes de France permet non seulement de dire aux personnes problématiques « on vous voit » mais également de dire aux autres victimes et aux autres fxmmes « Tu n’es pas seule, le problème ce n’est pas toi. » Les colleur.euse.s s’approprient aussi les violences subies par les fxmmes pour les recycler et en faire le fer de lance de leur combat. Elles empêchent les noms des victimes de tomber dans l’oubli en l’imposant à la vue de tous. D’abord intrigué ou choqué, le public a fini par reconnaître l’esthétique caractéristique des collages qui se sont répandus dans toutes les agglomérations françaises. Le mouvement des Collages s’est par la suite complexifié avec des slogans de plus en plus divers dans son approche du féminisme en s’étendant au sujet du harcèlement de rue, de la culture du viol, la transphobie et l’homophobie, etc. Se coordonnant sur les réseaux sociaux, par villes, et publiant les résultats des sessions sous forme de photos sur Instagram, les membres de ces collectifs s’empruntent continuellement les slogans pour par la suite les réinterpréter. Cela confère une concordance à l’intégralité du mouvement tout en lui permettant d’évoluer. C’est cette violence d’exécution et cette spontanéité qui m’ont percutée lorsque je voyais leurs réalisations circuler sur les réseaux sociaux.

C’est finalement les illustrations de Blanche Sabbah et les photographies de Tay Calenda qui m’ont profondément touchée en offrant leur point de vue sur les colleur.euse.s, notamment parisiennes, et leurs actions. Les séries de Tay CalendaColleuses parisiennes, Tay Calenda, 6 avril 2020Tay Calenda, 12 mai 2020 sont remplies de sororité et j’ai senti en les découvrant que je touchais enfin à une communauté qui me comprend. L’illustration La révolution sera féministe ou ne sera pasLa révolution sera féministe ou ne sera pas, Blanche Sabbah, 4 mai 2020 postée sur Instagram par Blanche Sabbah (@lanuitremueparis) m’a finalement convaincue et je me suis jointe aux colleur.euse.s palois⋅es en 2020. Intégrer ce mouvement constitue aussi un outil incroyable d’empowerment puisqu’il s’agit pour les fxmmes de se ré-approprier, non seulement l’espace public, mais aussi le monde de la nuit. Arpenter les rues de la ville plongées dans l’obscurité aux côtés de nos adelphes procure la sensation de s’approprier enfin des espaces dans lesquels fxmmes et minorités ne sont pas souvent les bienvenu.e.s. Les lettres que nous collons alors sur les murs deviennent des traces et des preuves de notre passage et de notre légitimité à nous y trouver. Ces mots et ces slogans ont un impact et une résonance indéniable au sein de la société, positive comme négative. Il arrive que nous soyons applaudi.e.s lorsque nous collons ou que nous soyons insulté.e.s voire agressé.e.s. On nous reproche de passer par l’illégalité et le vandalisme pour raconter nos histoires « sans intérêt ». Mais quelle meilleure preuve de leur importance que l’acharnement de nos opposants à les arracher des murs ? Ces lettres pourtant si simples les dérangent tellement qu’ils essaient de nous empêcher de les faire exister, en les faisant disparaître ou en tentant de nous dissuader de les créer par la peur. Pourtant, nous les refaisons, inlassablement, recouvrant et arrachant au passage les créations graphiques de la Manif Pour Tous. Le design graphique constitue alors le nerf de cette guerre d’affichage. Devenant, entre les Colleur.euse.s et les groupes à pensées conservatrices, un vecteur de provocation et de riposte.

Ces deux dernières notions, « caractéristiques des stratégies des fxmmes rebelles de la 4e vague12 », sont également visibles sur le web où se mettent en place la force du partage, du hashtag et des liens faibles. Théorisé en 1973 par le sociologue Mark Granovetter, Le Pouvoir des liens faibles distingue deux types de liens entre les individus sur les réseaux sociaux : les liens forts (relations stables comme la famille ou les amis, les institutions, etc) et les liens faibles (un réseau fluide de contacts occasionnels, forgé au gré des rencontres et des échanges). Ces derniers permettent aux individus l’accès à plus d’informations dans la mesure où les personnes dont ils sont éloignés évolueront dans des cercles sociaux très différents de leur zone de confort. Dans son article Les armes numériques de la nouvelle vague féministe, Divina Frau-Meigs explique très bien comment, par « une pratique militante distribuée et collective », la 4e vague féministe « joue de la réciprocité des liens faibles, en faisant appel à des influenceurs et influenceuses capables d’en mobiliser d’autres ». Usant de leur notoriété, des stars comme l’actrice Adèle Haenel ou l’autrice Virginie Despente « parlent en cascade » en racontant leurs histoires et incitent ainsi d’autres stars ou des inconnu.e.s à faire de même.

Conscient.e.s de leur notoriété et de l’importance de communiquer sur leurs actions, les militant.e.s des Colleur.euse.s soignent leur image en ligne en publiant des photos parfois unifiées par la même intention graphique. Le compte des Colleur.euse.s de Pau, par exemple, forme ainsi un feed entier de prises de vue en noir et blanc. Leurs comptes publics comportent souvent un logo créé par l’un.e de leurs membres et partage régulièrement les œuvres des groupes d’autres villes ou d’autres collectifs. Les colleur.euse.s sont d’ailleurs particulièrement représentatif.ves de la nouvelle génération de féministes dans la mesure où iels sont en majorité natif.ve.s d’internet. En effet, iels comprennent et maîtrisent parfaitement les enjeux des réseaux sociaux et ont souvent appris à maîtriser les outils numériques en autodidacte.

C’est ainsi que la 4e vague féministe a vu émerger un nouveau profil de militante : celui de la communiquante13. Prenant possession des outils d’autopublication et de partage, cette dernière exploite l’architecture horizontale d’Internet pour s’affranchir des décideurs traditionnels de ce qui existe dans l’espace public. Très sensible au visuel, les médias sociaux favorisent les profils de personnes capables de créer du contenu pensé graphiquement. On voit alors les féministes développer des militantismes en et hors ligne qui se répondent et s’entrecroisent. Là où les combats de la 1re et la 2e vague se faisaient exclusivement dans la rue et la presse, la 3e et surtout la 4e vague mènent une lutte à double front pour faire exister les récits de fxmme dans l’espace public physique comme virtuelFiches pédagogiques, Gang du Clito, 2020. L’artiste, autrice et militante Julia Piétri incarne en ce sens parfaitement le profil de la communiquante. Fondatrice du Gang Du Clito et des éditions féministes Better Call Julia, elle crée et met à disposition sur le site internet du collectif des affiches et des fiches pédagogiques sur le clitoris. Apparu dans les manuels scolaires pour la première fois en 2018 seulement, cet organe sexuel féminin souffre beaucoup de l’ignorance et de la désinformation à son égard. Malheureusement on se contente bien trop souvent de dire aux petites filles qu’elles ne possèdent qu’un « trou » entre les jambes tandis qu’on donne un cours et des schémas détaillés du pénis aux élèves de quatrième. C’est à cela que Julia Piétri tente de remédier en laissant sa célèbre série d’affiches It’s not a bretzelIt’s not a bretzel, Gang du Clito, 2020, dont on notera la référence à La Trahison des images de René Magritte, en téléchargement libre au même titre que les fiches pédagogiques. Julia Piétri permet ainsi à n’importe qui d’imprimer ses créations pédagogiques et d’en faire un affichage sauvage au cœur de la ville pour imposer ces mots dans l’espace public. Les couleurs voyantes ainsi que le design dynamique et illustré des affiches attirent le regard du passant distrait. Autour des schémas viennent graviter des mots comme « bulbe », « pilier », « gland » du clitoris ou encore « corps caverneux érectile », termes trop souvent occultés des manuels scolaires. Ainsi, la militante parvient à raconter une part très importante de la sexualité des fxmmes et à communiquer à son sujet pour lutter contre la désinformation notamment chez les prochaines générations.

Là où It’s not a bretzel lutte pour la démocratisation des représentations scientifiques des corps et des organes sexuels féminins, la campagne d’affiches sauvages couplée au hashtag #AutriceDansleDico utilise le design graphique pour traiter de la visibilisation des fxmmes au sein même de la langue française. Il est en effet difficile de les mettre en lumière, dans leurs pensées comme dans leur physicalité, sans pouvoir les nommer ni les connaître. #AutriceDansleDico#autricedansledico, Auteur.rice inconnu.e, Octobre 2019 se donne à voir autant dans la rue que sur Internet. Imprimés en réserve de blanc et encre noire sur un fond fluo en ton direct, seuls quatre mots y sont inscrits dans une police scripte. Le mot autrice, féminin de auteur, est mis en parallèle avec le couple acteur/actrice, utilisé au quotidien dans la langue française afin d’en légitimer l’existence. Pourtant inventé à la Renaissance et possédant des origines étymologiques latines remontant jusqu’au 1er siècle de notre ère14, le mot autrice est le fruit d’un débat de grammaire depuis des siècles. Beaucoup considèrent le mot auteure comme le réel féminin d’auteur mais la plupart des féministes ont tendance à lui préférer autrice dans la mesure où ce dernier marque davantage le féminin dans la phrase. C’est encore une fois une question de visibilisation des fxmmes traduit par ce poster qui vient imposer l’existence de ce mot féminin à la vue de tous. Malgré le nombre de gens en niant encore l’existence, ces affiches imprimées en série très limitée, collées à la va-vite, trônaient sur le mur proche d’une célèbre maison d’éditions. Leur simple existence dans cet espace public, loin d’être choisi au hasard, aura suffit à succiter une prise de parole de la part de la maison d’éditions sur les réseaux sociaux, arguant être l’un des seuls distionnaires français à mentionner le mot « autrice ». Passer par l’espace public palpable qu’est la rue permet alors aux millitant.e.s féministes d’introduire ce genre de sujets au cœur du débat public virtuel, et inversement.

On retrouve souvent dans la 4e vague cette importance de nommer les choses pour enfin briser les tabous et les non-dits qui font tant de dégâts. Il est capital de s’approprier notre vocabulaire pour énoncer clairement nos points de vue et nos récits. Et le design graphique est là pour les rendre visibles, ces mots qu’on ne voit pas assez. Il les fait éclater, les valorise tout en les vulgarisant. Ce n’est pas sans évoquer les posts de Camille Aumont Carnel sur son compte à 700 000 abonné.e.s : @jemenbatsleclito@jemenbatsleclito, 14 novembre 2021. Il n’est déjà pas anodin que nous retrouvions le diminutif clito dans son pseudonyme comme dans le nom du collectif du Gang du Clito ou encore la mini-série documentaire et le compte Clit Révolution (120 000 abonné.e.s à ce jour) qui illustre parfaitement cette volonté de démocratiser des termes tabous. Témoignant de l’aspect volontairement provocateur de la 4e vague, les militant.e.s s’amusent des non-dits de notre société en les ignorant ou en les tournant en ridicule. Iels les brisent en livrant librement leurs récits sans avoir à museler leur vocabulaire. La créatrice de @jemenbatsleclito s’est donc fait une spécialité de dire les choses sans passer par quatre chemins. « Péter en levrette », « La p’tite prière interne avant d’utiliser le rasoir pour ta teuch » ou encore « La mouille qui change d’odeur et de goût en fonction du cycle on en parle ? », elle ne s’interdit aucun sujet et les aborde sans aucune gène. Ses posts se présentent tous exactement de la même manière : la même police en majuscules sur le fond uni beige encadré d’un fin liseret rouge les rendent reconnaissable entre mille. Ce design, rendant impactant et original ses publications, confère également une unité graphique à son compte. Les mots qu’elle emploie sont un petit peu « trash » lorsque l’on n’est peu habitué.e mais elle a le mérite de faire un immense travail pour enfin délier les langues. C’est en partie grâce à l’existence de ce compte que mes amies et moi, en grandissant, nous sommes habituées à parler de sujets traditionnellement tabous de manière très crue, nous épargnant de tourner autour du pot. C’est quelque part grâce à @jemenbatsleclito que je réponds naturellement « Je changeais mon tampon » à mes collègues qui me demandent pourquoi j’ai passé cinq minutes aux toilettes au lieu de deux. C’est la répétition de ces posts, toujours semblables, aux réflexions pleines d’honnêteté, qui a permis à beaucoup de jeunes fxmmes de s’approprier le vocabulaire pour parler de leur vécu sans en rougir.

