Introduction
Débutons l’histoire de la publicité dans le monde du cognac avec la
mise en bouteille du produit. La première trace de cognac conditionné
en bouteille est mentionnée en 1783. C’est au milieu du 19e siècle que
cette bouteille est de plus en plus utilisée pour les expéditions,
pour l’être exclusivement après la première Guerre Mondiale. Des
étiquettes collées sur ces bouteilles renseignent l’origine du produit
ainsi que le nom de la marque en gros caractères.
Puis, les négociants
passent peu à peu de l’étiquette à l’affiche grâce à
la
loi de 1881
qui proclame la liberté absolue de l’affichage. Ils voient en
l’affiche le moyen le plus efficace dont ils disposent pour vendre
leur produit.
Parallèlement la lithographie et plus particulièrement,
la mise au point de la
chromolithographie permet
à
la
publicité de se développer à travers l’affiche dans le dernier quart
du 19e siècle. Avec la chromolithographie les images sont facilement
reproductibles à l’infini. Elles prennent rapidement une place de plus
en plus importante à côté du nom de la marque et du produit.
À cette
période, alors que l’affiche commence à faire ses preuves, certaines
grandes maisons de négoce éprouvent quelques réticences à l’égard de
la publicité et préfèrent utiliser leurs réseaux de connaissances
plutôt qu’un discours publicitaire. Par exemple, la société Hennessy
reste longtemps opposée aux annonces, aux campagnes publicitaires et
même à participer aux Expositions Universelles. En effet, en 1888,
elle écrit : « Nous nous attachons à expédier la meilleure qualité
possible et nous croyons que c’est encore la meilleure des réclames »
[1]. Cependant, comme beaucoup d’autres
maisons affectées par la crise du
phylloxera
[2], elle n’a pas eu d’autres choix que de
s’engager dans la voie publicitaire et fait appel à la
« réclame » pour créer de nouveaux
besoins à la clientèle et aussi lutter contre la concurrence. Dans une
lettre de 1897 de l’imprimeur parisien Vercasson à la société Martell,
il est inscrit : « vous avez pu vous rendre compte, par la concurrence
toujours croissante qui existe dans les articles de distillerie, qu’il
est indispensable aujourd’hui, pour lancer un produit ou même
simplement pour en rappeler l’existence au public, d’adopter l’affiche
illustrée qui seule attire et retient l’attention ».
[3]
Ainsi les maisons de cognacs font réaliser de plus en plus d’affiches,
de cartes postales, de calendriers ainsi que toutes sortes d’objets
publicitaires. Elles sont également présentes aux Expositions
Universelles. Par ces différents moyens publicitaires les maisons de
négoce trouvent, d’un côté des solutions aux obstacles liés à la
concurrence, et de l’autre des solutions aux obstacles liés à
l’exportation (comme la lutte contre l’alcolisme).
Le musée municipal
de Cognac conserve une magnifique collection d’affiches, de panneaux
et de calendriers publicitaires constituée grâce aux dons des maisons
de négoce, aux dons privés venant de collectionneurs, ainsi que
d’achats effectués par le musée. Bien que le musée abrite ses
collections depuis 1925, les affiches sur le cognac ne sont
inventoriées qu’à partir de 1955. La totalité constitue environ 450
références. Les deux plus anciennes affiches datent de 1825.
J’ai grandi sur les terres de production du cognac et ayant de nombreux
proches et connaissances oeuvrant dans ce secteur, je me suis
intéressée à cet alcool luxueux qui fait la richesse de cette région.
Plus récemment, j’ai été séduite par une exposition d’affiches
anciennes chez Château-Otard, maison natale de François 1er. Une salle
débordante de design de bouteilles et de vieilles affiches m’a soufflé
l’idée de travailler sur ce thème.
Ainsi nous pouvons nous demander
comment les maisons de négoce ont-elles adapté leurs affiches
publicitaires au regard de la société qui évolue ?
Pour répondre à
cette question, nous allons étudier dans un premier temps les débuts
de l’affiche jusqu’à l’arrivée de la loi Évin (~1825-1940), dans un
second temps la période après la proclamation de la Loi ( 1940 à
aujourd’hui ).
Pour finir, nous allons analyser le développement et
l’évolution d’une maison de négoce : la maison Rémy Martin.
L’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
dispose que « tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement, sauf
à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi
». La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse définit les
libertés et responsabilités de la presse française. Elle impose un cadre
légal à toute publication, ainsi qu’à l’affichage public, au colportage
et à la vente sur la voie publique. Son article 1 dispose que «
l’imprimerie et la librairie sont libres ».
