Le texte persuade, les notes prouvent (Note : Ce texte est le résumé de l’ouvrage d’Anthony Grafton, « Les origines tragiques de l'érudition — Une histoire de la note en bas de page » dont la traduction française est parue au Seuil en 1998.). Telle est, pour la tradition, la double dimension de l’écriture de l’histoire. Mais qui donc a inventé la note en bas de page ? À la fois forme littéraire du savoir et déchet qui déforme le récit romanesque de l’historien, la note en bas de page raconte souvent l’autobiographie refoulée des savants.
En retraçant l’évolution de la note en bas de page, Anthony Grafton [ Anthony Grafton ] veut comprendre le destin de l’érudition moderne en proposant une histoire générale des savoirs écrits. Il veut découvrir où, quand et pourquoi les historiens ont adopté la forme spécifique d’architecture narrative qui est la leur aujourd’hui.
Arme des pédants, plaie des étudiants, bête noire des « nouveaux » historiens émancipés, la note en bas de page apparaît dans ce livre comme une ressource propre, riche d’une histoire surprenante. Avec humour, Anthony Grafton montre combien les bas de page racontent les laboratoires occultes du savoir. Il propose ainsi une encyclopédie de l’incongru autant qu'une satire de la bêtise moderne. Ensuite, plus gravement, l’auteur s’interroge sur les moyens de faire la preuve de la vérité en histoire, et donc sur la fausseté possible des affirmations de l’historien : on assiste alors, par notes interposées, à la guerre des sources et à la revanche des archives.
Parmi les héros de cette histoire : Athanasius Kircher, Pierre Bayle, Edward Gibbon, les philosophes Hume, Kant, Hegel, et Leopold von Ranke, le brillant historien allemand, souvent crédité, à tort, d’être l’inventeur de la note érudite moderne.
Truffé d’intrigues, d’indices et de révélations inattendues, ce livre introduit à l’analyse intellectuelle des « bas de page », une histoire qui fut souvent reléguée dans les arrière-cours et les arrière-pensées de l’histoire littéraire de l’esprit humain.