Cela m’évoque l’une des dernières créations d’Anaïs Bourdet, le compte @sissislafamilleApperçu du feed instagram de @sisislafamille, mars 2020, dans lequel elle publie les histoires de sororité que ses abonné.e.s lui font parvenir. Contrairement au compte précédent, les posts ne sont pas tous foncièrement identiques mais, encore une fois, la fonte utilisée ainsi que la mise en page ne varient pas. Seul le camaïeu de couleurs chairs se dégrade pour compléter l’identité visuelle.

Cette notion de gabarit décliné en série est particulièrement usitée par les millitant.e.s féministes sous forme de campagne de communication, autant dans la rue que sur les réseaux sociaux. Bien qu’un peu plus ancienne car datant de 2013–2014, on peut citer la série d’affiches du collectif lesbien OuiOuiOuiCampagne d’affichage pour l’obtention du droit de recours à la PMA pour les couples homosexuels, environ 2013–2014 dans laquelle iels ont utilisé les mots des personnalités politiques pour mettre en exergue le fait que les couples de fxmmes n’ont toujours pas accès à la PMA, contrairement aux hétérosexuel.le.s. Citant mot pour mot les promesses de Najat Vallaud-Belkacem (alors porte-parole du gouvernement), Jean-Marc Ayrault (premier ministre) ou bien Bruno Le Roux (Chef des députés du Parti Socialiste) avec leurs noms et la date à laquelle ils les ont tenues, le collectif se les approprie pour militer. Le design graphique des affiches joue un rôle important dans cette série car les lettres majuscules et la fonte linéale (associée aux créations militantes) couplées aux couleurs du collectif, font sonner ces mêmes mots comme des reproches sans que rien n’y soit ajouté. Le design permet alors à une campagne bien ficelée d’être bien plus impactante que de long discours.

On reproche régulièrement aux militant.e.s féministes, LGBT ou anti-racistes de vouloir imposer leur point de vue dans l’espace public. Je passerai sur l’ironie de faire un tel reproche à des communautés subissant l’omniprésence des dominants dans tous les médias existants au quotidien et j’ajouterai que c’est justement parce que ces points de vue sont absents du grand récit national qu’il est nécessaire de rétablir une notion d’équilibre. Beaucoup stigmatisent ces vécus et ces identités car ils ne les entendent pas.« Je hais les hétéros qui pensent que leurs histoires sont « universelles » mais que nos histoires ne sont qu’à propos d’homosexualité. » […] « Je hais les hétéros qui disent  »Je ne comprends pas pourquoi tu ressens le besoin de porter ces badges et ces T-shirts. Je ne vais pas partout dire au monde entier que je suis hétéro, moi" peut-on lire dans le Queer Nation Manifesto écrit par les millitant.e.s de la branche newyorkaise d’Act Up en 1990. Vous l’aurez deviné, le design graphique se trouve encore au cœur de ces problématiques de revendications. Sur les affiches, les t-shirts, les badges, les blogs, etc, il permet aux militant.e.s de communiquer, d’éduquer et de s’exprimer enfin. La journaliste et millitante Alice Coffin s’est vue refuser l’écriture d’un article à propos du mariage homosexuel en raison de son homosexualité. En effet, elle serait trop « concernée » et ne pouvait donc pas appliquer la « neutralité » exigée d’un.e journaliste. On ne refusera pourtant jamais l’écriture d’un tel article et sur le même motif à un journaliste marchant le dimanche à la Manif Pour Tous. Seule la minorité peut-être biaisée, lorsque seule les dominants placent le curseur de la fameuse neutralité.

Sur l’une des affiches en libre accès sur le site de OuiOuiOui est inscrit : « Homophobes = Ignorants ». L’ignorance, c’est effectivement de cela dont il s’agit, et les millitant.e.s tentent de toutes leurs forces de lutter contre ces a priori. « Je n’ai pas envie que les femmes soient là, pour l’éternité, à raconter leur viol, écrit Lauren Bastide. Je veux qu’on parle avec les femmes de science, de musique, de philosophie ! Mais, avant, il faut que nous ayons cette conversation. Il nous faut remettre dans l’espace public tous ces mots dont nous avons été privées pendant des siècles. » C’est ce que les trois premières vagues féministes avaient entamé et ce que poursuit la quatrième en exploitant les médias papiers couplés aux médias numériques. En plus de leurs histoires, iels tentent, pédagogiquement ou non, de lutter contre les stéréotypes qui se trouvent encore bien trop à la racine de toutes ces violences.

Détourner les formes typographiques

« La première linogravure que j’ai réalisée disait « salopes en colère ». Voilà ce qui est sorti spontanément. Ça m’a fait du bien, […] alors j’ai compris que j’avais trouvé mon truc : me servir de cette violence pour la vider de son sens. Ne pas laisser les autres me définir15 ».

« Nous créons un monde où chacun, où qu’il se trouve, peut exprimer ses idées […] sans craindre d’être réduit au silence ou à une norme. » avait écrit en 1996 l’essayiste John Perry Barlow dans sa célèbre Déclaration d’indépendance du cyberespace. On peut être attendri.e et amusé.e de lire ces mots aujourd’hui, avec le recul que nous avons sur ce qu’est devenu par la suite Internet. Bien que très jolie, cette Déclaration d’indépendance n’en reste pas moins naïve au regard de ce que vivent les fxmmes au quotidien au sein de cet espace qui, d’après les cyberféministes de la 3e vague, constituait la promesse de pouvoir évoluer sans être ramenées à leur genre. Dépourvu d’existence physique, le cyberespace ne connaîtrait ni les corps ni les discriminations.

Cette belle utopie est malheureusement bien loin derrière nous aujourd’hui quand on constate l’ampleur du phénomène de cyberharcèlement dirigé contre les fxmmes et les minorités. Les militant.e.s féministes sont particulièrement touché.e.s par ce phénomène pour la simple et bonne raison qu’iels livrent à la vue de tous les récits de fxmmes sur les réseaux sociaux. Iels se spécialisent alors dans l’art de forcer la discussion autour de ces problématiques à avoir lieu. Iels s’exposent pour lutter contre les stéréotypes mais se heurtent à des centaines de milliers de haters et/ou trolls les insultants et les menançants de viol, de mort, voire les deux. Connue pour le projet Paye Ta Shnek, Anaïs Bourdet a malheureusement fait les frais de ce nouveau produit du patriarcat. Continuellement cyberharcelée depuis des années, elle a trouvé la force de s’approprier les messages de ses haters pour en faire quelque chose de positif.Lot de cinq cartes postales flatteuses, Anaïs Bourdet, 2019 En tant que designer graphique, elle a ainsi récolté les insultes qu’elle recevait, les a traitées graphiquement pour les réinsérer dans le paysage visuel sous forme d’affiches, d’autocollants ou de tote bags sérigraphiés. Elle les revend ensuite dans le cadre du projet Mauvaise Compagnie et en fait bénéficier des associations militant contre le cyberharcèlement, le harcèlement de rue, ou tentant de faire entendre les voix des fxmmes racisées. Pétasse moraliste, Propagande misandre, Femelle ingrate, Dictature clitoridienne, Hystérique radicale ou encore Sorcière vegan : elle s’est approprié toute cette violence pour la recycler et en faire bénéficier la cause, permettant à d’autres millitantes d’arborer fièrement le pin’s Féministe de merdeGrand pins féministe de merde, Anaïs Bourdet, 2019 entouré d’un cœur sur leur sac. Un geste dont on sous-estime l’importance, les femmes ayant eu, pendant des décennies, honte de se revendiquer féministes.

Ce projet s’inscrit ainsi dans la veine de la réappropriation de termes insultants par les communautés discriminées. Un célèbre exemple est celui du mot queer signifiant « bizarre, étrange », employé comme insulte aux États-Unis pour désigner les personnes s’éloignant trop des moules genrés de la société. Par la suite, dans un magnifique pieds de nez aux normes patriarcales, les membres de la communauté LGBT+ se sont réappropriés ce terme pour en faire l’étendard de la fierté des gens anormaux. Iels l’ont notamment utilisé et décliné sous toutes les formes dans le slogans « We’re here. We’re queer. » (« Nous sommes là, nous sommes queers/bizarres »). Plus récemment, on peut remarquer la réappropriation de l’expression bad bitch (mauvaise pute) en anglais, aussi très utilisée en France au sein de la cyberculture. A l’origine employé pour insulter les fxmmes, ce terme est aujourd’hui énormément reppris sur les réseaux sociaux pour figurer une femme forte qui ne se laisse pas marcher dessus, comme le montre la tendance Tiktok accolant des extraits de films ou de séries montrant une action forte et marquante d’un personnage féminin, le tout sur les paroles « Go bad bitch, go bad bitch ah ! » de la chanson Bundles de Kayla Nicole.

Le détournement par les féministes des termes insultants ou chargés de reproches à leur égard pour les utiliser dans leurs supports de communication est très courant : le projet Mauvaise Compagnie que nous venons de voir, le podcast féministe Mécréantes créé par Léane Alestra ou encore le marché de Noël millitant Troubles-Fête, je citerai même le titre du livre de Pauline Harmange Moi les hommes je les déteste. Cette appropriation passe en grande partie par le traitement typographique donné aux différents termes, qui permet de souligner le sarcasme ou l’aspect revendicateur de leur utilisation. Tantôt élégantes, délicates ou d’une force assumée, les fontes utilisées au sein du design féministe jouent un rôle très important. Même les lettres griffonnées par les Colleur.euse.s et les manifestant.e.s sont empreintes de messages et de design. En effet, « Même si la plupart de ceux qui fabriquent des pancartes et bannières pour des marches ou manifestations ne se considèrent pas comme designers graphiques, c’est exactement ce qu’ils deviennent… »16. Ainsi, « faites de colère et de tristesse », chaque lettre incarne à la fois un témoignage personnel et la lutte d’un mouvement entier, le tout s’inscrivant dans un contexte particulier. Bien qu’étant de complets amateur.rice.s, les militant.e.s se changent alors tou.te.s malgré iels en designer graphique pour penser graphiquement leurs interventions dans l’espace public réel comme virtuel.

Les fontes utilisées par les féministes s’inscrivent souvent dans la même ligne que les polices de caractère activistes utilisées par de nombreux mouvements de manifestation (Black Lives Matter, Youth for Climate, etc). On retrouve ces linéales en capitales et aux fortes graisses sur bon nombre d’affiches et de publications, des posts viraux de NousToutes sur les réseaux sociaux, aux affiches du collectif OuiOuiOui, en passant par les pages de la revue féministe La DéferlanteEnd white supremacy (« Mettons fin à la suprémacie blanche »), compte officiel de Black Lives Matter, 15 mai 2022The world is changing. You are not, Photographie par Dmitry Sharomov, site officiel de Greenpeace, 11 décembre 2020. Ces mêmes polices nous sont famillières car nous avons l’habitude de les croiser dans le contexte des mouvements de protestation contemporains comme les posts de Black Lives Matter, les campagnes de Greenpeace ou même les publications des Gilets Jaunes. On peut alors reprocher ce manque d’originalité aux communiquant⋅es féministes qui réutilisent des codes existants « sans chercher plus loin ». Or, même si cela reste critiquable, le fait de s’approprier ces normes s’expliquent par la volonté d’être facilement identifiable par le public comme une publication à caractère revendicatif. De plus, l’absence d’identité visuelle particulière devient parfois une force : tout le monde peut ainsi s’approprier ces messages. C’est d’autant plus visible sur le web, dans lequel tout circule si vite. Les internautes peuvent s’identifier à ces publications militantes et les partager à leur gré ou les détourner. Cela explique pourquoi les mêmes féministes d’Anna Toumazoff s’inscrivent parfaitement dans les codes visuels de la culture mèmesque.