Début de l’affiche jusqu’à l’arrivée de la loi Évin
Introduction de l’affiche
Le principe de l’affichage remonte aux premières grandes agglomérations.
Alain Weill
[4] cite les notices publiques qui annoncent les décisions
officielles : gravures sur stèle à Babylone, axone (panneau de bois pivotant)
en Grèce Antique ou album (murs blanchis à la chaux) dans la Rome
Antique.
Sous Charlemagne apparaît l’affichage des textes de lois, mais
l’analphabétisme est présent et freine le développement de cette technique
d’informations et les crieurs publics reste à la mode.
L’invention de l’imprimerie vers 1450 permet l’éclosion de l’affiche au sens
moderne.
Surgissent, dans la seconde moitié du 15e siècle, les premières traces
de « réclame »
[5] [a]. Cela permet aux éditeurs
et
aux
imprimeurs de vanter
leurs productions. L’image apparaît pour la première fois en plus du texte,
pour annoncer la légende de Mélusine en 1491.
[b].
Au 16e siècle, naissent les affichent destinées aux spectacles forains, aux
loteries, mais aussi aux protestations de nature politique et religieuse.
Le pouvoir politique décide d’en contrôler l’usage. Pour Paris et ses
faubourgs, à la suite de
l’affaire des
placards [c], le roi François Ier signe
le 13 novembre 1539 un édit qui lui octroie le monopole de l’affichage et
en « interdit l’arrachage sous peine de punition corporelle »
[6].
Au 17e et 18e siècle, la gravure sur cuivre se met au service de la
publicité, promouvant spectacles, ventes d’esclaves, recrutement militaire,
articles de mode, livres, compagnie de transport, nouvelles boutiques. Le métier d’« afficheur » est
alors
synonyme de « colleur d’affiches », certains
s’organisent en corporations. Mais le gros de la production comprend
surtout des affiches typographiées rapportant à la vente ou aux annonces
légales.
Quant aux couleurs, le procédé du pochoir limite la production en
grand nombre. En 1722, l’affichage public s’organise et réglemente l’activité
des colleurs d’affiches. Vers 1780, le terme affichiste est utilisé dans un tout
autre sens qu’aujourd’hui : il désignait la personne qui colle sur les murs des
feuilles périodiques
[d].
L’invention de la lithographie vers 1796 par Alois Senefelder permet
l’éclosion de formats plus important et surtout en couleurs et à moindre
coût
[e1, e2].
Sous la
Monarchie de Juillet , l’art
publicitaire
connaît sa première révolution
avec l’éclosion de centaines d’annonceurs
[f1, f2, f3, f4, f5].
Naissance de l’affiche (~ 1825 - 1940)
Selon Alain Weill et Max Gallo
[7] , l’art publicitaire et celui de
l’affiche
apparaissent en même temps, à la fin du Second Empire, avec notamment
le Français Jules Chéret
[8].
Pour la conception, le métier d’affichiste élabore une première
esquisse ou une série de maquettes qu’il soumet à son commanditaire. Il
est peut être dessinateur ou peintre.
Les commanditaires des affiches sont en général les négociants. Ils sont
les intermédiaires entre les producteurs viticulteurs et le consommateur,
français ou étranger. Le rôle du négociant est de mettre en place « une
solide organisation de vente […] et doit trouver et accroître les débouchés
du cognac. Il doit s’orienter tout particulièrement vers l’exportation et savoir
s’appuyer sur une publicité habile »
[9]. Le commanditaire s’adresse très
rarement à l’artiste lui même, mais plutôt à un imprimeur qui se charge de
trouver le dessinateur.
Concernant les grandes imprimeries, elles possèdent des studios de dessin
employant soit des dessinateurs anonymes, soit des artistes sous contrat
( le plus souvent des artistes reconnus ). Ils travaillent en exclusivité pour
elles. Ces imprimeries sont en quelque sorte leurs agents
[10] . Ainsi,
les
imprimeurs assurent un travail continu à ces artistes sous contrat. Les
moyens financiers dont disposent certaines maisons de négoce permettent
aux imprimeurs de faire travailler de grands artistes comme Capiello
[11].
L’imprimeur supervise les différentes étapes du projet jusqu’à l’impression de l’affiche
[12].
Les affichistes célèbres de la Belle Époque sont souvent contactés
par les commanditaires des maisons de négoces pour la réalisation de leurs
affiches. Capiello a créé des affiches pour Château Otard
[h1] , Cognac
Delamain
[h2], Cognac Gautier frère
[h3] ,
Cognac
Pellisson
[h4], Cognac
Albert Robin
[h5], Cognac Henri Mounier
[h6] ,
Cognac Monnet
[h7], entre
autres. Alfons Mucha a dessiné l’affiche de Cognac Comandon
[i1] et
Cognac Bisquit
[i2] . Camille Bouchet a également réalisé une affiche pour
Cognac Jacquet
[j] [13].
Message de l’affiche
Les affiches du 19e siècle contiennent de nombreux messages. Les
thématiques sont en accord avec les valeurs que les maisons de
négoce veulent partager.
Tout d’abord, on peut aisément notifier un axe fondamental : la
mise en valeur d’un
savoir faire régional pour une qualité unique.
Pour représenter ce savoir faire il s’agit d’abord de présenter les
lieux
de fabrication, la production en général. On met en exergue
le sol et
les traditions avec une photo de la région ( ici on reconnaît le clocher
St léger de la ville de Cognac ). Cela peut être une grappe de raisin, le
produit utilisé
[k1, k2], les établissements et la ville d’origine,
c’est-à-dire
Cognac
[l1, l2]. En terme de production et de distillation, on montre
les
vieillissements dans les chais et les maîtres de chais [m1, m2, m3] .
En
gage de qualité, les maisons de négoce font apparaître aussi le nom
de leur marque et leurs symboles, une tradition qui perdure encore
aujourd’hui
[n1, n2].
Les maisons de négoces se sont parfois inspirées de
récits
imaginaires et historiques pour créer leurs affiches.
Nous pouvons retrouver le père noël qui va chercher son cognac
St.Genes
[o1], des références à la
mythologie
grecque telles que des
satyres chez Gélas
[o2], ou des nymphes chez Martell
[o3] . Les contes
font aussi irruptions dans ces visuels, des nains par exemple chez
Castillon
[o4].
Les affichistes s’inspirent aussi de
l’histoire de
France.
Nous voyons des thématiques liées à la royauté et aux empereurs :
François I boit son cognac Otard & Dupuy
[p1], Louis XIV devient l’emblème
de
la maison Augier car cette
maison a été fondée en 1643,
date du début du règne de Louis XIV
[p2]. La maison Cognac Roy utilise
aussi le symbole du roi, mais cette fois celui des cartes à jouer, en plus
d’un slogan «le Roy des cognacs»
[p3].
On se sert aussi des
héros historiques pour
véhiculer
un
message : chez Majos et Larsen l’affiche représente un chevalier qui
tient une bouteille de cognac. Nous pouvons imaginer que le message
délivré est un message qui aborde la bravoure, le courage, la virilité et
qui suppose que le cognac est un produit de luxe et qu’il doit être bien
gardé
[q1, q2].
Le cognac s’exporte à 97,6%
[14] aujourd’hui dans
le
monde
entier, et c’était déjà le cas au 19e siècle. Les maisons de cognacs et
par extension les affichistes et imprimeurs doivent se diversifier et
adapter leurs sujets en fonction de la clientèle.
La maison J.A Carin & Cie a pour personnage principal une danseuse
orientale accompagnée d’une homme assis jouant du guembri, un
instrument d’Afrique du nord ( maroc, tunisie, algérie ), cette affiche
cible les pays hispanophones
[r1] . En parallèle, le marché asiatique
est la première destination à l’export, les affiches de Jules Robin
[r2].
Nous pouvons voir des personnages en tenues traditionnelles chinoises
et Martell une affiche typographiques comportant l’impression d’une
bouteille ainsi que des synogrammes
[r3].
À partir de 1880, les mouvements
Art Nouveau [15]
et
Art déco
instaurent une autre thématique et les affichistes s’emparent de cette
thématique pour promouvoir le cognac et élargir la clientèle. Par
exemple, chez Otard
[s1] , Raoul Maurain & Cie
[s2],
Ovignac Senglet
[s3], Commandon & Cie
[s4] , la femme apparaît
et
prend une place
importante dans la publicité de cet alcool de luxe. On peut y découvrir
des personnages de sexe féminin buvant du cognac, attablés, où la
séduction domine. Les femmes boivent, ce n’est pas qu’une boisson
masculine. Évidemment, grâce à ces affiches le public visé s’élargit
puisqu’une autre partie de la population, les femmes, vont elles aussi
consommer du cognac.