Cependant cette uniformité typographique dans les mouvements protestataires est symptomatique de l’uniformité typographique du paysage visuel français dans son ensemble. En effet, on y constate l’omniprésence des codes graphiques instaurés par le Style International Suisse au sein du design graphique. Éléments géométriques, utilisation poussée de la grille, préconisation des fontes sans empattement et rejet de l’ornementation constituent donc la base des codes graphiques répandus dans le monde entier depuis près de soixante-dix ans. Les polices de caractère et les mises en pages fantaisistes sont donc depuis bien longtemps méprisées au profit de la sainte “neutralité”. La valorisation de cette dernière relèverait en réalité de tout sauf d’une objectivité impartiale. « Ces formes n’ont pas été dévalorisées par hasard ou selon les règles d’un bon goût universel immanent, mais parce qu’elles sont associées à des pratiques, des groupes et des communautés marginalisées par le champ du graphisme. Le travail des fxmmes, les classes « inférieures » (esthétiques kitsch, vulgaires), les cultures « non-occidentales »… » écrit à ce propos Loraine Furter dans la revue Le Signe Design17.

Ce rejet délibéré des esthétiques « féminines » ou issues de minorités est symptomatique du manque de diversité au sein des métiers du graphisme. Je constate cependant, après 5 ans d’études dans ce domaine, la majorité écrasante de fxmmes aspirant au métier de designer graphique, de directrice artistique ou encore de chargée de communication. Pourtant, les fxmmes sont absentes ou extrêmement minoritaires au sein des articles, des références de livre, des figures médiatisées et même des cours portant sur le design graphique. « Rassurez-vous, GraphistEs, l’histoire vous fera disparaître rapidement18. » La lecture de cette phrase de Vanina Pinter au cours de mes recherches m’avait glacé le sang. Elle explique au sein de Dispar(être) de quelles façons les femmes, non seulement sont évincées de l’Histoire par les récits des dominants, mais également, par le fruit d’une éducation faisant l’apologie de la discrétion féminine couplée à une misogynie intériorisée, elles s’effacent d’elles-mêmes. N’osant même pas rêver qu’elles puissent prétendre à mieux, ne s’imposant pas, conditionnée à souvent délaisser leurs ambitions professionnelles au profit du soin de la famille. Comme le martèle Vanina Pinter, « l’anonymat court dans les veines des graphistEs. »

La situation est encore plus désastreuse en ce qui concerne les représentations des minorités ethniques dans le métier de designer graphique. Je ne suis malheureusement pas parvenue à mettre la main sur les chiffres français, mais le graphiste Tré Seals explique au sein du projet Vocal Type Co que prêt de 84% des designers américains sont blancs. « Ce manque de diversité en termes de race, d’ethnicité et de genre a mené à un manque de diversité dans les pensées, les systèmes (éducatifs par exemple), les idées, et plus important, dans les créations. » ajoute-t-il19.

C’est cette place au sein du paysage visuel que Charlotte Attal tente de s’approprier à travers sa pratique du design graphique. Designeuse et artiste, ses recherches portent principalement sur la thématique de l’identité que l’on trouve au cœur de son projet KitabaProjet Kitaba, Charlotte Attal, 2020–2021, traitant de son rapport au plurilinguisme et au pluriculturalisme sous forme de recherche typographique. D’origine maghrébine, Charlotte Attal possède une véritable curiosité pour les lettrages arabes, qu’elle ne maîtrise malheureusement pas. Elle a ainsi pensé la fonte Kitaba pour qu’elle constitue une « fonte arabe détournée en français », usant de l’alphabet latin dont les formes sont inspirées d’Helvetica, tout en imitant les courbes de l’alphabet arabe. Elle parvient ainsi très bien à s’approprier les codes du design contemporain couplés à la culture dont elle est l’héritière en s’emparant de son alphabet et de ses éléments graphiques. Elle explique sa démarche de visibilisation de la transmission de l’alphabet arabe au cours de la conférence Nourrir le design graphique: transmissions féministes et décoloniales avec Loraine Furter.

Toujours sur le thème de l’identité et de la typographie, cette dernière évoque à son tour la réflexion qui l’a menée, il y a 6 ans, à créer Libre Fonts By WomxnLibre Fonts By Womxn, Loraine Furter, 2018. Constatant l’absence de fontes open source dessinées par des fxmmes dans le paysage visuel contemporain, elle a d’abord pensé ce site comme un outil personnel les regroupant. Dans la logique de ces travaux open source, elle l’a par la suite mis en ligne et a été très surprise de l’engouement qu’elle a suscité. Elle a poursuivi cette idée de ré-appropriation de la visibilité au sein du domaine typographique avec le Projet Multiscriptes aux côtés de la designeuse graphique arménienne Garyn Goktian. Elle-même issue de la quatrième génération d’immigrés de la diaspora arménienne, Loraine Furter souhaite ainsi lutter contre la disparition progressive de l’alphabet arménien dont les fontes sont en nombre limité. Elle ajoute à quel point elle trouve le terme de « scriptes non-latins » particulièrement horrible, marginalisant les fontes « non-occidentales », l’obligeant à fouiller pour accéder à ces caractères, et instaurant une fois de plus la vision occidentale comme la norme. On assiste à l’omniprésence du scripte latin en même temps qu’à la disparition et au désintérêt vis-à-vis d’autres scriptes. Loraine Furter et Garyn Goktian ont alors sollicité plusieurs intervenantes spécialisées en scriptes chinois, arméniens, arabes, etc, dans le but d’imaginer une co-existence des différents alphabets plutôt que la dominance et l’ethnocentrisme d’un seul.

Là oùTypefesse, Océane Juvin, 2019 de nombreuses productions féministes s’emparent des codes typographiques issus du Style International Suisse, d’autres les détournent complètement pour créer des esthétiques en totale opposition. Face à la neutralité et l’épuration des typographies et des mises en page, on assiste au fleurissement de fontes sophistiquées, à empattement, accompagnées d’éléments ornementaux voire illustratifs, etc, dans le but de s’approprier de nouveaux codes graphiques. J’ai été particulièrement marquée par la découverte de la police de caractère Typefesse dessinée par Océane Juvin et qui, comme son nom l’indique, combine les formes et le vocabulaire de l’alphabet et du corps. La designeuse joue avec la perspective du regardant qui « devient également voyeur » face à ces corps qui se contorsionnent, tantôt se révèlant, tantôt se dissimulant, pour nous donner à lire le texte.

C’est dans cette idée de s’inspirer des corps qu’elle me rappelle PoufstarPoufstar, Alice Strub, 2021, créée par Alice Strub, en assumant pleinement le parti pris féministe de cette démarche. Partie d’un caractère moderniste, elle en a fait enfler les lettres et y a ajouté des ornements pour un effet scintillant. Ainsi, par ces lettres rondes aux forts contrastes, elle s’est éloignée des standards de typographies en vigueur « comme pour figurer ce besoin de prendre la parole, de prendre la place, d’affirmer un corps, des formes mais aussi une culture, une esthétique girly englobant les formes arrondies, plus douces et des étoiles20. » Plutôt que d’en avoir honte, Alice Strub « souhaite revendiquer ces stéréotypes et cette culture aliénante, en faire une force […] et s’opposer aux diktats de la typographie moderniste et paternaliste. »

Je ne peux m’empêcher de remarquer que de plus en plus de designeuses graphiques tendent à embrasser cette fameuse esthétique girly dont le rejet habituel est le fruit du rejet machiste de tout ce qui peut être attribué au féminin : quelque chose de futile, sans intérêt et sans profondeur. Mais sans en arriver jusque là, beaucoup sont les designeuses s’éloignant des standards du Style International. Par exemple, l’application Tapage voit souvent ses visuels accompagnés de typographies très différentes des linéales auxquelles nous sommes habitué.e.s, entourées de toutes sortes d’ornementations et mise en formeThe many faced godess, Roxanne Maillet, 2021. Beaucoup de féministes forcent volontairement le trait girly de leurs créations pour revendiquer cette identité féminine stéréotypée, si longtemps dépréciée, grâce à l’utilisation poussée à l’extrême du rose et du kitsch. Le travail de Roxanne Maillet en est un parfait exemple. Textures, effets de profondeur, dégradés, ornements étoilés, fontes biscornues, les visuels qu’elle crée sont riches d’éléments et offrent un regard nouveau sur le design graphique. Ce regain d’énergie se différencie largement des mises en pages neutres auxquelles nous sommes habitué.e.s.

Roxanne Maillet est elle-même membre de la collective Bye Bye BinaryTypographie non-genrée, Bye Bye Binary, 2020, fondée en 2018, devenue la référence en matière de fontes féministes et dont l’objectif est la recherche autour de polices de caractère inclusives. En effet, à une époque où l’écriture inclusive est encore vivement critiquée, cet atelier de création se l’approprie totalement pour l’enrichir et l’incorporer au quotidien dans le design graphique. Ses membres s’amusent des codes typographiques, exploitant tantôt les standards du Style International, forgé par l’entre-soi masculin, pour y insuffler l’inclusivité qui lui manque, ou s’en éloignant volontairement pour créer quelque chose de diamétralement opposé. « Si la valorisation de certaines formes graphiques nous invite à faire certains choix, et à reproduire (et valoriser à notre tour) certaines esthétiques, ce même processus de faire des choix peut aussi devenir un outil pour créer d’autres représentations. » a ajouté Loraine Furter dans Le Signe Design n°121. La collective de Bye Bye Binary ainsi que l’ensemble des travaux que j’ai évoqués dans cette partie participent activement à changer les représentations au sein du langage, du design des messages mais aussi celui des polices de caractère. Cette démarche s’étend également aux autres domaines et enjeux du design que sont les images.


S’approprier les images

« L’histoire du design graphique participe à piéger le rôle des fxmmes à celui d’images, à éteindre leur action et leur liberté22. »

Le design graphique peut aussi constituer un vecteur de réappropriation des représentations des histoires de fxmmes et du féminisme. Les images forment, aux côtés de la typographie, un enjeu très important du design, témoignant des travaux des fxmmes.

Se réapproprier l’idée de muse

« Sans imaginaire (et incarnations) de l’altérité, à partir de quel point de vue pourrions-nous rechercher une transformation de la culture ? Et comment construire ces imaginaires et ces incarnations, si ce n’est par une alliance avec ce qui a été réduit au silence, réprimé, dédaigné23 ? »

Le féminisme de la 4e vague poursuit le travail entamé par les précédentes en donnant également à voir des représentations du passé. Ces représentations qui ont manqué pendant des siècles existaient pourtant bel et bien mais provoquaient bien souvent un désintérêt qui les a empêché d’emmerger. C’est ce que les féministes démontrent en faisant emmerger de nouveau l’histoire et l’iconographie de nombreuses fxmmes, les sortant de l’oubli et l’anonymat auxquels elles étaient condamnées. Ainsi, s’inspirer des histoires de fxmmes passées nous aide aujourd’hui à changer nos modèles et nos perceptions. Nous prenons de cette façons la mesure d’à quelle point notre image de « la Femme » est une perception façonnée et conditionnée de toute pièce par des siècles de tabous et de censures mysogynes. Ces fxmmes, devenues nos muses, se différencient pourtant énormément des muses habituellement représentées dans l’histoire de l’art. Là où elles étaient lassives, passives, douces et sexualisées, les modèles féministes sont des battantes, des intellectuelles indépendantes.