L’art Nouveau qui introduit la femme mais aussi la faune et la
flore, va donner une nouvelle perspective de création aux maisons
de négoce et inaugure la thématique de la nature. Chez Monnet
[t1] ,
Albert Robin
[t2] , Briand
[t3] , Gautier
[t4] , des éléments naturels, tels
que des animaux
[t5] , ou des références au soleil ou au produit brut
( le raisin ) font leur apparition accompagnés de personnages lumineux
et souriants. Ces affiches font référence au retour de la mythologie
comme certaines affiches qui représentent une femme entourée de
raisins évoquant le cortège de Dyonisos, le dieu de la vigne et de
l’ivresse. La femme qui sourit sur l’affiche de la maison Gautier Frères
[t4]
a un sourire qui laisse penser à une légère ivresse : ses joues sont
rouges, comme marquées par l’alcool
[16].
En résumé, les affiches des maisons de négoce, supervisées par les
imprimeurs
abordent des thématiques
différentes et adaptent
leurs styles et leur visuels en fonction du public visé, que ce soit pour
l’exportation, pour agrandir leur clientèle, pour représenter leurs terres
de production et la mise en valeur de leur savoir faire. Les thématiques
abordées sont libres à cette époque et il n’y a pas de restrictions dans
les visuels, plutôt une liberté assez prononcée dans l’art publicitaire...
Tout au moins jusqu’à l’arrivée de la loi Évin en 1991.
De la loi Évin à aujourd’hui
Informations loi Évin et son encadrement
La loi du 10 janvier 1991, dite loi Évin [17] a pour but de lutter contre
le
tabagisme et l’alcoolisme.
Cette loi a pour but de recadrer entre autre la publicité liée à
l’alcool : elle désire protéger les jeunes des opérations de marketing.
L’apparition de cette loi restreint la diffusion de messages publicitaires
lies à l’alcool. La publicité est interdite principalement à la télévision, au
cinéma, dans les lieux sportifs.
La publicité est autorisée sur internet et les réseaux sociaux. Le fameux
message de santé publique doit apparaitre à chaque publicité liée à
l’alcool : « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé ».
La communication faisant référence au savoir-faire, au terroir, aux
traditions est considérée comme licite. On peut parler de l’origine du
cognac, le degré ou la référence gustative.
On peut communiquer sur l’alcool mais pas sur l’action de boire.
Les maisons de cognac ont su s’approprier ces nouvelles restrictions en
renouvelant leurs thématiques et la portée de leur message [18].
Du savoir faire au produit de luxe
Comme vu précédemment, les maisons de négoce à l’éclosion des
affiches publicitaires se concentrent sur la mise en valeur du savoir-faire,
les lieux de fabrication, le vieillissement dans les chais et les
maîtres de chais. On valorise le processus de fabrication et les terres.
En réalité, les maisons de cognacs cherchent à prouver la qualité de
leurs produits, à se faire connaître et à élargir leur clientèle. À cette
époque, on voulait engager la convivialité, la réunion dans un esprit de
partage et de fête.
Aujourd’hui, les marques ont prouvé leurs valeurs. Leur renommée leur
permet d’exporter encore plus, d’avoir des partenariats à l’étranger,
différentes gammes de produits qui ciblent différentes classes sociales
touchant ainsi différentes parties de la population comme les femmes,
les plus jeunes par exemple. La qualité des plus grandes maisons de
cognacs étant connue de tous, celles-ci se développent en tant que
producteurs de luxe. Martell, Hennessy, Rémy Martin proposent des
cognacs XO, voire XXO et plus [19]. Ces dernières sont les trois plus
grandes
maisons de cognacs situées
dans la ville du même nom. Elles
s’engagent à faire du cognac un produit de luxe dont certains cognacs
(XO, XXO ou Cuvée prestige) sont destinés à une classe sociale très
aisée.
En conclusion, depuis la loi Évin, les maisons de négoce ne
peuvent plus afficher une personne ou un personnage en train de
consommer cette eau de vie. Les visuels ont dû être adaptés.
Si le message transmis auparavant évoquait la convivialité et le partage
[u1] («make friends with martell»). Il évoque aujourd’hui un produit
de luxe et est diffusé comme tel. A partir des années 2000-2010, c’est
la bouteille qui est mise en avant sur les affiches publicitaires des
marques [u2]. Le parti pris photographique convoque les codes de la
photographie en parfumerie. L’idée est que la bouteille soit semblable
à un flacon de parfum et qu’elle contienne un liquide précieux [u3].