Cependant, ces nouvelles muses féministes s’inscrivent elles aussi dans le passé car il est très courant pour les collectifs de chercher à s’inscrire dans l’Histoire, dans la mythologie, pour y puiser le plus de légitimité possible. Nous connaissons tou.te.s la figure d’Olympe de Gouges, pionnière du féminisme français ayant rédigé La Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne en 1791 avant d’être guillotinée à Paris en 1793. Une autre icône féministe plus récente est celle de Joséphine Baker, danseuse, chanteuse, actrice, vedette des années folles et membre de la Résistance au cours de la Seconde Guerre Mondiale. Pourtant, la première image que nous avons d’elle, c’est sa chorégraphie, seins nus, portant une jupe en bananes, sur scène dans un décor de savane, incarnant le fantasme colonial. Malgré tout, elle est devenue la première icône noire dans le paysage visuel français. « Ainsi, elle se place sous les projecteurs d’une société dont elle se moque ouvertement24. » L’histoire de Baker a récemment ressurgi car elle est devenue la sixième femme, mais également la première femme noire de l’Histoire à entrer au Panthéon, suscitant moult débats.

Je pourrai citer bien d’autres exemples de fxmmes marquantes de l’Histoire et de la mythologie projetée en emblèmes féministes dans le design depuis des décénies comme les Amazones (peuple de femmes guerrières dans la mythologie grecque), Cléopâtre (reine d’Égypte Antique au premier siècle avant Notre Ère), Simone de Beauvoir (autrice du Deuxième Sexe, paru en 1949), Simone Veil (ayant porté la lutte pour l‘accès à l’IVG dans les années 70), Marguerite Yourcenar (première femme membre de l’Académie Française), etc. Je me contenterai de citer l’exemple de George Sand, romancière, dramaturge et journaliste connue pour son pseudonyme masculin et sa tumultueuse vie amoureuse, devenue l’égérie du collectif féministe Georgette Sand. On retrouve ce « rappel du passé pour comprendre les débats du présent25 » dans les identités visuelles des collectifs féministes, puisque Georgette SandLogo et slogan de Georgette Sand, Collectif Georgette Sand, 2014 reprend cette icône et son histoire pour justifier sa lutte dans le slogan : « Faut-il s’appeler George pour être prise au sérieux ? ». Toute l’identité visuelle du collectif est ainsi inspirée de cette femme de lettre du passé, de par le choix d’une police de charactère réale, typique de la période classique grâce à ses empattements et ses contrastes pleins-déliésSite actuel de Georgette Sand, Collectif Georgette Sand, 2022. Elles reprennent également les couleurs des suffragettes, le vert et le violet, se revendiquant ainsi leurs héritières. Y est ajouté l’image du nœud dans les cheveux, perçu comme très (trop) feminin et futile, pour en faire un signe de reconnaissance et de marketing. « Les nœuds dans les cheveux, c’est pour jouer avec le ridicule. Les rubans c’est cul-cul ; mais c’est pour dire qu’en dépit de son apparence, toute femme peut être féministe26. », déclare à ce sujet l’une de leurs membres, Gaëlle Couraud.

Les millitant.e.s, en reprenant l’iconographie et/ou des signes distinctifs des mouvements passés, se réclament de l’héritage de ces féminismes, comme l’illustre très bien l’omniprésence de la couleur violette dans les identités visuelles des collectifs et projets. On la retrouve dans toute la charte graphique du collectif NousToutes mais aussi sur de nombreuses ressources féministes comme OuiOuiOui, Moi les hommes je les déteste, Yesss Podcast, Le génie lesbien, les Effrontées, Mécréantes, Présentes, etc. On remarque à quel point les identités visuelles des collectifs féministes et lesbiens sont proches. Ils sont en effet étroitement liés, le combat féministe devant énormément à ses millitantes lesbiennes qui sont souvent les premières à monter au créneau. Alice Coffin le développe mieux que moi dans son livre Le Génie lesbien, au sein duquel elle évoque également : « Le symbole des lesbiennes dans de nombreux pays est une hache à deux tranchoirs appelée labrysDrapeau lesbien féministe, Sean Campbell, 1999 – Le triangle noir représente le symbole que les nazis avaient affublé aux fxmmes lesbiennes tandis que le labrys incarne un pouvoir féminin et matriarcal. Elle figure sur le drapeau noir et violet des lesbiennes. C’est l’arme des Amazones27. » Nous y retrouvons la couleur violette ainsi que le raccord à la mythologie et aux symboles de l’Histoire.

Très engagée depuis de nombreuses années, Alice Coffin est également membre du collectif La Barbe. « La barbe, traditionnellement pensée comme un attribut masculin, est devenue le signe historique détourné de La Barbe28. » Ce symbole historique de virilité et de prestance devient, au sein du collectif, la marque de la futilité et du superficiel. Dans la même lignée, ce collectif a basé l’entièreté de sa charte graphique sur des références au passé : fontes mécanes avec un effet usé, gravures anciennes de mains directionnelles, de Marianne ou encore de barbes et moustaches pour illustrer les rubriques du site internet, même le fond possède une texture de papier un peu vieilli. Le collectif s’est ainsi totalement approprié ce symbole masculin de la barbe pour en faire leur outil de lutte. Les millitantes arborent chacune une barbe lors de leurs actions pleines de sarcasme, dans le but de tourner l’entre-soi masculin en ridicule. Ces groupes pourtant vieux d’à peine quelques années, revendiquent ces esthétiques vintages. « L’inscription dans une mémoire féministe visuelle permet au jeune collectif de créer une illusion de densité historique29. »

Bien que des modèles féminins existent déjà dans la culture française, leur nombre et leur diversité sont pour autant très réduits. C’est aussi ici que le design peut les donner à voir et donner envie au public de s’y intéresser comme le fait le compte instagram MèreLachaisePortrait d’Anaïs Ségalas, Camille Paix sur le compte instagram @merelachaise, 19 novembre 2020. Ce dernier, adapté recemment en roman graphique, propose ainsi des illustrations et des récits détaillés sur les vies de fxmmes illustres enterrées au cimetière du Père Lachaise. Voir leurs visages et leurs noms est très important en termes de représentationCulottées, des femmes qui ne font que ce qu’elles veulent, volume 1, Pénélope Bagieu, Éditions Gallimard, 2016. De plus, la démarche de la bande dessinée Culottées, par Pénélope Bagieu (2016), a permis à de nombreuses petites filles d’enfin pouvoir s’identifier à autre chose qu’une princesse blonde habillée de rose attendant passivement son prince. « Guerrière apache ou sirène hollywoodienne, gardienne de phare ou créatrice de trolls, gynécologue ou impératrice, les Culottées ont fait voler en éclats les préjugés30 ». Les destins et représentations y sont d’une grande diversité en termes d’orientations sexuelles, d’ethnicités, de physiques et d’aspirations.

Suite à son incroyable succèsCulottées, adaptation par France Télévisions, 2020, Culottées a été adaptée en une série animée en 2020 par France Télévisions, qui a su pousser plus loin la diversité en jouant avec les couleurs qui s’éloignent du réalisme, mais donnent davantage de force aux animations. Le son ajoute aussi une plus value à cette adaptation. Les protagonistes y sont admirablement doublées et chaque épisode s’ouvre sur un générique dansant rythmé par le cœur martial de voix féminines. Ce choix rappelle le jingle d’introduction du podcast féministe Yesss (encore une fois créé par Anaïs Bourdet, elle est décidément partout), connu pour ce même genre d’exclamations guerrières associées aux sons des tambours, donnant la parole aux warriors (guerrières), des fxmmes contant leurs victoires contre le sexisme.

La réalisatrice Léa Bordier tente, elle aussi, de donner à voir l’infinité de facettes que peut prendre la féminité à travers son projet Cher CorpsCher Corps — Marie-Paule, Léa Bordier, 16 juillet 2017. Chaque épisode, d’une dizaine de minutes, nous propose le portrait d’une femme qui raconte son rapport au corps et comment il a évolué à travers le temps et les évênements. Aurélie, Mai, Blaise, Mathilde, Mayalan, ces fxmmes possèdent des corps mais aussi des âges, des familles, des milieux sociaux, des identités de genre et des identités sexuelles très différentes, nous offrant un aperçu de leur vie dans une approche intime, comme une discussion privée dans un cocon de sécurité. Ce dernier est renforcé par le fond sonore composé systématiquement de musique jazz tandis que la caméra pose sur elles un regard très doux, ni voyeur ni sexualisant, où leurs mimiques, leurs imperfections ainsi que leurs anecdotes les rendent incroyablement attachantes. L’entièreté des témoignages est visionnable sur la chaîne Youtube de la réalisatrice. N’importe qui peut ainsi y accéder et s’identifier à leurs combats dans le corps d’une femme anorexique, grosse, noire, en situation de handicap, victime de viol, mutilée, hyperséxualisée trop jeune, se questionnant sur son genre et les normes qui l’entourent, etc. Le projet a aboutit à une adaptation de ces histoires en roman graphique, pour lequel Léa Bordier a pris soin de sélectionner 12 illustratrices différentes pour chacune des 12 histoires y figurant. La diversité des récits est ainsi directement renforcée par la diversité des pattes graphiques des artistes dont les traits et la mise en page renforcent les propos des témoignages. On remarque alors que là où Culottées, de Pénélope Bagieu, était parti du format de la bande dessinée pour être adapté au format audiovisuel, Cher Corps a eu le parcours inverse. On en revient à ce que j’évoquais dans la première partie lorsque j’expliquais que les millitant.e.s de la 4e vague mènent le combat féministe sur plusieurs fronts. Chaque projet est la plupart du temps adapté à plusieurs médias à la manière du blog et de l’édition PayeTaShnek ou des fiches éducatives de Julia PiétriExtraits de Cher Corps, Léa Bordier, 2019.

On ressort de l’oubli les destins de fxmmes inspirantes pour en faire de nouveaux modèles, nous nous approprions les histoires déjà connues comme des figures féministes, mais il arrive aussi que nous détournions la lecture et l’image déplorables d’autres histoires de fxmmes pour nous les réapproprier sous un angle féministe. Ce fut le cas de Méduse, érigée en symbole monstrueux, avant d’être vaincue par Persée qui exploite par la suite son pouvoir contre ses propres ennemis à l’aide de sa tête décapitée. Depuis, Méduse est devenu une célébrissime icône féministe. Violée par Poséidon dans le temple d’Athéna, elle fût maudite par cette dernière et changée en créature aux cheveux de serpents, indésirable pour les hommes, dont nul.le ne peut croiser le regard sans se changer en pierre. « Si l’on y réfléchit bien, Méduse est le parfait exemple d’une histoire volée : le corps violé, privée de désir, le pouvoir usurpé par un homme. À travers les siècles, son mythe n’est d’ailleurs raconté que par des hommes dont certains voient en elle une castratrice. […] Pour d’autres, Méduse serait comme l’incarnation du female gaze. D’un coup d’œil, elle transforme les hommes en objets, elle en fait ses choses, tout en étant protégée de leur regard à eux31 ». analyse à ce sujet Blanche Sabbah dans sa série de bandes dessinées Mythes et Meufs. A travers cette histoire, Méduse est devenue au cours des dernières décennies une icône féministe mais également un symbole de raliement pour les victimes de viol et d’agressions sexuelles. Nombreux sont ceux qui, sans comprendre la signification de ce geste, se plaignent du « trop grand nombre » de jeunes fxmmes “manquant d’originalité” car se faisant tatouer une Méduse sur le corps. Ils se moquent sans comprendre qu’il s’agit là justement de tout le propos. Trop de victimes, trop de fxmmes violées, agressées, tuées. Mais s’identifier à cette image mythologique aide ces fxmmes à se sentir moins seul.e.s, et en cela, le design peut jouer un rôle, dans la mesure où la façon dont un.e tatoueur.euse va réfléchir un tatouage s’approche grandement du travail d’un.e designer.euse graphique.

On pourra aussi citer les exemples de Judith, Salomé, mais également celui de Lilith. Au sein de la 4e vague féministe, des fxmmes présentées comme immorales et détestables sont aujourd’hui perçues comme des modèles par les nouvelles générations de millitant.e.s. Je me souviens d’une de mes camarades de BTS ayant exceptionnellement amené dans la classe sa petite sœur, Lilith. Alors que je lisais clairement de l’effarement dans les yeux de mon professeur lorsqu’elle a prononcé ce prénom chargé de signification, c’est l’admiration et l’envie qu’il a suscité chez une autre de mes camarades qui avait capté mon attention. « Et moi, je m’appelle Eva… » avait-elle immédiatement marmonné pour elle-même. Eva ne voulait pas incarner Eve, la femme d’Adam, sortie de sa côte, belle, douce et « docile ». Eva s’identifiait bien davantage au mythe de Lilith, la première femme d’Adam et son égale, car née de la même argile que lui, devenue démone, sans mari et sans enfant.

L’un des exemples les plus parlant de réhabilitation et réappropriation de figures féminines associées au Mal est celui du mythe de la sorcière. « Davantage encore que leurs aînées des années 70, les féministes actuelles semblent hantées par cette figure [celle des sorcières]32. » écrit Mona Chollet dans Sorcières, la puissance invaincue des femmes, dont la lecture aura bouleversé mon féminisme. De nombreux attraits des feministes et des millitant.e.s queers sont comparables à cet héritage de la figure de la sorcière : la collection de pierres semi-précieuses, la fascination pour l’astrologie, les choix vestimentaires gommant les frontières entre les genres, l’engagement pour l’écologie et le respect de la nature, etc. Pourquoi un tel engouement féministe ? Pam Grossman tente de l’expliquer par ces mots : « Épouse, sœur, mère, vierge, putain : ces archétypes sont fondés sur les relations avec les autres. La sorcière, elle, tient debout toute seule33. » Nous sommes ici bien loin de l’image passive de la muse, les modèles actuels, véhiculés par le paysage visuel, aspirent à l’autonomie, l’indépendance et la liberté de choix.

Reconquérir les représentations

Dans Sorcières, Mona Chollet explique par la suite que l’on ne peut se contenter de rejeter les systèmes symboliques, il faut les remplacer. Héroïnes, déesses, sorcières, démones, fxmmes fortes et indépendantes, les féministes créent de nouvelles mythologies.

« Dès lors, pour une femme, […] se nourrir de ses images, c’est chasser une représentation par une autre. C’est se recentrer, s’autoriser à être soi-même la source de son salut, puiser ses ressources en soi, au lieu de s’en remettre toujours à des figures masculines légitimes et providentielles34. »

Cette lutte pour des figures moins stéréotypées et plus diversifiées ont porté leurs fruits puisque l’on constate depuis quelques années un véritable effort de représentation dans les illustrations, les bandes dessinées, les films et les séries. Ces figures inspirantes apparaissent partout, même chez des géants de la pop culture que sont Marvel, Disney et Netflix. C’est cette même pop culture qui nourrit en continu la création de mèmes sur internet, qui n’avaient à l’origine pas de lien avec la lutte féministe. Comme évoqué dans la première partie, c’est Anna ToumazoffAnna Toumazoff (@memepourcoolkidsfeministes), 20 novembre 2019Anna Toumazoff (@memepourcoolkidsfeministes), 1er juillet 2020 qui est passée maîtresse dans l’art de créer ces images virales humoristiques à travers le prisme du militantisme antisexiste : « Un fond social percutant résumé en une punchline, une image pop (dessin animé de votre enfance, série télé culte, people emblématique, chanteuse iconique), beaucoup de décalage, de la virulence, et le tour est joué : vous obtenez un mème féministe parfait35. » On remarque qu’Anna Toumazoff ne choisit jamais ses images au hasard. Les personnages féminins représentés dans ses mèmes sont toujours des icônes au sein de la pop culture (Les Supers Nanas de la série du même nom, Daenerys Targaryen de Game of Thrones, Blair Waldorf de Gossip Girl, Miranda Priestly dans Le Diable s’habille en Prada, les héroïnes des films de Hayao Miyazaki, l’actrice Zendaya, etc) tandis qu’elle exploite les images de figures masculines médiatisées (hommes politiques français, Eric Zemmour, Cyril Hanouna, Kev Adams, etc) pour les tourner en dérision et se moquer de leur misogynie assumée. Ces détournement d’images et de symbole par les millitant.e.s, dans la confection de leurs identité visuelles, de leurs actions voire de leurs mèmes, couplés très souvent à la parodie et la satire font partie intégrante de ce que Stéphanie Kunert appelle une sémioclastie créative (le terme de « sémioclastie » étant emprunté à Roland Barthes). Cette dernière « relève globalement d’un projet de réappropriation critique de la culture de masse par les minorités sexuelles36. » Anna Toumazoff s’approprie et maîtrise parfaitement les codes de la culture mème à travers ses choix de police de caractère, de punchlines en franglais et d’images connues de la culture populaire. Elle en fait une arme d’activisme numérique mais aussi un outil d’éducation par le biais de l’humour, dont la viralité et l’apparente légèreté multiplient l’efficacité dans cet Internet pétri de misogynie.

Nous sommes bien loin de l’idéal des pionniers du Web qui rêvaient d’une « communauté atopique, déterritorialisée et ouverte ». « Avec le recul, on comprend que de telles aspirations et l’homogénéité sociale et culturelle de leurs détenteurs explique largement la cécité idéologique dont à fait preuve la société de l’information et de la communication naissante en prétendant qu’elle allait abolir les effets de l’inégale distribution des ressources culturelles et sociales37. » Malheureusement, les inégalités sociales telles que le sexisme, le racisme ou encore l’homophobie se perpétuent dans les espaces en ligne, constituant un objet de lutte supplémentaire pour les activistes de la 4e vague. Les réseaux sociaux ainsi que les jeux vidéos sont devenus des espaces supplémentaires où les fxmmes subissent encore et encore les violences de la société patriarcale contre lesquelles les gérants de ces grandes entreprises peinent à prendre des mesures réelles. Vous l’aurez compris, la 4e vague féministe, en même temps qu’elle a pu s’emparer de nouveaux espaces publics pour milliter, subie par la même occasion les nouveaux moyens d’opressions sexistes par leur biais. On aurait pu penser que l’anonymat rendu possible sur internet et les jeux vidéo permettrait, au moins dans ces espaces numériques, d’effacer les violences sexistes, homophobes et racistes.« En réalité, il apparaîtra très vite que la frontière entre monde réel et virtuel n’est pas si étanche et que les inégalités de ressources sociales et culturelles entre internautes s’exercent aussi dans les espaces en ligne38. »

Nier nos identités de fxmmes ne résoudrait en rien ce problème profondément sociétal alors les millitant.e.s luttent au grand jour sur les réseaux sociaux et à l’aide du design graphique pour éduquer les prochaines générations comme les actuelles. La notion d’appropriation est au cœur de cet activisme en ligne puisque, comme nous l’avons vu avec l’exemple des mèmes, les réseaux sociaux permettent de reprendre et répondre constamment à des propos ou des créations visuelles. J’ai le souvenir encore frais de ce jour de mai 2021 où, dans un communiqué retentissant, quatre activistes et un collectif féministe très connues de la communauté, avaient annoncé quitter la plateforme Instagram au profit de Patreon avant d’assigner le groupe Facebook en justice. Shadowbanned et épuisées par la censure du géant des réseaux sur leurs publications, confrontées à l’innaction de celui-ci face aux raids de cyberharcellement qu’elles subissent, Clit Révolution, La Prédiction, Mécréantes, Lusted Men et Merci Beaucul tentent à plusieurs reprises de lui faire révéler sa politique de modération, sans succès. Elles ont finalement pris la décision d’user de leur influence pour faire pression sur les pouvoirs en place. Ce combat épuisant et constant pour la représentation et l’éducation sur les réseaux sociaux illustre parfaitement cette citation de Donna Haraway : « La technologie n’est pas neutre. Nous sommes à l’intérieur de ce que nous faisons et c’est à l’intérieur de nous. Nous vivons dans un monde de connections — et tout ce qui est fait ou pas fait a de l’importance39. »

Les millitant.e.s, extrêmement actif.ve.s, traitent tous les enjeux du féminisme intersectionnel, au plus proche de l’actualité, comme le harcèlement de rue, le mansplaning, les inégalités raciales, les injonctions à la beauté, etc. Les réseaux sociaux constituent souvent le royaume du paraître, cette dernière notion est un point sur lequel énormément de féministes insistent à travers leur travail de représentations. L’objectif est de se débarrasser le plus possible des injonctions paradoxales faites aux femmes quant à leur apparence à travers les médias et à travers l’art. Ces standards inatteignables que nous connaissons toutes, « exigent des lectrices qu’elles soient “elles-mêmes”, qu’elles “trouvent leur propre style”, tout en leur donnant le choix entre un éventail très restreint de panoplies, voire en multipliant les prescriptions autoritaires et extrêmement précises40 ». Là où les Guerilla Girls américaines, en 1989, avaient éveillé les consciences sur la dichotomie présentant, dans les musées, l’omniprésence des femmes en tant que muses ainsi que leur absence en tant qu’artistes, on constate de surcroît le mattraquage d’une représentation quasi unique de LA femme. « Sur nos murs, sur nos écrans, dans les pages des magazines, un seul type de femme s’impose donc : le plus souvent blanche, certes, mais aussi jeune, mince, sexy, apprétée41. » On constate le pouvoir des images, et par conséquent du design, dans la façon dont ils trient les caractères physiques considérés comme représentables et donc attirants. Ce tri relève non seulement de la misogynie mais également du racisme, de la grossophobie, du validisme, de l’agisme, et j’en passe.

« Dans le long travail de déconstruction qu’est une vie passée en civilisation féminicidaire, les films sont une arme fatale42. » écrit Alice Coffin. Un exemple très parlant de l’importance de la diversité dans les représentations est celui de la vidéo de cette petite fille à lunettes et aux cheveux bouclés regardant le dernier Disney, Encanto, avec sa mère. « Regarde Maman ! C’est moi ! » s’écrit-elle, folle de joie, à la seconde où l’héroïne du film, Mirabel, apparait à l’écran. Comme j’aurai voulu avoir la chance de connaître une héroïne à lunettes à son âge, moi qui ai passé mon enfance et une bonne partie de mon adolescence persuadée d’être laide en raison de mes lunettes. Pourquoi ? Parce qu’aucune figure à laquelle je m’identifiais n’en possédait. Pourtant blanche, blonde et mince, j’étais loin d’être à plaindre dans la perception que la société avait des enfants comme moi. Mais cette petite fille s’est également identifiée à Mirabel en raison de ses origines latines et de ses cheveux bouclés. Il aura fallu les succès retentissant de Coco, Encanto et même Vaiana auprès des communautés les ayant inspirés, pour que Disney réalise d’immenses progrès en termes de diversité et d’inclusion. Les réticences comme les avancées étant souvent motivées par le profit, les décideurs marketting du film ont choisi de produire moins d’exemplaires de la figurine de Luisa, la cadette grande, musclée et angoissée, au profit d’Isabella, l’ainée gracieuse et jolie. Petit.e.s et grand.e.s se sont au final bien plus identifié.e.s à Luisa, dont les figurines ont très vite été en rupture de stock alors que celles de sa sœur peinent à se vendre. Plus récemment encore, j’ai été marquée par la sortie de la bande annonce de La Petite Sirène, qui a créé une immense polémique auxprès des groupes conservateurs en raison du choix inédit pour l’actrice principale. L’actrice américaine Halle Bailey a alors subit un déferlement de haine raciste. En réaction, les réseaux sociaux ont vu affluer des dizaines de vidéos de parents filmant la réaction de leurs petites filles noires en découvrant la bande annonce. Je suis chaque fois touchée par les yeux émerveillés que les petites tournent vers leurs parents en découvrant le visage de l’actrice’, s’écriant folles de joie « She’s brown ! Look ! She’s brown !! » (« Elle est noire ! Regarde ! Elle est noire ! » ).