Puisque tout personnage est à bannir, c’est le packaging qui domine et
qui est exposé tel un trophée. On met en lumière l’identité de la marque,
ce qu’elle dégage et ce qu’elle veut faire passer comme message. Le
produit fini est maintenant le déclencheur de la vente. On montre ce
qu’on sait faire en terme de design de bouteilles, de packaging. On
partage les valeurs de la marque à travers le visuel de l’objet fini [u4]
[20].
Une maison en particulier; Développement et évolution d’une
maison de négoce: Rémy Martin
Présentation de la maison de cognac Rémy Martin
Rémy Martin est une maison de cognac fondé en 1724 par Rémy Martin
lui même, jeune vigneron de la région de Cognac, il commence à vendre
du cognac sous son propre nom. En 1738, le roi Louis XV donne le
privilège rare de planter de nouvelles vignes en reconnaissance de
l’excellence de son cognac.
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En 1810, la maison Rémy Martin commence à exporter son eau de
vie au delà des frontières européennes, aux États-Unis, en Asie
et dans le Pacifique.
1870: le centaure est adopté comme emblème, c’est Paul-Émile
Martin ( le 4e de sa famille à diriger la Maison ) qui crée le premier
logo, il s’inspire de son signe du zodiac, le sagittaire [v1].
En 1924, André Renaud devient le président de la Maison.
En 1927, il lance le Cognac Fine Champagne Rémy Martin qui
est un VSOP [21], issu des crus Petite Champagne et Grande
Champagne, son succès est fulgurant.
Le cognac fine champagne est officiellement reconnu en 1938.
Dans l’année 1948, André renaud décide que la maison Rémy
Martin produira exclusivement du cognac des crus issus de
petite champagne et grande champagne.
En 1960: André Giraud, successeur d’André Renaud met en place
la codification dans les chais, fait construire des chais à Merpins
( petite commune située dans les environs de Cognac ) et met en
place la toute première tonnellerie du Domaine de Merpins.
En 1965, André Hériard Dubreuil prend les rênes de l’entreprise et
met en place un partenariat visionnaire avec les vignerons dans
le but de garantir la plus haute qualité : c’est aujourd’hui l’Alliance
Fine Champagne.
1972: La bouteille VSOP en verre sombre dépoli, devenue
aujourd’hui un emblème de la marque, est lancée [v2].
En 1981, en réponse à une demande sans précédent, le cognac
Rémy Martin XO, le summum de l’opulence et de la sophistication,
est crée [v3].
En 1990, Georges Clot met à profit les techniques numériques
modernes pour gérer les stocks des chais.
1997: 1738 Accord Royal est créé, en hommage au privilège royal
autrefois accordé à Rémy Martin par Louis XV [22] [v4].
2003: La première femme Maître de chai, Pierrette Trichet est
nommée au sein d’une grande maison de cognac. Elle met au
point Centaure et Centaure de Diamant [v5] et transmet les
secrets du savoir-faire de Rémy Martin à Baptiste Loiseau,
comme Georges Clot l’a fait précédemment avec elle.
2007: pratiques agricoles durables sont reconnues par le
ministère de l’agriculture.
2012: premiers domaines viticoles de la région Charente
( les sixième en France ) à obtenir la certification Haute
Valeur Environnementale ( HVE ) reconnue par le ministère de
l’agriculture.
2014: Baptiste Loiseau, qui est né et a grandi dans la région de
Cognac, est le Maître de chai actuel. Il perpétue l’héritage de la
maison Rémy Martin pour nos générations futures.
2019: Le cognac Rémy Martin Tercet est lancé aux États-Unis
et en Chine. Le cognac Rémy Martin Tercet est un cognac
Fine Champagne unique, issu d’un assemblage d’eaux-de-vie
aromatiques aux notes fraîches de fruits exotiques. Reflet du
style de la Maison, le Tercet ouvre une nouvelle ère pour le
cognac [v6].
2020: 100% de partenaires sont engagés dans la viticulture
durable + 50% des partenaires certifiés HVE ( objectifs années
2022 ).
La maison Rémy Martin est spécialisée dans la production et fabrication
du cognac en France. Elle fait partie du Comité Colbert
[23] , cette
association regroupant des maisons de luxe pour promouvoir le savoir-faire
français
[24].