Chez Netflix égalementLe Petit Manuel Sex Education, Charlotte Abramow, 2020, la diversité des représentations a fait un immense bond en avant, bien qu’aussi principalement motivé par le profit. Les Chroniques de Bridgerton, Orange is the new black ou encore Sex Education doivent une grande partie de leur succès à la diversité de leur casting. Sex Education, particulièrement apprécié des fans qui attendent actuellement la sortie de la 4ème saison, comporte un panel d’acteur.rice.s d’une immense diversité d’origines, de genres et d’orientations sexuelles. La série prend place dans le lycée de Moordale au sein duquel nous suivons l’évolution de divers personnages et leurs problèmes à travers la découverte de leurs sexualités. Sans tabou, elle aborde de nombreux sujets comme le danger de l’ignorance et la désinformation autour du sexe, la sororité, le harcèlement sexuel, le vaginisme, l’asexualité, etc, sous un angle particulièrement bienveillant. A la sortie de la saison 2, en janvier 2020, Netflix s’offre les services de Charlotte Abramow pour concevoir et réaliser Le Petit Manuel Sex Education ainsi qu’une campagne d’affichage pour le promouvoir lui et la série. « Un petit manuel pour parler de cul sans tabous et pour aborder les bases d’une sexualité plus épanouie, où le consentement, le respect et l’écoute de soi et de l’autre sont les lignes conductrices43 ». Au sein de cette édition de 64 pages, Charlotte Abramow s’approprie les tabous et les enjeux de la série comme de la sexualité pour les traiter par le prisme de la photographie. Cette dernière est caractérisée par des plans très colorés avec des personnages dont la diversité s’exprime jusque dans leurs tenues originales. La photographie s’allie à la typographie, parfois manuscrite et qui rappelle les slogans des Colleur.se.s, aux illustrations et aux schémas de sorte à transmettre le plus possible aux plus jeunes spectateurs une vision déculpabilisante et saine de la sexualité. Ce travail évoque les publications de Julia Piétri au sein du Gang du Clito pour lutter contre la désinformation autour de la sexualité, notamment féminine. Il s’agit là encore une fois de s’approprier nos corps et nos sexualités pour briser le tabou qui les entoure en passant par l’appropriation des termes et des représentations qui les désignent. A ce propos, l’illustratrice Jüne Plã, a basé l’entièreté de son compte instagram Jouissance ClubJüne Plã (@jouissanceclub), 18 juin 2018 (949 000 abonné.e.s) sur la façon dont, à travers le dessin, elle pouvait s’approprier et transmettre des pratiques sexuelles originales dans le respect mutuel. Elle aborde aussi bien le plaisir féminin que le plaisir masculin et tente de s’éloigner du schéma de pensée selon lequel sexe = pénétration. Ses illustrations, entre schéma et « cartographie du plaisir », ont offert de précieux conseils à de nombreux couples ou personnes seules avant d’être édité par les éditions Marabout en 2020. Face à son succès, le livre a par la suite été traduit et publié partout dans le monde.

Ces travaux traitant chacun à leur façon de l’appropriation des représentations dans les différents espaces publics nous démontrent à quel point le design peut y jouer un rôle central dans sa manière d’allier images et messages. « Le design est un reflet de la culture, et si nous n’incluons pas la diversité dans notre appréhension de ce qu’est le design, non seulement nous échouons à répondre adéquatement aux besoins de la société, mais nous serions en fait coupables de perpétuer les vices de celle-ci44 »Vulvotopia, Charlotte Abramow, 2018. La 4e vague féministe, pouvant désormais accéder plus facilement à l’espace public qu’est Internet, se fait un devoir de changer les représentations pour offrir un aperçu plus inclusif du monde.

C’est ce qu’à fait Charlotte Abramow pour Sex Education , entre autres, mais également dans l’entièreté de son travail. En effet, la photographe est devenue spécialiste de projets féministes militants à travers l’image comme Vulvotopia ou encore This is not consentThis is not consent, Charlotte Abramow, 2018dans laquelle elle s’approprie un fait divers et y réagit par le biais de son champ de prédilection. Charlotte Abramow est également connue pour avoir réalisé le clip de Balance ton quoi, dans lequel la chanteuse Angèle s’approprie l’équivalent francophone de #MeToo, #BalanceTonPorc. Là où la chanson aborde le sujet du sexisme, du harcèlement sexuel, des représentations et la légitimité de la colère féministe, le clip parvient, dans une esthétique comparable aux travaux réalisés pour Sex Education, à y ajouter d’autres thématiques. Les images figurent la pilosité de la chanteuse tandis que la mise en scène du tribunal féministe fait écho aux paroles crues de la chanson et à l’actualité. Dans la séquence animée, ce sont les lettres « o » du mot « no » qui viennent stopper un harceleur et on observe également une critique de la justice et des institution à travers un homme en costume écrivant « blabla » au rouge à lèvre sur son rapport durant le procès. Après une séquence jouée au sein de « l’Académie anti-sexisme », le clip reprend sur la dénonciation des inégalités salariales sur des critères sexistes et racistes. Plus tard, deux autres fxmmes portent des armes sur lesquelles sont inscrits les mots « communication » et « empathy » pour symboliser les outils du consentement. Le clip réussit non seulement à enrichir les paroles de la chanson mais également à nous faire une belle démonstration des enjeux de représentation dans le féminisme intersectionnel avec un panel de personnages, de tous les âges et de toutes les couleurs. Charlotte Abramow démontre là parfaitement sa maîtrise des enjeux féministes ainsi que des images et symboles qui y sont associés pour en faire des métaphores visuelles dans ses créations.

Sa façon de dépeindre les féminités dans leur plus grande diversité me rappelle énormément les séries photographiques deSérie Marche des fiertés parisienne, Tay Calenda, 27 juin 2021 Tay Calenda, une photoreporter et millitante féministe devenue la photographe officielle des colleur.euse.s parisien.ne.s et spécialisée dans les grands mouvements sociaux. Habitués que nous sommes aux femmes lisses des publicités, ses clichés ont ceci de fascinant qu’ils donnent à voir de vraies fxmmes, dans leurs colères, leurs joies, leurs défauts, leurs actions, etc. Les millitant.e.s communiquant.e.s de la 4e vague utilisent ainsi leur savoir-faire et leur champ de prédilection pour impacter à leur échelle les représentations. IELS se les approprient.

Au cours de mon adolescence, j’ai été très tôt passionnée de dessin et d’illustration, ce qui m’a naturellement conduite à suivre des illustratrices auxquelles je m’identifiais. Leur trait a évolué en même temps que je grandissais et leurs créations ont fait mûrir mon féminisme. J’étais très intriguée par les dessins de Marie BoiseauSans nom, Marie Boiseau, 17 août 2020 tant les personnages qu’elle représentait étaient éloignés de mon environment visuel et tant, paradoxalement, ils me semblaient plus réels. Marie Boiseau illustre à merveille la diversité des corps dont elle n’hésite pas à représenter le gras, la pilosité, les vergetures et les rides. Elle dessine de vraies fxmmes heureuses dans leurs corps, leurs vêtements ainsi que leurs univers et s’inscrit parfaitement dans le mouvement body positive promouvant la décomplexion face au corps et à la sexualité. À ce féminisme à transmission visuelle se sont ajoutées les bandes dessinées de @Lanuitremueparis, Blanche Sabbah, dont j’ai déjà longuement parlé, ainsi que celles de Mikankey. De nombreuses publications de cette dernière m’ont ouvert les yeux grâce à ses visuels aux traits et textes impactants, parmi elles, celle sur le rejet du rose de la part de certaines jeunes filles (dont je faisais partie) qui serait dû à du sexisme intériorisé. Son post sur le mépris à l’égard des fans de boys band révélant une misogynie sociétale (« Soyons honnête, ce mépris musical va souvent de pair avec un public que l’imaginaire collectif ou les médias considèrent comme féminin, jeune et par conséquent écervelé45 ». ) avait également eu l’effet d’un coup de poing sur ce que je pensais savoir. Leurs travaux m’ont apporté les premières réflexions, remises en question et références féministes dont j’avais besoin pour aller plus loin. Elles m’ont donné envie de lire et voir bien d’autres travaux féministes qui m’ont eux-mêmes conduite à découvrir les illustrations d’Alice Dès, travaillant sur le livre et la web série feministe animée Clit Révolution aux côtés de Sarah Constantin et Elvire Duvelle-CharlesClit Révolution, Manuel d’activisme féministe, Sarah Constantin et Elvire Duvelle-Charles, illustration par Alice Dès, 2020, mais également des bannières pour le collectif Osez le Féminisme. Ces créatrices du champ du design graphique que j’ai vu évoluer ont fini par se faire leur place au sein du monde de la publicité. De plus en plus, je voyais leurs illustrations apparaître tantôt pour des affiches de festival, tantôt des livrets du Planning Familial ou encore pour designer des pochettes Cabaia. J’ai été très heureuse de les voir réseauter et se voir enfin offrir des opportunités par de grandes institutions qui laissaient jusqu’à présent ces travaux à des gens qui n’étaient bien souvent pas dans l’engagement pour la cause féministe. J’ai conscience que le chemin est encore long mais c’est en nous appropriant petit à petit les places qui nous sont dues dans le paysage visuel que forment les expositions, les livres, les émissions, les sites internet, etc, que nous construisons un monde meilleur pour les futures féministes.


En conclusion

La notion d’appropriation se trouve donc au coeur de l’activisme féministe dans le design graphique, qui plus est au sein de la 4ème vague par l’avènement des médias sociaux. En France, les millitant.e.s changent le langage en s’appropriant et en détournant les messages et les formes typographiques du paysage visuel. Après le pilier des écrits, c’est aussi celui des images qu’iels reconquièrent. M’intéresser à cette notion dans le champ du féminisme et du design graphique m’a quelque peu rassurée sur le devenir de la cause mais je dois rejoindre l’avis de Vanina Pinter : « Les vagues féministes – rageuses, berçantes, déstabilisantes, à peine perceptibles- n’ont pas assez déferlé, à découvert, sur le design graphique46 ».

Malgré cela, et grâce aux travaux des activistes, createur.rice.s et théoricien.ne.s du féminisme, les idées du mouvement se transmettent et se démocratisent de manière très concrète aujourd’hui, modifiant petit à petit et les mœurs et les standards de relations femme-homme. Cet engouement autour du féminisme a vu apparaitre une nouvelle forme de discours et de design marketing appelé purplewashing. Ainsi, des entreprises et/ou institutions politiques se réapproprient les codes graphiques du féminisme de la 4e vague et « visent à faire croire qu’une entreprise est féministe et qu’elle œuvre pour l’égalité homme-femme, alors qu’elle n’a ni mis en place des mesures spécifiques, ni réfléchi à sa production, ni à la manière dont elle traite les femmes en interne47 ».

J’ai bien conscience que le milieu de la création graphique au sein du féminisme n’est pas toujours rose. Au-delà, des accrochages ou potentielles rivalités entre militant.e.s, militer à l’ère des réseaux sociaux représente pour ces métiers de l’influence, un travail souvent sous-estimé et tourné en dérision. « Tenir un compte prend un temps inouï. Ça ne consiste pas simplement à produire une publication de temps en temps, c’est aussi (et surtout) : faire des recherches, rédiger des publications, les mettre en page, trouver la bonne identité visuelle, tourner des vidéos, les monter, répondre aux messages privés, s’assurer de contenter l’algorithme – poster les bons formats aux bonnes heures, avec la bonne formulation, les bons hashtags, les bonnes mentions. C’est passer des heures à modérer et à répondre aux commentaires, à accompagner aussi bien les filles qui se posent des questions un peu anodines que des jeunes femmes victimes de violences. », écrit à ce propos Elvire Duvelle-Charles dans Féminisme et Réseaux sociaux, une histoire d’amour et de haine48. Tiraillées entre l’épuisement face au cyber-harcèlement, aux raids de haters, la modération sans fin des espaces de discussion « safe », la nécessité de gagner sa vie, et le refus de l’autocensure pour de potentiels partenariats rémunérés, les influenceur.euse.s féministes se voient souvent céder à la dépendance financière envers les marques les contactant. « L’objectif de départ, l’activisme, laisse place à la necessité d’entretenir une audience à des fins capitalistes. Le cadre même qui permettait de libérer la parole enferme et prend l’aspect d’une cage dorée49. » Ces créateur.rice.s de contenu se voient alors bien souvent happés dans un cercle vicieux les incitant « à produire du contenu non plus dans le but d’informer, mais simplement pour alimenter le puits sans fond des Gafam. » On constate de multiples conséquences psychologiques sur ces militant.e.s de la 4e vague, notamment "une addiction aux réseaux sociaux et une dépendance à Internet, qui engendrent souvent des symptômes dépressifs et d’anxiété, favorisés par la peur de « rater quelques chose » (« fear of missing out », fomo) et une nomophobie liée au smartphone50. »

La 4e vague féministe a donc, à l’image des trois précédentes, également son lot de victimes et de sacrifices. Ces inflenc.eur.euse.s et design.er.euse.s produisent chaque jour un travail titanesque qui petit à petit porte ses fruits.

J’ai pu, à travers ce mémoire, approfondir et découvrir de nombreux travaux qui mériteraient bien plus de visibilité au sein de notre domaine. J’ai cependant le sentiment que, en tout cas en France et au sein de la 4e vague, les millitant.e.s et souvent les designeuses graphiques n’hésitent plus à afficher clairement leur activisme et leur identité de fxmmes. « Mes projets sont orientés vers le féminisme… et ça me plait. […] Au moins les marques macho ne viendront pas me voir51. » s’amuse Alice Dès dans une interview. Cela fait écho à une déclaration de Loraine Furter au cours d’une de ses conférences : « Depuis que je bosse avec une position de féministe assumée, je suis mieux payée52 » s’étonnait-elle après avoir longtemps craint que son activisme ne la précarise. J’ai aussi longtemps moi-même eu cette crainte.

Pourtant, j’aime sentir la colère des autres fxmmes et des autres designeuses. J’aime les regarder la faire éclater au grand jour parce que quelque part quand elles le font c’est aussi la mienne qu’elles exprimentExtraits du comicstrip Ma Colère, Blanche Sabbah, 27 septembre 2020. J’aime qu’elles s’emparent de ces violences perpétuelles que les fxmmes subissent depuis des millénaires.

J’aime quand Blanche Sabbah dessine sa colère sous forme de serpents dans ses bandes dessinées, j’aime quand Alice Coffin écrit sa fureur dans les pages du Génie Lesbien, j’aime quand Anaïs Bourdet exprime son ras-le-bol en recensant les harcèlements qu’elle subit, j’aime quand les traits des illustrations et des lettres de Mikankey sont déformés par sa rage.

J’aime quand Bye Bye Binary, lassé.e.s d’attendre qu’on inclut enfin les fxmmes et les minorités de genre dans l’écriture et surtout dans nos police de caractères, décident de créer elleux-mêmes ces fameux glyphes manquants.

J’aime lire les mèmes acérés d’Anna Toumazoff et les analyses de Préparez-vous-pour-la-bagarre qui font le travail que les autres médias ne font malheureusement pasAdèle Haenel quittant la salle des Césars après la remise du prix du Meilleur Réalisateur à Roman Polanski, photographie par Berzane Nasser, 28 février 2020.

J’avais les larmes aux yeux en regardant en direct Adèle Haenel se lever et quitter la salle des Césars en hurlant « La honte ! » ce 28 février 2020 après le sacre de Polanski.

« Il s’agit également de questionner au sein du design graphique ces notions d’universel et de neutralité, de quelles manières, elles touchent à la violence53. » ajoute encore Vanina Pinter. Moi qui ai senti toute ma jeunesse la fureur de ma mère sans jamais qu’elle ne puisse vraiment l’exprimer… Voir le design graphique figurer la colère des fxmmes me fait un bien fou. Et je pense que je ne suis pas seule.

Elles parviennent à si bien s’approprier cette colère et ces violences qu’elles en font quelque chose de fertile, qui va de l’avant, avec tout l’humour et le sarcasme qu’elles manient à la perfection. Leurs créations, c’est une manière de dire qu’elles ne sont, que nous ne sommes, pas dupes.

« Je m’amuse d’eux désormais, plutôt que d’en pleurer. Je leur ai consacré assez de larmes, ça suffit. […] Parce que finalement, j’ai réussi. J’ai réussi à bien les faire chier, toutes ces années54 ». On peut être choqué par la « violence » des mots d’Anaïs Bourdet. Pourtant sa déclaration illustre bien, à mes yeux, la place qu’occupe la notion d’appropriation pour le féminisme. Changer la société patriarcale est un enjeu trop important pour que le design graphique ne s’en empare pas. Il fût et constitue toujours un merveilleux outil pour exprimer, dénoncer et tourner en ridicule ce système qui nous fait souffrir. En effet, en tant qu’outil de communication et de mise en forme des médias, il peut servir ou desservir la cause en fonction des choix des designer.euse.s, ayant véhiculé les idées patriarcales depuis des siècles. Ainsi, il est parfaitement adapté à ce combat permanent qui lutte contre la déconsidération des fxmmes et des minorités. La 4e vague lui aura donné une force nouvelle en offrant, grâce aux médias sociaux, de l’espace permettant aux féminismes de s’exprimer et une connexion directe à leur audience.

Toutes ces références, bien qu’imparfaites et incomplètes, qui me font rire, pleurer et enrager, avec lesquelles je suis capable d’interagir, amatrices ou professionnelles, mainstream ou de niche, entretiennent tout proche de moi, jour après jour, un espoir que je n’avais pas avant, et c’est cela, à mes yeux, la beauté de la 4e vague féministe.

Salomé Rebierre
Références

Références

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Sitographie

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https://www.instagram.com/jouissance.club

https://www.instagram.com/memespourcoolkidsfeministes

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https://www.instagram.com/merelachaise

https://www.instagram.com/blklivesmatter

https://www.instagram.com/sissislafamille

https://www.instagram.com/jemenbatsleclito

https://www.instagram.com/collages_feministes_pau

https://www.instagram.com/tay_calenda

https://www.instagram.com/collages_feminicides_paris

https://www.youtube.com/watch?v=Hi7Rx3En7-k

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http://genderfluid.space

http://georgettesand.com

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https://osezlefeminisme.fr

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https://labarbelabarbe.org

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https://revueladeferlante.fr

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https://www.juliapietri.com

Annexes

Salomé Rebierre
Annexes
Paye Ta Shnek, Anaïs Bourdet, 2013
Collage dans une rue de Paris, photographie par Margaux Stive pour RadioFrance, 2020
Colleuses parisiennes, Tay Calenda, 6 avril 2020
Tay Calenda, 12 mai 2020
La révolution sera féministe ou ne sera pas, Blanche Sabbah, 4 mai 2020
Fiches pédagogiques, Gang du Clito, 2020
It’s not a bretzel, Gang du Clito, 2020
#autricedansledico, Auteur.rice inconnu.e, Octobre 2019
@jemenbatsleclito, 14 novembre 2021

Aperçu du feed instagram de @sisislafamille, mars 2020
Campagne d’affichage pour l’obtention du droit de recours à la PMA pour les couples homosexuels, environ 2013–2014

Lot de cinq cartes postales flatteuses, Anaïs Bourdet, 2019
Grand pins féministe de merde, Anaïs Bourdet, 2019
End white supremacy, compte officiel de Black Lives Matter, 15 mai 2022
The world is changing. You are not, Photographie par Dmitry Sharomov, site officiel de Greenpeace, 11 décembre 2020
Projet Kitaba, Charlotte Attal, 2020–2021
Libre Fonts By Womxn, Loraine Furter, 2018
Typefesse, Océane Juvin, 2019
Poufstar, Alice Strub, 2021
Histories flight of fancy, Roxanne Maillet, 2021
The many faced godess, Roxanne Maillet, 2021

Typographie non-genrée, Bye Bye Binary, 2020
Logo et slogan de Georgette Sand, Collectif Georgette Sand, 2014
Site actuel de Georgette Sand, Collectif Georgette Sand, 2022
Portrait d’Anaïs Ségalas, Camille Paix sur le compte instagram @merelachaise, 19 novembre 2020
Drapeau lesbien féministe, Sean Campbell, 1999 – Le triangle noir représente le symbole que les nazis avaient affublé aux femmes lesbiennes tandis que le labrys incarne un pouvoir féminin et matriarcal

Culottées, des femmes qui ne font que ce qu’elles veulent, volume 1, Pénélope Bagieu, Éditions Gallimard, 2016
Culottées, adaptation par France Télévisions, 2020
Cher Corps — Marie-Paule, Léa Bordier, 16 juillet 2017
Extrait de Cher Corps, Léa Bordier,
Extrait de Cher Corps, Léa Bordier, 2019
Anna Toumazoff (@memepourcoolkidsfeministes), 20 novembre 2019
Anna Toumazoff (@memepourcoolkidsfeministes), 1er juillet 2020
Le Petite Manuel Sex Education, Charlotte Abramow, 2020
Jüne Plã (@jouissanceclub), 18 juin 2018
Vulvotopia, Charlotte Abramow, 2018

This is not consent, Charlotte Abramow, 2018
Série Marche des fiertés parisiennes, Tay Calenda, 27 juin 2021
Balance ton quoi, Angèle, clip dirigé par Charlotte Abramow, 2019
Sans Titre, Marie Boiseau, 17 août 2020
Sans Titre, Mikankey, 21 février 2021
Sans Titre, Mikankey, 21 février 2021
Clit Révolution, Manuel d’activisme féministe, Sarah Constantin et Elvire Duvelle-Charles, illustration par Alice Dès, 2020
Extraits du comicstrip Ma Colère, Blanche Sabbah, 27 septembre 2020
Adèle Haenel quittant la salle des Césars après la remise du prix du Meilleur Réalisateur à Roman Polanski, photographie par Berzane Nasser, 28 février 2020
Salomé Rebierre
Glossaire