Évolution dans le temps de ses affiches
Chez Rémy Martin, nous retouvons les différents thèmes cités plus
haut mais d’autres thèmes font aussi leur apparition comme la mise en
avant des valeurs françaises de la marque. Elle utilise des personnalités
importantes et célèbres de l’époque, des jeux de mots humoristiques,
des affiches en rapport avec l’église.
À l’issu de l’échange avec Mesdames Micaelle Amoussou Coussy,
responsable du patrimoine et Marine Chaumet, chargée de Patrimoine
chez Rémy Martin, j’ai à ma disposition une cinquantaine d’affiches
publicitaires de cognacs retraçant l’évolution de Rémy Martin.
La plus ancienne date de 1946. C’est à cette date que commence mon
analyse.
1940-1949
1950-1959
1960-1969
1970-1979
1980-1989
1990-1999
2000-2010
2010-2019
Publicité à destination de l’exportation, « le cognac est un produit
mondial » qui dessert plus de 163 pays.
2000
Appartient à la série « Only Remy » pour VSOP diffusée en
octobre 2000 Scène festive. « Le VSOP préféré du monde ».
Un très bon cognac à la portée de tous.
Série de publicités diffusées entre 2003 et 2004. La campagne
sensation « Feel more » . Ce visuel utilise l’ancienne bouteille de
VSOP, l’étiquette change et devient rouge en 2004.
Un couple. La femme porte un manteau de fourrure, un collier. Scène
sensuelle = scène du spectacle et de l’amour, sensualité.
Code du milieu bourgeois, milieu aisé, fourrure, perles, paradoxe
avec le cognac entrée de gamme.
Rémy Martin chercherait-il à rajeunir la clientèle? Incitation aux
cocktails, rappel des codes de séries romantiques télévisées.
Appartient à la série « Feel More » - La campagne « The Journey of
Senses » pour le marché intérieur américain et africain, qui s’est
déroulée entre octobre 2004 et octobre 2005.
VSOP bottle, un couple asiatique danse. Mix’ n Joy « Only
Rémy », « Rémy and tonic ».
Création de cocktails à base de cognac, rajeunir la clientèle,
déclinaison du cognac, ambiance de fête, art contemporain.
Pour résumer, nous pouvons voir que l’évolution des affiches Rémy Martin
est similaire à l’évolution des affiches publicitaires d’alcool en général.
Rémy Martin s’ancre dans une lignée de maisons de cognacs qui ont su
évoluer avec la société en visant un public plus jeune, une clientèle mixte
tout en respectant la loi en vigueur. Le design d’objets prend place à côté
des personnages. On remarque que beaucoup de publicités s’axent vers
l’exportation, celles-ci prennent en considération la culture de chaque
pays.
Conclusion
Les Maisons de cognac ont utilisé la publicité dès le début de l’art
publicitaire. Elles ont travaillé avec les imprimeurs et les artistes
contemporains de leur époque comme Capiello ou Mucha. Chaque Maison
fait passer un message : sur l’identité de sa marque, sur son terroir, sur
ses productions ainsi que ses chais. À chaque époque le message passé
est différent. Avant la loi Évin, il s’agit de prouver son savoir-faire, de se
faire connaître et ainsi devenir un gage de qualité. Il y a beaucoup de
thématiques abordées comme la place de la femme dans la société, la
faune et la flore, l’exportation, la fête, l’amour, la sensualité, la jeunesse.
Les maisons sont reconnues et leur renommée leur apporte une nouvelle
clientèle, elles peuvent se permettre de viser l’excellence et de faire du
cognac un produit de luxe et ainsi le vendre comme tel. Les Maisons de
cognac ont su adapter leurs moyens de communication au travers de
l’affiche malgré les restrictions de la loi Évin. Elles ont su également profiter de la montée des
nouvelles technologies. Certaines maisons, comme Hine,
ne communiquent pas grâce aux affiches publicitaires ; elles préfèrent
le « bouche-à-oreilles » et se servent d’ambassadeurs pour communiquer
( comme Hennessy à ses débuts ) [27] . Les réseaux sociaux sont un
bon moyen de promouvoir leur marque au 21e siècle. Ils permettent une
meilleure visibilité en France et à l’étranger et ciblent un grand nombre
d’individus.
Malgré l’avancée des nouvelles technologies, l’affiche publicitaire a toujours
sa place comme moyen de communication. Si elle est moins placardée sur
les murs, elle existe toujours au travers des sites web et réseaux sociaux
qui font la promotion des marques. Le vocabulaire a évolué mais le principe
reste le même. Ces nouveaux visuels sont des affiches modernes.