Glossaire

Adelphe
nom neutre | terme neutre pour désigner l’ensemble des frères et sœurs, équivalent de sibling en anglais.
Agisme
nom masculin | système ou comportement discriminatoire vis-à-vis des personnes prenant de l’âge (notemment chez les femmes), au profit des comportements et traits de la jeunesse.
Charge mentale
nom féminin | charge psychologique incombant principalement aux femmes pour l’anticipation et la prise en charge des tâches domestiques dans un domicile, résultant en une fatigue physique et psychologique.
Collages Féministes
nom propre | mouvement créé en 2019 par l’ancienne Femen Margueritte Stern pour protester contre le trop grand nombre de féminicides en France. Il est important de noter que, par la suite, de nombreux collectifs de colleur.euse.s se sont déssolidarisés de l’initiatrice du mouvement car elle aurait remis en question la légitimité de la communauté transgenre au sein du féminisme.
Cyberfeminisme
nom masculin | Activité de la communauté féministe s’interessant au cyberespace ainsi qu’aux technologies numériques. Le terme de cyberféminisme a été inventé dans les années 90 pour désigner le travail artistique, activiste, critique et théorique de fémiistes actives sur internet et les technologies numériques.
Empowerment
nom anglais | pouvant se traduire par enpouvoirement en français, désigne le fait de regagner du pouvoir et de la confiance en soit.
Feed instragram
nom anglais | ensemble des photos/posts visualisables sur un profil instagram.
Fxmme
nom alternatif pour femme | terme incluant toute personne s’identifiant comme femme, soit les femmes trans mais aussi les non-binaires, etc.
Grossophobie
nom féminin | rejet des personnes grosses.
Hater
nom anglais | pouvant se traduire haïsseur en français, désigne une personne qui, par déaccord ou detestation, répandent des messages de haine sur des personnes publics dans le but de les dénigrer.
Mouvement Metoo
nom masculin | mouvement social dont le but est de lever le tabou autour du viol et des agressions sexuelles, principalement par le biais de témoignages sur les réseaux sociaux.
Nomophobie
nom féminin | néologisme issue de la contration du terme « no mobile phone phobia », la phobie d’être sans téléphone portable.
Shadowban
nom anglais | dispositif de modération instauré par Instagram empéchant les personnes de voir le contenu d’un compte concédéré comme problématique, à moins d’y être abonné.
Sororité
nom féminin | solidarité entre les femmes, pendant féminin du terme fraternité.
Troll
nom anglais | personne cherchant à alimenter les polémiques sur internet en postant des messages de provocations pour leur amusement personnel.
Validisme
nom masculin | système ou comportement discriminatoire vis-à-vis des personnes handicapées, au profit des valides (autant physique que psychologique)
Salomé Rebierre
Remerciements

Remerciements

Je tiens à remercier Corinne Melin pour sa confiance et son aide précieuse tout au long des phases de recherches de ce mémoire. Je remercie également Julien Bidoret pour ses recommandations toujours pertinentes et judicieuses. J’adresse un immense merci à mes parents, Isabelle et Thierry Rebierre, pour leur soutien sans faille tout au long de ma scolarité, merci encore à ma mère, qui a su éveiller très tôt ma concience féministe et sans qui ce mémoire n’aurait donc jamais vu le jour.


  1. Selon linternaute.fr

    ↩︎

  2. Selon l’article « Appropriation (art) », Wikipédia

    ↩︎

  3. La notion d’auteur comme objet de l’art, L’appropriation au XXè siècle, Frédérique Entrialgo, 2005–2006

    ↩︎

  4. Ici, j’ai choisi d’utiliser le mot « suffragistes » au lieu de « suffragettes » car ces deux termes existent, « suffragettes » étant réservé à la branche « extrémiste » du mouvement (celles qui faisaient exploser des bombes, etc). Les suffragistes, en plus grand nombre, refusaient l’usage de la violence.
    Il s’agit peut être d’une interprétation de ma part mais, à mes yeux, toutes les suffragettes sont des suffragistes mais toutes les suffragistes ne sont pas des suffragettes. Ainsi, lorsque j’ai parlé de leurs revendications pour l’obtention du droit de vote dans les journaux, j’ai préféré utiliser le mot « suffragistes » puisque les deux groupes, bien qu’usant de méthodes différentes, possèdent cet objectif commun.

    ↩︎

  5. En 1978, l’avocate Gisèle Halimi remporte un procès historique en faisant condamner trois hommes pour le viol d’un couple de femmes, Anne Tonglet et Araceli Castellano, aboutissant à une modification de la loi et une requalification du terme de viol, passant de délit à crime.

    ↩︎

  6. Le web : de nouvelles pratiques militantes dans l’histoire du féminisme ?, Présentation, Claire Blandin, Magazine Réseaux 2017–1 (n°201), pages 9 à 17.

    ↩︎

  7. Présentes : Villes, médias, politiques… Quelle place pour les femmes ?, Lauren Bastide, Éditions Allary, 2020, Chapitre 3 : Présentes en résistance, Permettre aux femmes de dire « je », p197–198

    ↩︎

  8. Marie Dasylva est une coach stratégique et auto-entrepreneuse française d’origine guinéenne mais aussi fondatrice de l’agence Nkali Works, pratique l’empowerment dans le but de venir en aide aux femmes racisées subissant des violences racistes et sexistes dans le monde du travail.

    ↩︎

  9. Présent.e.s avec Lauren Bastide, conférence du 23 mai 2019 avec pour invitée Marie Dasylva

    ↩︎

  10. Sorcières, La puissance invaincue des femmes, Mona Chollet, Éditions Zone, 2018

    ↩︎

  11. Culture Numérique, Dominique Cardon, Éditions les Presse de Sciences-Po, 2019.

    ↩︎

  12. Les armes numériques de la nouvelle vague féministe, Divina Frau-Meigs, theconversation.com, 12 février 2018

    ↩︎

  13. Faire des vagues, Les mobilisations féministes en ligne, Josiane Jouët, Katharina Niemeyer et Bibia Pavard, Réseaux 2017–1 (N°201), Pages 21 à 57

    ↩︎

  14. Autrice, la très vieille histoire d’un mot controversé, Camille Renard, franceculture.fr, 14 mars 2019

    ↩︎

  15. Présentation du projet Mauvaise Compagnie, Anaïs Bourdet, mauvaisecompagnie.fr, 2019

    ↩︎

  16. Des lettres dessinées à voix haute : Typographie et protestation moderne, Emily Gosling, monotype.com, 19 août 2020

    ↩︎

  17. Voix intersectionnelles, féministes et décoloniales dans le champ du design graphique, Loraine Furter, LSD n°1, A feminist issue, Septembre 2020, p46–47

    ↩︎

  18. Dispar(être), Le plomb de la transparence, Vanina Pinter, Juillet 2018

    ↩︎

  19. Propos de Tré Seals pour le projet Vocal Type Co, cités par Loraine Furter dans son article Voix intersectionnelles, féministes et décoloniales dans le champ du design graphique, LSD n°1, A feminist issue, Septembre 2020, p46–47

    ↩︎

  20. Poufstar, plateforme Orbe, orbe.hyperhydre.fr, Alice Strub

    ↩︎

  21. LSD n°1, A feminist issue, Voix intersectionnelles, féministes et décoloniales dans le champ du design graphique, Loraine Furter, Septembre 2020

    ↩︎

  22. Pourquoi y-a-t-il si peu eu de graphistes autrices ?, Vanina Pinter, Avril 2019

    ↩︎

  23. Les Faiseuses d’histoires, Que font les femmes à la pensée ?, Vinciane Despret et Isabelle Stengers, Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2011

    ↩︎

  24. Joséphine Baker, artiste, résistante, féministe et emblème du Paris des Années folles, Romane Fraysse, pariszigzag.fr, 2021

    ↩︎

  25. Faire des vagues, Les mobilisations féministes en ligne, Josiane Jouët, Katharina Niemeyer, Bibia Pavard, Réseaux 2017/1 (n° 201), pages 21 à 57

    ↩︎

  26. Propos de Gaëlle Couraud, membre de Georgette Sand, dans l’article Faire des vagues, Les mobilisations féministes en ligne, Josiane Jouët, Katharina Niemeyer, Bibia Pavard, Réseaux 2017/1 (n° 201), pages 21 à 57

    ↩︎

  27. Le génie lesbien, Alice Coffin, Éditions Grasset, 2020, Quand on accuse une féministe d’éxagérer, page 206

    ↩︎

  28. Faire des vagues, Les mobilisations féministes en ligne, Josiane Jouët, Katharina Niemeyer, Bibia Pavard, Réseaux 2017/1 (n° 201), pages 21 à 57

    ↩︎

  29. Faire des vagues, Les mobilisations féministes en ligne, Josiane Jouët, Katharina Niemeyer, Bibia Pavard, Réseaux 2017/1 (n° 201), pages 21 à 57

    ↩︎

  30. Culottées, des femmes qui ne font que ce qu’elles veulent, volume 1, Pénélope Bagieu, Éditions Gallimard, 2016

    ↩︎

  31. Medusa, Mythes et Meufs, Blanche Sabbah (@Lanuitremueparis) pour le compte instagram de Matin, quel journal, 8 juin 2021

    ↩︎

  32. Sorcières, la puissance invaincue des femmes, Mona Chollet, Éditions Zones, 2018, Résumé

    ↩︎

  33. Pam Grossman, Avant-propos, in Taisia Kitaiskaia et Katy Horan, Literary Witches. A Celebration of Magical Women Writers, Seal Press, Berkeley, 2017

    ↩︎

  34. Sorcières, la puissance invaincue des femmes, Mona Chollet, Éditions Zones, 2018, page

    ↩︎

  35. Pourquoi on ne peut (vraiment) pas se passer des mèmes féministes, Clément Arbrun, terrafemina.com, 3 juin 2020

    ↩︎

  36. Dégenrer les codes : une pratique sémiotique de défigement, Stéphanie Kunert, Semen, 2012

    ↩︎

  37. Culture Numérique, Dominique Cardon, Édition Presses de Sciences-Po, 2021, p62

    ↩︎

  38. Culture Numérique, Dominique Cardon, Édition Presses de Sciences-Po, 2021, p62

    ↩︎

  39. “Technology is not neutral. We’re inside of what we make, and it’s inside of us. We’re living in a world of connections — and it matters which ones get made and unmade.” A Cyborg Manifesto : Science, Technology, and Socialist-feminism in the Late Twentieth Century, Donna Haraway, 1991

    ↩︎

  40. Beauté Fatale, Mona Chollet, La Découverte Poche, Chapitre 2, 2015

    ↩︎

  41. Beauté Fatale, Mona Chollet, La Découverte Poche, Chapitre 2, 2015

    ↩︎

  42. Le génie lesbien, Alice Coffin, Éditions Grasset, 2020, Les pervers pépères du cinéma, page 216

    ↩︎

  43. Le Petit Manuel de Sex Education, Charlotte Abramow, charlotteabramow.com, 2021

    ↩︎

  44. Essai dans Creative Review, Anoushka Khandwala, 2018

    ↩︎

  45. Comment expliquer le mépris à l’égard des fans de boy’s band ?, Mikankey, 5 février 2021

    ↩︎

  46. Dispar(être), Vanina Pinter, Introduction d’une conférence donnée le 9 décembre 2017 à la HEAR Strasbourg, département didactique visuelle dans le cadre du cycle de conférences « Écrits féministes » sur une invitation de Sandra Chamaret

    ↩︎

  47. Féminisme Washing. Quand les entreprises récupèrent la cause des femmes, Léa Lejeune, Éditions Le Seuil, 2021

    ↩︎

  48. Elvire Duvelle-Charles dans Devenir influenceuse, Féminisme et réseaux sociaux: Une histoire d’amour et de haine, Éditions Hors d’Atteinte, 2022, p103–105

    ↩︎

  49. Elvire Duvelle-Charles dans Devenir influenceuse, Féminisme et réseaux sociaux: Une histoire d’amour et de haine, Éditions Hors d’Atteinte, 2022, p103–105

    ↩︎

  50. Elvire Duvelle-Charles dans Violences en ligne, Féminisme et réseaux sociaux: Une histoire d’amour et de haine, Éditions Hors d’Atteinte, 2022, p135

    ↩︎

  51. Propos de Alice Des citée dans Alice Des, le trait féministe, etapes.com, 17 avril 2019

    ↩︎

  52. Nourrir le design graphique : transmission féministes et décoloniales avec Loraine Furter, Charlotte Attal et Élise Goutagny, Design en Recherche, conférence du 10 mai 2021

    ↩︎

  53. Dispar(être), Vanina Pinter, Introduction d’une conférence donnée le 9 décembre 2017 à la HEAR Strasbourg, département didactique visuelle dans le cadre du cycle de conférences « Écrits féministes » sur une invitation de Sandra Chamaret

    ↩︎

  54. Anaïs Bourdet dans Fatigue, Feu! Abécédaire des féminismes présents, coordonné par Elsa Dormin, Éditions Libertalia, 2021, p199–200

    ↩︎